Photo : S. Zoheir Par Ziad Abdelhadi Faible potentiel des terres agricoles, cherté des prix des matières premières et manque de maîtrise dans les techniques d'élevage sont les principales causes qui freinent l'essor de la production animale en Algérie et mises en exergue dans les conférences données lors des forums «Finoviandes», «Fivavic» et «Fiplait» organisés en marge du Salon de l'élevage et du machinisme agricole (Sipsa) qui s'est tenu du 18 au 21 mai dernier au Palais des expositions des Pins maritimes à Alger. «Ce constat des lieux est d'autant plus source d'interrogations», a indiqué M. A. Mihoubi, consultant international en élevage et produits carnés dans son exposé «Les métiers de la viande : nécessité et opportunité d'une formation, cas de l'Algérie».Ce dernier a tenu à souligner qu'«en dépit des multiples programmes de développement, d'amélioration et surtout des subventions accordées aux éleveurs depuis quelques années et revues à la hausse depuis plus d'une année, les productions animales en Algérie sont encore loin du niveau de performance escompté». Et de signaler «l'amélioration enregistrée ces dernières années orientées principalement vers l'intensification du bovin laitier, l'aviculture et l'exploitation extensive de l'élevage ovin (qui) n'ont en fait donné que de piètres de résultat», regrette l'expert.Devant ce constat, il préconise une autre approche qui consiste à donner notamment plus d'autonomie au secteur de la production animale car, jusque-là, il reste tributaire des importations de l'aliment. Un point de vue auquel s'associe le président du Comité interprofessionnel du lait (CIL), M. Benchakor. Ce dernier a en effet mis en exergue dans son exposé sur les «Propositions de mesures pour le développement de la production laitière» l'intérêt «de donner la priorité à l'extension des cultures fourragères nécessaires pour assurer aux animaux une ration alimentaire en rapport avec le niveau de rendement attendu». «La disponibilité d'aliments verts au niveau du marché national de fourrages – qui reste à créer – constitue une question centrale dans la problématique de la construction d'une économie nationale du lait et de la viande rouge bovine et ovine», affirmera-t-il. L'aviculture face aux difficultés Toujours à propos du marché national de fourrage, M. Benchakor estime que «pour que l'offre soit au moins égale aux besoins, il faudrait favoriser le développement d'un système de partenariat entre les éleveurs sans terre et les agriculteurs détenant des terres irrigables». Au sujet de la cherté des concentrés (ajouts nutritifs pour arriver au ratio indispensable au bon équilibre de l'aliment du bétail), le président du CIL dira : «Sachant que les prix des céréales entrant dans la fabrication des concentrés ne cessent d'augmenter (1 quintal de maïs à 2 750 DA et 2 200 DA pour la même quantité de son), il serait intéressant d'implanter des usines de déshydratation des fourrages (luzerne notamment).» «Avec de telles installations, on peut réduire l'utilisation des aliments concentrés et diminuer en conséquence le coût du ratio alimentaire», soutient-il.Concernant la production laitière, M. Benchakor a laissé entendre qu'elle devrait être portée à un niveau assurant ou approchant l'autosuffisance pour ce produit stratégique. Il terminera son intervention en concluant : «Il faut au plus vite réduire l'importation de poudre de lait, qui grève le budget de l'Etat, ce qui va permettre une meilleure sécurité alimentaire.»En ce qui concerne la production de viande blanche, le président du comité interprofessionnel de la filière avicole s'est efforcé dans son exposé de mettre en avant les problèmes que rencontrent les aviculteurs. Lors des débats qui ont suivi les conférences sur la filière avicole, les intervenants se sont plaint du fait que l'Etat ne leur accorde pas les mêmes subventions que celles dont disposent les éleveurs bovins. Un des intervenants a tenu à rappeler que la filière, après avoir connu un fort dynamisme, plonge de plus en plus dans la léthargie. Un autre éleveur s'est montré plus direct en affirmant que dans leur secteur foisonnent les bricoleurs, «c'est-à-dire ceux qui n'ont aucune compétence dans ce type d'activité et qui, malgré des taux de perte importants, s'entêtent dans leurs erreurs», a-t-il soutenu. «Ce sont des volumes importants d'aliments qui partent en fumée au lieu que les vrais professionnels en bénéficient», déplore l'éleveur.Sur le plan de la consommation, il faut reconnaître que le poulet reste disponible sur les étals mais il est trop souvent sujet à des fluctuations des prix au kilogramme, privant ainsi les ménages d'une protéine animale censée être à la portée des petites bourses.Lors des débats, les intervenants ont également reconnu que la filière avicole est fortement désarticulée et «nécessite par conséquent la mise en place de nouvelles formes d'interventions», dira un membre de l'association nationale de la filière. Pour ce dernier, la réduction des prix ou bien leur stabilité sur les étals passent par une réduction des coûts de la production que «seules de nouvelles exploitations peuvent garantir, car introduisant des techniques d'élevage nouvelles permettant de réduire au maximum le taux de mortalité dans les batteries et aussi d'alimenter les sujets à doses précises, le gaspillage étant presque nul», a-t-il indiqué.Notons enfin, et comme avancé lors des forums suscités, malgré la dynamique de production très intéressante des secteurs avicole, ovin et laitier, qui s'est traduite, certes, par une augmentation de la consommation par habitant, le marché de la consommation des productions animales reste encore caractérisé par un recours aux importations. Cette tendance peut être, si ce n'est inversée, du moins arrêtée, car les potentialités existent et il s'agit juste des les exploiter de manière optimale. Z. A. L'Algérie 13e importateur de viandes Selon un rapport de l'organisation onusienne pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) sur les niveaux de consommation et des productions animales par pays, le classement de l'Algérie est une illustration claire de la tendance du marché nationale caractérisée par des volumes importants d'importation en viande bovine, produit carnet, poudre et dérivés de lait. Selon la FAO, l'Algérie vient au 13e rang mondial des importateurs de viande rouge en 2010; elle était au 15e rang en 2008. En ce qui concerne les produits laitiers, le pays reste toujours au premier rang des pays africains importateurs. Notons aussi et cela à titre de comparaison : l'Algérie avec ses 37 millions d'habitants est classée au même niveau d'importation que la Chine qui compte 1,3 milliard d'habitants. Le montant des importations en produits laitiers s'est élevé en 2010 à près de 800 millions d'euros.