Sur le terrain, le régime libyen ne semblait pourtant prêt à aucune concession. L'Otan l'a accusé d'avoir posé «un champ de mines» autour de Misrata, une ville qu'El Gueddafi cherche à reprendre. Le conflit en Libye a connu hier un développement politique majeur, avec la décision de la Russie de lâcher Mouamar El Gueddafi, et pourrait entrer dans «une nouvelle phase» militaire avec le déploiement d'hélicoptères d'attaque britanniques aux côtés des français. Ahmed Omar Bani, porte-parole militaire de la rébellion à Benghazi, a affirmé que les forces d'El Gueddafi avaient posé les mines juste avant de partir «quand elles ont senti qu'elle perdaient», mi-mai. L'objectif des forces d'El Gueddafi est «d'empêcher la population de circuler» et de «reprendre la ville», a déclaré le commandant en chef de l'opération de l'Alliance atlantique, le général Charles Bouchard. Les forces gouvernementales continuent de faire pression sur Misrata en lançant des roquettes Grad. Selon le docteur Khalid Abu Falgha, chef du comité de santé de la ville, trois personnes ont péri jeudi dans ces tirs à Dafnia, à l'ouest de Misrata, et 20 ont été blessées, dont un enfant. Mais hier, c'est loin du front que le sort de Mouamar El Gueddafi a été débattu et que le conflit a peut-être pris un tour nouveau. A Deauville (France), où avait lieu un sommet du G8, le dirigeant libyen a perdu un allié de poids, la Russie de Dmitri Medvedev qui s'est alignée sur la position des Occidentaux pour réclamer son départ. «Le monde ne le (El Gueddafi) considère plus comme le leader libyen», a déclaré le président russe. La Russie s'était abstenue lors du vote à l'ONU de la résolution 1973 autorisant des frappes internationales contre Tripoli, mais refusait jusqu'à présent de soutenir les appels des Etats-Unis et de la France au départ de Mouamar El Gueddafi. Hier à Deauville, le président Barack Obama a averti que la coalition allait «finir le travail» en Libye, tandis que Moscou acceptait de signer une déclaration finale du G8 affirmant que El Gueddafi avait «perdu toute légitimité». «Il n'a pas d'avenir dans une Libye libre et démocratique. Il doit partir». Le président russe Dmitri Medvedev a par ailleurs confirmé avoir offert à ses partenaires du G8 sa «médiation» dans le conflit libyen et annoncé l'envoi immédiat d'un émissaire à Benghazi, fief de la rébellion libyenne. Sur le terrain, cinq puissantes explosions ont secoué jeudi soir le secteur de la résidence du colonel El Gueddafi, près du centre de Tripoli. L'Otan a multiplié depuis quelques jours ses raids sur la capitale libyenne. Signe d'une volonté d'accélérer le processus et de se rapprocher du sol, Paris et Londres vont dépêcher des hélicoptères de combat capables de cibler plus précisément les forces d'El Gueddafi en milieu urbain. Les opérations militaires de l'Otan en Libye entrent dans «une nouvelle phase», a, pour sa part, déclaré le Premier ministre britannique. Le président français Nicolas Sarkozy a déclaré qu'il comptait se rendre avec David Cameron, «le moment venu», à Benghazi. Le régime libyen, en proie à une révolte sans précédent depuis la mi-février, est sous le feu depuis plus de deux mois des raids d'une coalition internationale qui est intervenue le 19 mars pour assurer la protection des civils. La révolte a contraint près de 750.000 personnes à fuir, selon l'ONU, et fait des milliers de morts selon le procureur de la Cour pénale internationale, Luis Moreno-Ocampo, qui veut poursuivre Mouamar El Gueddafi pour crimes contre l'humanité. Mais, acculé au départ depuis des semaines, frappé par des sanctions et affaibli par des défections, celui qui règne sur la Libye depuis près de 42 ans reste inébranlable. «Connaissant l'homme, je ne crois pas qu'il va partir», a déclaré hier à Deauville, le secrétaire général sortant de la Ligue arabe, Amr Moussa.