«Plus de 90% du financement des groupes terroristes proviennent de paiement de rançons.» En faisant une telle affirmation, le ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines sait de quoi il parle : tant que les pays occidentaux paient pour libérer leurs otages, les groupes terroristes prennent des ailes et garnissent leurs «comptes».Cela fait très longtemps que la rançon fait partie de l'activité terroriste. Les prises d'otages, souvent accompagnées de revendications, sont le lot quotidien des pays confrontés à une activité criminelle. Cela est valable d'ailleurs pour la criminalité ordinaire. De par le passé, ces demandes sont souvent le fait de groupes criminels. Car, les actions des groupes terroristes se limitaient jusque-là à des revendications politiques.Le mois de décembre 1994, un commando du GIA (Groupe islamique armé) avait pris en otage, à l'aéroport d'Alger, des dizaines de voyageurs à bord d'un aéronef de Air France. Avant qu'il ne soit neutralisé par une équipe d'élite de la Gendarmerie française à Marseille (Sud de la France), le groupe de terroristes ne demandait que la libération des prisonniers politiques. Les circonstances ne sont pas les mêmes. Les demandes aussi.Une dizaine d'années après cette très médiatique prise d'otage, 32 touristes occidentaux sont pris en otage dans le Sahara. Cette fois, les revendications sont différentes : aux demandes politiques persistantes, les terroristes ont joint des revendications financières. Il est difficile aujourd'hui d'affirmer ou d'infirmer un quelconque versement de rançon. Il est vrai que la majorité des otages avaient été libérés par l'armée algérienne. Mais des informations persistantes font état de versement de sommes conséquentes d'argent. Comme dans une affaire qui a suivi en 2007, lorsque deux Autrichiens ont été arrêtés en Tunisie, les informations font état de «médiations» effectuées par le fils du guide libyen, Seif El-Islam Kaddafi, président de la fondation éponyme. Là aussi, l'argent n'est pas loin.Depuis plusieurs années, les otages sont donc devenus une monnaie d'échange, d'autant plus que les groupes armés n'arrivent plus à recruter comme c'était le cas avant. «Al Qaïda au Maghreb islamique (AQMI) a besoin d'argent, les otages peuvent devenir un business. D'autres groupes peuvent enlever les Occidentaux pour eux et les leur amener. On a l'impression que cela devient un business dans la zone (Sahel)», avait expliqué, à la fin de l'année dernière, Alain Antil, chercheur à l'Institut français des relations internationales (Ifri) de Paris.Les Nations unies avaient mis en place, il y a quelques années, un arsenal juridique contre les activités terroristes. «Mais l'ONU n'a pas abordé cette histoire de rançon», a reconnu, la semaine dernière Abdelkader Messahel, ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines.Cela fait au moins quatre ans que l'Algérie, l'un des pays les plus frappés par le terrorisme, est en quête d'un consensus international sur une résolution onusienne qui ferait criminaliser le paiement de la rançon. Le texte existe. Mais l'application ne suit pas forcément, malgré l'approbation presque générale de beaucoup de pays membres de l'ONU.L'introduction de cet article, en décembre 2009, n'a pas empêché certains pays, comme l'Espagne, de payer une rançon en contrepartie de la libération de leurs otages. Madrid a beau nié, mais des informations persistantes font état du versement de près de 8 millions d'euros pour la libération, le mois dernier de deux de ses otages retenus au Sahel. La France, officiellement opposée au paiement de la rançon, est une fois de plus, appelée à négocier la libération de cinq de ses citoyens enlevés au Niger. Paris cèdera-t-elle au chantage ? A. B.