Le déroulement du match ayant opposé jeudi en soirée en finale retour de la Coupe de l'Unaf le MC Alger au Club Africain de Tunis est venu encore une fois témoigner de l'extrême légèreté avec laquelle on gère le football chez nous. En marge de cette rencontre, des incidents déplorables ont eu lieu sur les gradins dont les sièges ont été refaits à neuf à coups de milliards. Des actes et écarts indignes d'un football qu'on ne cesse de qualifier de professionnel. Des mesures rigoureuses s'imposent car au train où vont ces violences, nos stades deviendraient des lieux de haine et de règlement de comptes, ce qui ne peut être compatible avec l'éthique et la morale du sport. Plus grave encore, on a assisté à des batailles rangées lors des matches ASO-MCO et NAHD-RCK, ainsi qu'à des actes de vandalisme allant jusqu'à la destruction de biens publics, de boutiques et d'automobiles. Quant aux sièges des gradins du stade du 5-Juillet, ils ont été entièrement défoncés sans parler de l'utilisation de fumigènes par les deux galeries, pourtant interdits dans les stades par la Fifa. Ce qui a obligé l'arbitre à arrêter la partie pendant cinq minutes aussi longues que stressantes avant la reprise du jeu. Sans doute, quelque part, le football algérien cristallise-t-il mal les épanchements juvéniles. Comment en sommes-nous arrivés là ? Quels «supporters» saccagent les deniers publics ? Comment se permettent-ils d'attaquer des hommes, des pères de famille dévoués à l'ordre public et chargés de les protéger eux-mêmes ? Méritent-ils le Mouloudia, ce grand club au passé illustre et aux glorieux martyrs tombés au champ d'honneur ? Rien ne justifie un tel déchaînement, surtout pas les enjeux sportifs. Au contraire, ce derniers prônent aujourd'hui partout dans le monde le respect d'autrui et l'esprit de la compétition. La règle du jeu est scrupuleusement observée par tout le monde : joueurs, entraîneurs, dirigeants, spectateurs et presse sportive. Tous ces intervenants saisissent aujourd'hui l'ampleur des dégâts provoqués chez nous par des attitudes irresponsables. Le football a un besoin pressant d'adapter ses moyens : l'instauration d'un corps de stadiers, d'un encadrement plus efficient des supporters, d'une réglementation plus contraignante pour les clubs lorsqu'il s'agit de sévir. Mais il a prioritairement besoin que chacun assume ses responsabilités. Au-delà des réglementations et des structures d'accompagnement, un triomphe contre la violence et le chauvinisme procède d'une culture, d'une éducation et d'une patiente œuvre d'encadrement. Pas seulement des jeunes supporters… Au point où en sont arrivées les choses, il n'y a plus de morale qui tienne. La morale primaire n'est plus qu'une rhétorique à laquelle personne n'adhère. Sévir, oui, sévir ! Et, à la limite, ce football incendiaire, la société algérienne s'en passerait volontiers. Que nos «amis» politiciens, ceux qui ramènent toujours les dérives juvéniles aux problèmes existentiels, structurels et sociaux des jeunes, nous épargnent les ritournelles politiciennes : «manque de repères de la jeunesse», «chômage», «embrigadement» et tout le faisceau habituel et redondant de lieux communs. Il s'agit plutôt de circonscrire ces dérives et de ne pas les sortir de leur cadre, à savoir un football qui pourrit, un football malade de surenchères, un football malade de ses joueurs, de ses entraîneurs, de ses dirigeants, de ses arbitres, de ses supporters et qui se meurt à petit feu ! On s'attend donc à voir la FAF sévir. Mais au-delà des sanctions, il faut impérativement revoir nos textes et surtout nos structures. Le cas de cette rencontre n'est pas propre au MC Alger, à l'ASO, au MCO, au NAHD ou au RCK. C'est un fléau dangereux qui est en train de gagner du terrain ; donc autant penser y remédier dès à présent, sinon c'est une tornade qui pourrait tout emporter sur son passage. A. B.