Photo : S. zoheïr Par Youcef Salami Une métamorphose est en train de s'opérer dans le secteur de la distribution des produits pétroliers en Algérie. Une batterie de lois a été déjà mise en place. Le décret exécutif n° 07-60, portant fixation du prix de cession du pétrole brut entrée-raffinerie, des prix sortie-raffinerie, des marges de distribution et des prix de vente des produits pétroliers destinés à la consommation sur le marché national, a été consolidé par un décret exécutif adopté en juillet dernier en conseil de gouvernement. C'est un document qui consacre en fait le principe de l'ouverture du marché de la distribution des produits pétroliers aux opérateurs nouveaux, conformément aux dispositions de la loi n° 05-07 relatives aux hydrocarbures. Sommairement, il stipule que toute personne désirant avoir une activité de commerce dans le créneau des produits pétroliers pourra s'en approvisionner auprès d'une source de production et commercialiser ces produits. Le gouvernement fait ainsi perdre à Naftal, l'opérateur historique, le monopole de la distribution. Il définit les modalités d'accès aux tiers dans ce domaine. Les infrastructures de Naftal seront de fait mises à la disposition de sociétés étrangères, une forme de libéralisation qui n'agrée certainement pas à tout le monde, beaucoup estimant qu'il n'est pas normal que des opérateurs étrangers exploitent des infrastructures, toutes prêtes, construites par Naftal. C'est un argument économique qui tient. Mais il n'y a pas que la question des infrastructures. Les nouvelles dispositions touchent également les prix. Les tarifs à appliquer dans les infrastructures logistiques, dans le transport des produits pétroliers et dans la caisse de péréquation vont, dans cette perspective, changer. Les prix des produits pétroliers, taxes non comprises, aussi. Jusqu'à présent, les prix des carburants sont réajustés dans le cadre des lois de finances. Cela va-t-il être modifié ? «Pas dans l'immédiat», si l'on s'en tient aux déclarations du porte-parole du gouvernement, Abderrachid Boukerzaza. Ce dernier s'est exprimé sur la question au terme du conseil de gouvernement qui a adopté le décret sus-évoqué. Des prix administrés, subventionnés, des organisations internationales, comme l'OMC, n'en veulent pas. L'Organisation mondiale du commerce, à laquelle l'Algérie souhaite accéder, a d'ailleurs émis des réserves quant à la question des produits énergétiques, produits pétroliers compris. Dans l'esprit des négociateurs de l'OMC, les subventions, de manière générale, affectent la concurrence. Des pays membres de cette institution multilatérale ont demandé aux négociateurs algériens de revoir le dossier des produits pétroliers. La réponse des autorités algériennes ne s'est pas fait attendre. «Il n'en est pas question.» Dans l'une de ses déclarations, le ministre de l'Energie et des Mines a dit non à ce qui est demandé par l'OMC. Les prix des produits pétroliers demeurent problématiques. Ils ne le sont pas moins pour d'autres pays candidats à l'accès à l'OMC. La Russie, par exemple, est dans la même situation que l'Algérie. Puissance reconnue, cette dernière n'en est pas moins en difficulté sur le processus de son adhésion à l'OMC depuis des années. Elle a du mal à faire avancer ses négociations face à des interlocuteurs intraitables sur le problème des subventions. Pour en revenir au sujet de la libéralisation des produits pétroliers, il faut dire que l'Algérie ne fait pas exception à une tendance globale dans le monde : une implication plus forte du privé dans la distribution, une libéralisation plus poussée dans le raffinage. La libéralisation introduite dans la filière de la distribution était dans l'air après l'adoption en 2005 de la loi sur les hydrocarbures, une législation chère au ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil. La distribution était en fait ouverte au privé national, notamment en ce qui concerne l'enfûtage ou encore les stations-service. Il reste que les opérateurs étrangers sont moins présents dans cette branche. Le seront-ils davantage dans le futur ? Avec la mise en service du réseau autoroutier avant fin 2009, des opérateurs pourraient s'intéresser à l'installation de stations-service tout le long de ce réseau en chantier aujourd'hui. Ce sera un créneau porteur, très disputé. Pas moins de vingt-cinq milliards de mètres carrés d'espaces verts, avec plantation d'arbres tels que palmiers, orangers et oliviers, des aires de détente, des hôtels, des restaurants, des boutiques, des stations-service sur les deux rives de l'infrastructure seront ainsi à exploiter. Naftal y réfléchit. Elle veut être de la compétition. Elle pense fructifier ses atouts dans des activités annexes : les prestations «non fioul» dans les stations-service à construire à la faveur du projet autoroutier en question. C'est une activité qui rapporte, a fortiori dans un marché encore vierge. Les activités «non fioul», comme on en trouve dans d'autres pays, concernent les services restauration, motels (hôtels au bord des routes à grande circulation), boutiques et entretien mécanique rapide des véhicules. Naftal a déjà engagé des discussions avec des sociétés étrangères en vue de monter des projets en partenariat dans les prestations «non fioul» dans les futures stations-service. Le projet est ambitieux. Il va englober, dans un premier temps, certaines stations de gestion directe qui ont été choisies en raison de leur emplacement sur les grands axes routiers et de leur superficie disponible pour accueillir ces nouvelles activités. Les responsables de Naftal soulignent que développer des activités «non fioul» en Algérie, c'est générer de nouvelles recettes pour l'entreprise dans une conjoncture de concurrence. Il n'y a pas de raison de ne pas calquer ce qui fonctionne bien dans des pays développés. Les activités «non fioul» contribuent à hauteur de 65% du chiffre d'affaires des stations d'essence dans beaucoup de pays. Naftal a par ailleurs lancé, depuis quelques mois, une vaste opération de modernisation, de rénovation et de «relookage» de son réseau de stations-service. C'est une opération à visées concurrentielles, commerciales. C'est l'amélioration des prestations de cette entreprise qui est en jeu. L'opération s'étale sur une période de quatre années. Et elle comprend la mise à niveau de 673 stations (333 en gestion directe et 340 en gestion libre). Les stations les plus fréquentées vont être réaménagées selon un design élaboré par une entreprise turque. Naftal, filiale à 100% de Sonatrach, créditée d'une expérience dans le domaine de la distribution des produits pétroliers, dotée d'un réseau dense, est liée par un ensemble de projets de partenariat avec des entreprises étrangères, dont Total. Issue donc de Sonatrach, Naftal a été créée le 6 avril 1981. Entrée en activité le 1er janvier 1982, elle est chargée de l'industrie du raffinage et de la distribution des produits pétroliers sous le sigle Naftal. En 1987, l'activité raffinage est séparée de l'activité distribution. Suite à quoi, la raison sociale de la société change et Naftal est désormais chargée de la commercialisation et de la distribution des produits pétroliers et dérivés. A partir de 1998, elle change de statut et evient société par actions (filiale à 100% de Sonatrach). Elle a pour mission principale la distribution et la commercialisation des produits pétroliers sur le marché national. Elle intervient dans une somme de domaines : l'enfûtage GPL, la formulation de bitumes et de la distribution, le stockage et la commercialisation des carburants, du GPL, des lubrifiants, des bitumes, des pneumatiques, du GPL/carburant et des produits spéciaux.Et également dans le transport des produits pétroliers.