C'est une grosse déception pour les Fennecs qui nourrissaient de grandes ambitions à l'occasion du Mondial sud-africain. Les Verts, de retour sur la scène mondiale, après 24 ans d'absence, espéraient franchir enfin le cap du premier tour, mais ils ont raté la marche. Ils repartent sans avoir gagné et sans avoir marqué de but. En effet, le bilan de cette 3ème participation de l'Algérie à la phase finale d'un Mondial n'est pas brillant : 2 défaites, un point au compteur et une dernière place dans ce groupe C. Il n'était pourtant guère évident que la mayonnaise prenne : l'intégration massive de jeunes joueurs, sans expérience des grands rendez-vous, dans la perspective de renforcer le groupe qui était déjà sur place et qui avait besoin de main-forte, comportait, en effet, le handicap de l'assemblage de deux groupes qui ne parlent pas le même «langage». L'osmose ne pouvait être réussie en moins d'une quinzaine de jours de stage. On sait qu'à l'arrivée, cette carence s'est traduite sur le terrain par de grandes lacunes dans le jeu collectif et un inévitable déficit dans la cohésion, les automatismes et la fluidité de la manœuvre, qui ne peuvent être compensés que par un état d'esprit exemplaire, un engagement de tous les instants et une belle «grinta», même si, physiquement, les Fennecs ont énormément souffert, car cela faisait deux mois au moins que leurs championnats respectifs (en Algérie comme en Europe), avaient pris fin et qu'ils ont dûs par conséquent «décrocher». Karim Ziani, que l'on avait connu beaucoup plus présent physiquement, ne disait pas d'ailleurs autre chose après la rencontre. Devant des Américains, dont on n'a point été surpris par la qualité de leur jeu, leur dépense d'énergie, on a assisté à un match très moyen pour ne pas dire faible. Par moments, on a beaucoup souffert devant les Yankees, les organismes étant en bout de chemin en cette fin de saison. L'expérience emmagasinée, surtout par les nouveaux à l'image de Ryadh Boudebouz, à peine âgé de 20 ans, qui a permis de relever le défi face aux Anglais très physiques pour un début, n'a pas de prix. Le match a d'ailleurs été un somptueux test. On se souviendra longtemps du duel épique de Boudebouz avec Gerrard puis Rooney (excusez du peu !). Le jeune Sochalien, solide et alerte malgré quelques dysfonctionnements dans la complémentarité en milieu offensif, a signé de superbes «inventions». Le néo-international, toujours serein, a réussi ses face-à-face. Le duel qu'il a remporté courageusement a émerveillé plus d'un. Il fallait toutefois garder les pieds bien sur terre. La belle performance contre les British ne nous a guère préservés des faux pas trois jours plus tard face aux USA. Il n'y avait dès lors pas matière à parader ou motif pour se laisser griser. L'avenir de l'EN dépend de l'organigramme du staff technique Le plus grand bénéfice de ce Mondial reste la réconciliation réussie entre l'équipe nationale et son public qui a senti que ses protégés ont tout donné, qu'ils étaient habités par un bel esprit de vainqueur, même s'il faut espérer que dans l'avenir nous puissions faire montre davantage de qualité dans le jeu. Maintenant, l'avenir de cette jeune formation dépend de l'organigramme du staff technique qui doit être minutieusement établi. Celui-ci prévoit d'entrer en stage dès le 10 août pour quelques jours afin de préparer le match amical face au Gabon à Blida. Cela est nécessaire quand on sait que la majorité des joueurs ont réintégré leurs clubs pour la préparation d'avant-saison. Enfin, indépendamment du nom du nouveau sélectionneur, le temps est venu de favoriser une véritable remise en cause au moment où les possibilités de l'équipe prennent de l'ampleur, notamment avec la nouvelle génération qui monte et que les responsabilités grandissent aussi... On ne peut parler de renouveau de l'équipe algérienne sans en avoir les acteurs et les gestionnaires les mieux indiqués. La sélection aurait besoin aujourd'hui d'hommes sachant assurer et assumer leurs responsabilités, véhiculer les certitudes qui ont fortement manqué à l'équipe et à tout son entourage. En fait, elle est à la recherche de ce qui permet de voir ce que le footballeur peut receler d'aptitude à aller au-delà du possible et des choses ordinaires. On l'a toujours constaté et ça s'est toujours vérifié : lorsque les hommes de décision et de valeur endossent les responsabilités, c'est toute l'équipe ; joueurs, staff technique et staff médical qui s'impliquent dans l'œuvre de construction. Cela donne aussi la certitude de pouvoir avancer et de progresser. Dans sa nouvelle version et sous «l'emprise» d'un nouveau staff technique, la sélection nationale aurait fortement besoin d'élargir ses centres d'intérêt, de se découvrir sur de nouveaux registres. A quoi pourrait-elle ressembler dans les jours à venir et surtout face à ses nouvelles exigences ? Quels sont les alternatives et les arguments qui pourraient conditionner son mode de fonctionnement ? Il nous semble d'ores et déjà qu'elle est appelée à exprimer et à penser des choses auxquelles elle n'avait pas songé auparavant, à s'ouvrir sur des prérogatives différentes de celles qu'elle avait pris l'habitude d'assumer et même de valoriser tout le capital qu'elle recèle et qu'elle doit exploiter de manière optimale. Si elle arrive à relever ce challenge, elle accédera alors à une nouvelle dimension sur le plan technique, celle qu'elle est justement censée avoir, pas seulement sur les terrains, mais aussi et surtout dans la manière avec laquelle elle est préparée, gérée. Les contraintes auxquelles l'EN devrait faire face, les priorités qu'elle est tenue de prendre en considération doivent avoir d'autres significations, d'autres noms, différents de ceux auxquels elle s'était identifiée ces derniers temps. Le chantier est ainsi ouvert sur les véritables besoins de la sélection nationale, ce qu'elle devrait accomplir sur le terrain et sur les moyens dont elle disposerait. Les échéances arrivent à grandes enjambées, le temps presse aussi. Quand on pense à ce qui devrait arriver, à l'avenir de la sélection, le nom du premier responsable technique devrait déterminer assurément la phase à venir, ce qui devrait s'y faire et s'y accomplir, ce qui est de nature à donner une plus grande dimension au jeu et au comportement de l'équipe. Y. B. Les entraîneurs étrangers La nervosité a des explications. Chacun a son hypothèse pour élucider le mystère des contre-performances du «club des six». Et l'entraîneur étranger est le coupable, le plus souvent pointé du doigt. Seule l'Algérie employait un ressortissant national comme sélectionneur : Rabah Saadane, assistant, puis entraîneur titulaire lors des deux précédentes participations du pays au Mondial, en 1982 et en 1986. Ailleurs, la Côte d'Ivoire et le Nigeria employaient des coaches suédois Sven-Goran Eriksson et Lars Lagerback, respectivement, le Cameroun comptait sur le Français Paul Le Guen, l'Afrique du Sud sur le Brésilien Carlos Alberto Pereira, le Ghana est dirigé par le Serbe Milovan Rajevac alors que le grand footballeur sud-africain Jomo Sono, qui a joué pour le Cosmos de New York dans les années 1970, a fait trois séjours à la barre des Bafana Bafana. De l'avis de nombreux spécialistes, ces pays ont fait une erreur en parachutant des coaches étrangers en Afrique, où ils sont confrontés à une mosaïque de cultures. «En Angleterre, il n'y a pas de problème, les joueurs sont tous des Anglais. Même chose en Argentine. Mais au Nigéria et en Afrique du Sud, il y a plusieurs ethnies. Il faut que l'entraîneur comprenne la manière de penser de chacun. C'est pour ça que, selon moi, il faut qu'un entraîneur passe au moins six mois par an dans le pays qui l'emploie. Ce n'est sans doute pas un hasard si c'est le Ghana qui s'est le mieux débrouillé au premier et deuxième tour. Rajevac, entré en fonction il y a deux ans, a eu le temps de se familiariser avec ses joueurs et d'implanter son système de jeu. On ne peut en dire autant d'un mercenaire comme Eriksson, qui a accepté le poste il y a trois mois et n'a pu travailler que cinq semaines avec les joueurs ivoiriens avant le début du Mondial. Il faut de la continuité», plaide l'ancien international zambien Kalusha Bwalya. «Il ne faut pas changer d'entraîneur au dernier moment, à six semaines de la Coupe du monde. Il faut essayer de travailler dans la tranquillité et la sérénité que, malheureusement, il est assez difficile d'avoir dans les pays africains», ajoutera-t-il. Y. B.