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L'impérative écriture de l'Histoire
Publié dans La Tribune le 23 - 08 - 2010

Avec la mort de Lakhdar Bentobal, c'est un pan de l'histoire de la révolution algérienne qui a disparu. Plus que la disparition d'un combattant – il y en eut des milliers et n'ont pas démérité -, c'est un des acteurs les plus importants d'une des plus grandes guerres de libération du siècle dernier qui s'est éteint. L'homme fait partie du groupe des Six qui ont pris la décision de déclencher la révolution le 1er novembre 1954. Lakhdar Bentobbal était également un élément du triumvirat qu'on dénommait les «Trois B». Avec Krim
Belkacem et Abdelhafidh Boussouf, ils avaient pratiquement la haute main sur le cours de la révolution, notamment après le Congrès de la Soummam et l'assassinat de Abane Ramdane, en décembre 1957. Le propos n'est évidemment pas de citer les hautes luttes enregistrées par le défunt. Ni de rappeler les tristes épisodes auxquels Bentobal avait participé. Ce serait intéressant d'en aborder les contours de son vivant, même si l'ancien colonel du Nord-Constantinois était l'un des rares responsables à assumer, publiquement, l'assassinat de Abane Ramdane.Il est cependant des questions qui, par leur pertinence, font grandir une nation. Il en est ainsi de l'écriture de l'Histoire. Le sujet est quelque peu galvaudé. Il est vrai aussi que des centaines, voire des milliers d'articles de presse ont été consacrés au sujet. Mais la disparition d'un homme de la trempe de Bentobal remet au goût du jour cette lancinante question qui fait défaut chez nous. Lakhdar Bentobal est parti, et il a pris avec lui des pans entiers de notre histoire. Il a dû laisser des archives à exploiter. Mais cela ne saura suffire. Inutile de lui reprocher de ne pas avoir beaucoup écrit ou témoigné avant de s'en aller. Il est trop tard, car l'homme a rejoint l'au-delà.Le message est cependant à adresser aux rares dirigeants de la révolution encore vivants. Ils doivent impérativement laisser des écrits. Hocine Aït Ahmed, Ali Kafi et certains autres l'ont fait. Mais il est anormal qu'une personnalité comme Ahmed Ben Bella n'ait par encore livré ses témoignages sur ce qu'il a vu ou entendu durant la guerre et bien avant. Comme lui, d'autres responsables encore vivants ont traversé une bonne partie de l'histoire de notre pays. Ils ont été des témoins privilégiés de trois périodes différentes : l'ère du mouvement national, la guerre de libération et l'indépendance du pays. La matière qu'ils fourniront servira, à coup sûr, de précieuses sources aux historiens auxquels revient le rôle d'écrire notre histoire. La chose n'est pas encore faite convenablement. Même s'il faut saluer ici le travail méritoire de certains historiens.Témoigner ou écrire ne signifie pas pour un homme qui fait l'histoire - ou qui en est le produit, c'est selon - solder ses comptes. C'est malheureusement le cas de certains anciens responsables qui ont fourni des témoignages écornés sur d'autres historiques qui ne sont plus de ce monde. Ce n'est pas ce que cherchent les générations montantes. Ce qu'elles veulent avant tout, c'est une histoire qui les réconcilie avec leur histoire, leur passé. C'est cela qui les réconciliera avec leur pays pour mieux prévoir l'avenir.
A. B.


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