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Un duel annoncé, mais qui aura le dernier mot ?
Système de régulation des produits de large consommation contre spéculation
Publié dans La Tribune le 18 - 08 - 2008


Photo : S. Zoheïr
Par Ziad Abdelhadi
A quelques jours du début du mois de ramadhan, les ménages redoutent fort, à juste titre, une flambée des prix des fruits et des légumes, qui ont déjà amorcé leur habituelle courbe haussière. Une méfiance tout à fait légitime car c'est une habitude chez nous de voir les prix sur les étals grimper subitement et sans raison apparente à la veille de chaque Ramadhan. La hausse des prix est aussi cyclique que le mois qu'elle accompagne et elle est toujours au rendez-vous. Ici et là, les prémices d'un tel scénario se découvrent peu à peu au point qu'il est à se demander si le budget des ménages va une fois de plus être laminé par la cherté des produits de large de consommation. Parmi ces derniers, la pomme de terre peut connaître un autre sort si le fameux système de régulation des produits de large consommation (Syrpalac), mis en place par le ministère de l'Agriculture et du Développement rural, arrive à réguler le marché de la tubercule qui, jusqu'à présent, était sous l'emprise de spéculateurs bien au fait des tendances de la demande en cette période précise de l'année où le niveau de consommation augmente sensiblement En théorie, le Syrpalac tel qu'il a été élaboré vise entre autres objectifs de permettre une meilleure disponibilité de la pomme de terre sur le circuit de la vente durant la période creuse d'arrière-saison, soit du 15 août au 15 décembre. Ainsi, les quelque 120 000 tonnes de tubercules stockées au niveau des différentes chambres froides réparties à travers 25 wilayas du pays, dans le cadre de ce dispositif mis en place par le ministère de l'Agriculture, devraient en somme annihiler toute tentative de spéculation sur ce légume de large consommation. Les ménages ne sont pas près d'oublier la hausse vertigineuse du prix de la pomme de terre lors du dernier Ramadhan orchestrée par une faiblesse de la production, d'une part, et par le jeu de la spéculation, d'autre part. Des particuliers ayant accaparé de volumes importants de ce tubercule pour le revendre en petites quantités sur le marché de gros, histoire d'entretenir la tension sur ce produit. Un stratagème qui a réussi puisque les prix sur les marchés de gros ne sont pas descendus au-dessous de la barre des 50 DA le kilo, et qu'il était proposé sur les étals des détaillants à 60 et 65 DA et parfois même 80 DA. Un record historique dont il fallu tirer des leçons sur le pourquoi et le comment le marché de la pomme en est arrivé à cette situation de tension : une volatilité record.
Paradoxe inextricable
A la différence de l'année 2007, où l'on expliquait que la cherté de la pomme de terre était due à la faiblesse de la production -et, du coup, le déséquilibre de l'offre et de la demande s'était vite fait ressentir sur les points de vente-, cette année, on a constaté le contraire : une surabondance et, par voie de conséquence, une chute des prix sans pareil au grand bonheur, certes, des ménages mais au désavantage des producteurs car ces derniers sont arrivés au point où ils n'ont pas trouvé preneurs même à des prix très en deçà du coût de revient. Ce qui a créé chez les agriculteurs un fort désappointement, quelques-uns ont même envisagé de délaisser ce type de culture au profit d'une autre plus rentable. Cela est tout à fait légitime.
Quel est cet agriculteur qui, après avoir subi de telle mévente, et vu son capital budget de campagne considérablement amoindri, veut se remettre à cultiver de la pomme de terre à moins d'un ajustement de dernière minute venant de l'autorité de tutelle ?
Dans la foulée, il est bon de signaler que beaucoup de nos agriculteurs ayant eux vent des bénéfices réalisés par leurs homologues versés dans la culture de la pomme de terre, lors de la campagne 2007, se sont eux aussi mis de la partie en réservant leur périmètre à la production de la pomme de terre. Et du coup, la superficie nationale cultivée en pomme de terre s'est retrouvée d'une campagne à une autre considérablement amplifiée. En somme, en l'espace d'une année nous sommes passés du stade du déficit à celui de la surabondance. Un paradoxe des plus inextricables. Quelle est la solution pour éviter de telles variations dans les volumes de récolte ?
Assurer un approvisionnement régulier du marché de la pomme de terre
Il est clair qu'en période de soudure, la prochaine récolte du tubercule n'interviendra qu'à la fin du mois de novembre prochain, l'offre ne doit pas reculer par rapport à la demande et c'est là où réside l'intérêt du stockage à grande échelle de la dernière récolte. Faire en sorte à approvisionner le marché de façon régulière et de manière à ne pas laisser la possibilité aux spéculateurs de tout bord d'intercéder, remettant en cause ainsi le Syrpalac. Il va sans dire que la mise en évidence d'une quelconque faille dans le dispositif en place ne serait que vite mise à profit par les irréductibles spéculateurs de surcroît très dynamiques et ne ratant aucune occasion de se faire de l'argent au nez et à la barbe des producteurs et des consommateurs. Pour l'heure, il semblerait que le Syrpalac a été conçu de manière très précise. Et, ce faisant, il faut croire que l'opportunité de spéculer sur la pomme de terre est devenue des plus fictive pour ne pas dire totalement exclue à la condition de distinguer le mécanisme à l'œuvre et les ajustements in fine qu'il faudra porter pour arriver en fin de compte qu'il soit des plus efficients aussi bien sur le terrain de la production que celui de la commercialisation. Dans le cas où le Syrpalac arrive à son objectif, et tout porte à croire qu'il en sera ainsi, c'est-à-dire mettre à la vente en quantité suffisante et à des prix très abordables la pomme de terre pendant toute la période de soudure, il faut admettre que le dispositif a réussi, ouvrant droit à son élargissement à d'autres produits.
Le Sirpalac ciblera d'autres produits si les structures d'entreposage sont suffisantes
La tutelle prévoit, en effet, d'élargir le dispositif à d'autres produits et cela par ordre de priorité. Selon le ministre de l'Agriculture et du Développement rural, Rachid Benaïssa, la viande rouge et blanche sera le prochain cheval de bataille de son département qui est tout à fait décidé à discipliner le marché des produits carnés une fois pour toutes. C'est ce que attendent des pans entiers de la société qui n'ont eux de cesse de se priver des protides nécessaires à leurs besoins d'équilibre nutritionnel par cause des prix inabordables sur les étals des bouchers. Viendra ensuite la tomate qui, elle aussi, accuse des volatilités record dans les prix à la consommation. Suivra l'oignon, qui appartient à la famille des légumes qui disparaissent de temps à autre des étals, faisant ainsi les beaux jours des spéculateurs ou plus précisément, des stockeurs occasionnels qui attendent le moment opportun, c'est-à-dire lorsque l'oignon de saison se fait rare, pour l'écouler à des prix élevés. La courgette et le poivron, deux légumes très demandés pendant le mois de Ramadhan, sont inscrits au tableau des cultures spéculatives.
Tout un long et pertinent travail de régulation des produits végétaux et carnés nationaux à mettre en place faute de quoi autant les efforts de production de nos agriculteurs que le pouvoir d'achat des consommateurs s'en trouveront sans les effets escomptés pour les uns et mis à rude épreuve pour les autres.


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