Ils sont nombreux les citoyens qui ont fait les frais de leur méconnaissance de la législation régissant la promotion immobilière et particulièrement la vente sur plans. Ils sont nombreux également aujourd'hui à courir derrière le promoteur qui les fait languir pour l'établissement d'un acte notarié de propriété après l'achèvement des travaux et la remise des clés. Le seul document qui prouve, dans l'absolu, l'acquisition est le contrat de réservation. Lequel n'a aucune valeur juridique s'il n'est pas enregistré et n'a pas fait l'objet d'une publicité. En effet, certains acquéreurs, le couteau sous la gorge, ne prennent pas la peine de se renseigner sur la formule vente sur plans, pressés d'en finir avec la location chez des particuliers qui leur coûtent les yeux de la tête. Ils ne prennent même pas la peine de suivre les travaux de leur logement, se contentant de voir l'immeuble «grimper» étage après étage. La surprise, ils l'auront lorsque le promoteur, conscient de leur ignorance, les informe que le projet reviendra finalement plus cher et qu'ils devront désormais débourser plus. Ce que le promoteur appelle réévaluation ressemble à n'en point douter à une arnaque non déclarée. Car il ne présente aucun document justifiant l'augmentation et se refuse même à corriger les contrefaçons constatées par les acquéreurs après l'achèvement du logement. Tout cela a été rendu possible, outre la méconnaissance de la règlementation, en raison de la non-application du décret de 1993 sur la promotion immobilière, de l'absence de suivi et de contrôle, mais aussi par des vides juridiques exploités par les promoteurs, dont quelques-uns financent leur projet avec l'argent des souscripteurs. Certains de ces promoteurs se sont même payé le luxe de prendre l'argent avancé par les futurs acquéreurs et la poudre d'escampette sans laisser de carte de visite. Une situation qui a provoqué des drames familiaux allant parfois jusqu'au suicide. Parce que, faut-il aussi le souligner, beaucoup d'acquéreurs se sont endettés qui auprès des banques, qui auprès de proches pour voir se réaliser leur rêve d'avoir un toit, mais se sont retrouvés sur la paille, dans l'insolvabilité. En somme, une main devant, une main derrière. C'est dans ce contexte qu'intervient le projet de loi régissant la promotion immobilière et que les élus de la nation débattront à partir de demain. Un projet de loi qui met beaucoup de garde-fous qui n'éradiqueront, certes, pas les arnaques - les promoteurs escrocs trouveront toujours une faille -, mais permettront de sécuriser un tant soit peu les acquéreurs potentiels. Ainsi, aux termes de ce projet, n'est pas promoteur immobilier qui veut comme c'est le cas maintenant où un simple enregistrement au registre du commerce et une attestation de qualification (sic !) permettent l'exercice de l'activité. Désormais, «nul ne peut prétendre à la qualité de promoteur immobilier ni exercer cette profession s'il n'est pas titulaire d'un agrément [délivré par le ministère de l'Habitat selon des critères précis - NDLR] et inscrit au tableau national des promoteurs immobiliers». Le projet de loi prévoit, entre autres, des dispositions répressives qui peuvent aller jusqu'à cinq ans de prison et des amendes atteindre 200 millions de centimes pour les promoteurs «et ceux qui exigent et acceptent un versement, un dépôt, une souscription, un effet de commerce avant la signature du contrat de vente sur plans ou de contrat de réservation par-devant notaire», avec cette précision que l'agrément et l'attestation d'inscription au Fonds de garantie de caution mutuelle de la promotion immobilière restent des obligations légales et doivent être annexés au contrat notarié. Le texte prévoit également, pour le plus grand bonheur des futurs acquéreurs, des pénalités à la charge du promoteur pour chaque retard constaté dans la remise du bien immobilier qui fait l'objet de contrat. Le document a suscité, avant même son adoption par le Conseil des ministres, le rejet des promoteurs organisés dans l'AGEA qui ont estimé que ce texte les pénalisait beaucoup plus qu'il ne les protégeait, tout en insistant sur le fait que ce n'est pas ces nouvelles dispositions qui vont éviter les escroqueries. Mais ne dit-on pas que les bons payent pour les mauvais. F. A.