De notre correspondant à Béjaïa Kamel Amghar Quand on engage la discussion avec un enseignant, on entend souvent parler, en premier, d'une regrettable tendance à l'indiscipline et à la désobéissance chez les élèves d'aujourd'hui. Que cela soit à l'école primaire, au cycle moyen ou même au lycée, cette attitude de révolte et de défi génère immanquablement des conflits qui débordent du cadre strictement scolaire. Certains éducateurs, notamment parmi les femmes, ont été déjà agressés ou sérieusement traumatisés par des collégiens ou des lycéens en crise d'adolescence. Des plaintes et des procédures judiciaires ont été engagées contre les petits fauteurs de troubles. D'autres, au risque de paraître mous aux yeux de leurs collègues, déploient quotidiennement diplomatie et sagesse pour ramener le calme et la sérénité dans leurs classes. Des parents d'élèves reconnaissent volontiers cette réalité, mais sans omettre de souligner la violence du contexte général qui a vu ces enfants naître. Venant au monde dans le climat de terreur des années 1990, ces chérubins ont eu une enfance difficile faite de peur et de privations diverses. Evoluant constamment sous pression, ils n'ont pas eu droit à leur part d'insouciance paisible comme leurs aînés. Il se trouve également des éducateurs qui cèdent à la colère pour se permettre de corriger physiquement les faiseurs de chahuts. Récemment, dans la commune d'El Kseur à Béjaïa, un écolier a été sévèrement puni par son maître d'école. Les parents, voyant les mains de l'enfant couvertes de bleus, ont immédiatement réagi en engageant une procédure contre l'école et l'enseignant. Si ce n'est la médiation de l'association des parents d'élèves, l'affaire aurait été tranchée par la justice avec les conséquences que l'on devine pour la carrière de l'éducateur et la réputation de son établissement. Il y a quelques années, toujours dans cette même localité, une collégienne violemment bousculée avait perdu son «pucelage» en pleine cour. Cette fois, l'affaire a été portée devant le tribunal et l'enseignant incriminé a fini en prison. Des cas de violences et de bagarres entre élèves sont aussi légion à travers tous les établissements scolaires de la wilaya. Cela se termine souvent par des arrangements à l'amiable entre parents. Mais quelquefois, faute d'entente et de compréhension ente les deux parties, ces conflits connaissent de fâcheux prolongements entre les familles. Pour de nombreux psychopédagogues, cette violence a aussi des racines dans le système scolaire, lui-même. La surcharge des programmes et la pression pour l'élève expliquent en partie la rudesse des comportements de part et d'autre. L'élève, n'arrivant pas suivre le rythme accéléré des cours, exprime rudement son désarroi. L'enseignant, sommé d'achever son programme dans les délais, est également soumis à une pression permanente. Afin d'évacuer tout ce stress, les spécialistes adhèrent à l'idée d'aérer un peu les cours en accordant davantage d'importance aux activités récréatives. Le cinéma, le dessin, la musique, le théâtre, l'exercice sportif, les sorties sur le terrain sont autant de remèdes susceptibles d'adoucir les mœurs des uns et des autres. Cela permet à chacun de développer au maximum ses compétences, et prépare la famille éducative à vivre ensemble dans le respect et la bonne entente. Même si cela n'explique pas tout, la recette a déjà donné des fruits partout à travers le monde.