Les émeutes qui ont secoué l'Algérie, qui continuent de faire l'actualité en Tunisie et dont l'onde de choc semble s'étendre à d'autres pays arabes délivrent de nombreux enseignements : d'abord la nécessité pour les dirigeants concernés de décrypter (puis d'y répondre) le message de la rue qui a grondé pour réclamer la dignité dans tous les sens de ce que suppose ce concept. Pour le cas particulier des pays de l'Union du Maghreb arabe (UMA), les bouleversements de ces derniers jours remettent au goût du jour la problématique de l'édification effective de cet espace, une édification qui supposerait une intégration politique et économique de ces Etats, à même de favoriser le développement et l'accès de leurs populations et leurs aspirations légitimes. Cela, d'autant plus que le potentiel humain et les ressources matérielles et financières permettent cette intégration pour peu que l'environnement politique, économique et social s'y prête. Ceux qui défendent cette intégration économique des cinq pays de la région avancent l'argumentaire selon lequel ces derniers peuvent constituer «une plate-forme» de développement pour le continent africain et représenter un acteur-clé dans l'espace euro-méditerranéen.L'impératif d'une intégration économique pour ces pays est d'autant plus incontournable qu'il garantit aux pays concernés de mieux asseoir leur poids économique sur l'échiquier planétaire marqué par l'émergence des regroupements et autres organisations régionales, continentales ou internationales. A l'instar de l'Union européenne (UE), la Communauté des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CDEAO), l'Association des nations de l'Asie du Sud-Est (ASEAN)… Et, partant, faire face aux défis mondiaux comme cela s'est ressenti avec la crise financière internationale dont les répercussions continuent de renvoyer leur écho. Or, cet objectif tarde à être atteint comme l'illustrent ces quelques faits : le volume des échanges commerciaux intermaghrébins est toujours insignifiant. Sur les 36 conventions et instruments d'intégration maghrébine qui ont été signés depuis l'existence de l'UMA, six seulement ont été ratifiées. La Banque maghrébine pour l'investissement et le commerce extérieur (BMICE), prévue dès 1991 et dont le siège est établi à Tunis, n'est toujours pas fonctionnelle. Alors que le taux d'intégration commerciale est de plus de 60% pour les pays de l'UE et d'environ 8% pour ceux de la CEDEAO, il n'est que de 2% pour la région qui nous intéresse. Pour concrétiser le projet d'un Maghreb économiquement intégré, d'aucuns préconisent la mise en place de la zone de libre-échange du Maghreb alors que d'autres spécialistes défendent l'option de renforcement de l'intégration sectorielle notamment dans les domaines stratégiques de l'agriculture, des transports, des nouvelles technologies, de l'énergie, de l'industrie et des finances ou encore la création du marché commun maghrébin. L'ultime étape serait, à plus ou moins long terme, la création de l'Union économique et monétaire du Maghreb. L'intégration économique de l'UMA, supposant, en réalité, l'ensemble de ces facteurs, ne saurait cependant devenir une réalité en l'absence d'une volonté politique de transcender toutes les divergences qui empêchent une existence politique de cet espace. M. C.