Les fausses informations qui ont circulé au début de la crise libyenne faisant état de l'envoi par Alger de mercenaires pour soutenir Mouamar El Gueddafi, continuent de susciter des réactions. Aux Etats-Unis, deux articles ont été publiés dernièrement. Le premier article est celui d'un lobbyiste américain travaillant pour le compte du Maroc, Edward Gabriel, paru récemment dans le journal spécialisé dans les affaires du Congrès américain, «The Hill». Ce lobbyiste pro-marocain, qui avait été l'ambassadeur américain au Maroc de 1997 à 2001 et, actuellement, conseiller du gouvernement marocain, s'était adonné à des dénigrements sur la position de l'Algérie vis-à-vis de la crise libyenne. Un deuxième article se voulant une réplique cinglante au premier a été publié, juste après par un éminent juriste, M. Gare Smith. Ce dernier a dénoncé les fausses accusations d'envoi de mercenaires par l'Algérie en Libye dans un article intitulé «Le Maroc est-il en quête d'une unité régionale ou d'une hégémonie sur ses voisins ?». Dans son article, cité par l'APS, le juriste considère qu'Edward Gabriel «accuse l'Algérie hâtivement et d'une manière décousue et semble avoir l'intention d'attiser davantage le différends entre le Maroc et l'Algérie». Affirmant que de telles allégations ne peuvent rester sans réponse, M. Smith écrit dans le journal spécialisé dans les questions du parlement américain que «contrairement aux assertions de Gabriel, l'OTAN elle-même n'a fait aucune déclaration indiquant que le gouvernement algérien appuie El-Gueddafi et je mets au défi quiconque de produire une telle preuve». «Ironiquement, alors qu'il professe, d'une part, des relations plus étroites avec ses voisins du Maghreb, le Maroc persiste, d'autre part, à payer des lobbyistes comme Gabriel pour ‘‘remuer le pot'' en faisant de telles allégations spécieuses», poursuit ce juriste, qui avait dirigé auparavant le Bureau du département d'Etat américain pour la démocratie et les droits de l'homme. Il a ajouté que «l'Algérie a protesté contre ces fausses allégations dans le passé et continuera de le faire». Cet ancien conseiller en politique étrangère du feu sénateur Edward Kennedy explique que «conformément à sa position de longue date de non-ingérence dans les affaires intérieures des autres pays, l'Algérie a déclaré publiquement qu'elle ne prend pas partie dans le conflit libyen, qu'elle respecte scrupuleusement les résolutions du Conseil de sécurité relatives à la Libye et que, comme la plupart, y compris l'OTAN, elle est favorable à une solution politique à la crise libyenne». «Regardons de plus près les faits : Gabriel prétend que l'Algérie a voté contre la décision de la Ligue arabe relative au soutien de l'ONU pour la mise en place d'une zone d'exclusion aérienne sur la Libye. Il a tort. La décision de la Ligue arabe a été adoptée par consensus, par tous ses membres», rappelle M. Smith. En outre, ajoute-t-il, «l'Algérie a exprimé, immédiatement après, son engagement à respecter la résolution 1973 de l'ONU, qui a établi une zone d'exclusion aérienne sur la Libye et elle l'a fait scrupuleusement». Abordant la question des mercenaires, M. Smith décortique cette question et démolit, sans laisser le moindre doute, la fausse thèse de l'implication de l'Algérie. «Gabriel allègue également que 15 Algériens ont été capturés par les rebelles libyens. Cela peut être vrai. Mais même si c'est le cas, cela ne prouve en rien quant à la position du gouvernement algérien à l'égard de la Libye», soutient ce juriste qui a été également le représentant des Etats-Unis à l'ex-Commission des droits de l'homme de l'ONU. En effet, explique-t-il, «les mercenaires des pays africains voyagent souvent à travers le continent pour combattre dans les guerres d'autres pays. Mais ces activités individuelles sont loin de représenter la politique étrangère de leur gouvernement. Gabriel affirmerait-il que la capture d'un Marocain reflète le soutien de Rabat à El-Gueddafi», s'interroge-t-il. Pour M. Smith, «la crise en Libye est grave et exige, à la fois, l'attention de la communauté internationale et celle des dirigeants régionaux matures». En conséquence, relève-t-il, «l'utilisation de cette crise comme un prétexte pour attaquer un voisin qui œuvre de bonne foi afin de régler la situation est irresponsable et soulève de sérieuses questions au sujet des véritables intérêts régionaux du Maroc». Des observateurs algériens ont déjà soupçonné «la main» du Maroc dans cette campagne propagandiste contre l'Algérie, confirmée, par ailleurs par un membre du Conseil National de Transition libyen. L'article de l'ancien conseiller en politique étrangère du feu sénateur Edward Kennedy vient encore une fois d'anéantir la thèse concoctée par le royaume chérifien.Après le démenti ferme du ministre des Affaires étrangères, M. Mourad Medelci qui avait déclaré, rappelons-le, «nous avons apporté les démentis les plus clairs à ces accusations que nous considérons dilatoires, basées sur des agendas qui n'ont rien à voir avec l'affaire libyenne. Ces accusations sont beaucoup plus anciennes que la crise en Libye, cela est très clair», le premier ministre, Ahmed Ouyahia a affirmé, samedi dernier, en réponse à une question sur la réouverture des frontière de l'Algérie avec le Maroc «nous avons besoin d'un climat empreint de bonne foi et de confiance mutuelle entre voisins (...) mais les dernières déclarations officielles marocaines accusant l'Algérie de financer des mercenaires africains en Libye, n'encouragent malheureusement pas cette tendance». Il faut signaler enfin que les allégations du Maroc ont également refroidi les relations algéro-françaises. La réaction de Paris qui a laissé planer le doute sur une éventuelle implication de l'Algérie dans l'envoi de mercenaires en Libye n'a pas été du goût des officiels à Alger. Faut-il rappeler que le porte-parole du ministère français des Affaires étrangères, Bernad Valéro, interrogé sur des informations faisant état d'une éventuelle aide de l'Algérie au régime de Mouammar Kadhafi, a répondu: «votre question est pertinente. Aujourd'hui, je n'ai pas d'information sur ce sujet. L'implication d'étrangers dans des actions criminelles contre la population civile serait grave et en contradiction avec les résolutions 1970 et 1973 du Conseil de sécurité». En réponse à ces déclarations qui visaient à maintenir l'ambiguïté, le porte-parole du ministère des affaires étrangères, Amar Belani s'est suffit de dire «laissez-moi vous dire que la règle voudrait que l'on ne porte pas une appréciation quelconque sur une question lorsque l'on affirme, en même temps, ne pas avoir d'information sur les sujets en question». Apparemment dans cette affaire où les règles ne sont pas respectées, tout était biaisé dès le départ. H.Y. /APS