Il aura fallu cinq mois au nouveau Premier ministre Nagib Mikati pour doter le Liban d'un nouveau gouvernement, ce lundi 13 juin. Beaucoup doutaient en effet de la capacité de former un gouvernement dans une atmosphère politique tendue au Liban. L'après Hariri s'annonçait particulièrement inextricable. Ce nouveau cabinet, boycotté par le courant du futur de l'ex-Premier ministre Saad Hariri, est considéré comme une victoire politique du Premier ministre accusé d'être proche du Hezbollah, dès sa nomination le 25 janvier. Lors de son allocution au palais présidentiel de Baabda, Nagib Mikati s'est voulu conciliateur en tenant à réaffirmer sa volonté de relancer «un dialogue national constructif» au Liban et invite l'opposition à considérer ce nouveau gouvernement comme «celui de tous les Libanais». La majorité des portefeuilles (19 sur 30) reviennent aux alliées du Hezbollah, notamment le chrétien Michel Aoun et le chef du mouvement Amal et président du Parlement, Nabih Berri. Le parti de Nasrallah occupe finalement deux postes dans ce nouveau cabinet. La situation politique au Liban semble avoir changé d'un extrême à l'autre. Les deux camps antagonistes ont échangés les rôles. Les prochaines étapes politiques seront ardues. Le ministère de l'Intérieur et celui de la Justice ont été âprement disputés pour des raisons évidentes de futures batailles politiques. La question du Tribunal spécial pour le Liban (TSL) avait causé la chute du dernier gouvernement le 12 janvier dernier. Le Hezbollah et ses alliés s'étaient retirés du gouvernement, outrés des dernières accusations du tribunal de l'ONU en charge de l'enquête sur l'assassinat en 2005 de l'ancien Premier ministre Rafic Hariri. Le TSL s'est distingué par une posture douteuse et plutôt politique. Nagib Mikati a refusé de donner à ce parti un engagement concernant le TSL.Cependant, le Tribunal sera l'un des principaux défis de son gouvernement car l'acte d'accusation est attendu pour cette année. Le portefeuille de la Justice aura donc une grande importance puisque c'est ce département qui aura à faire avec les décisions du Tribunal international. Le ministère de la Justice sera tenu également de procéder à d'éventuelles arrestations. Une bataille s'annonce dans cette optique. Le nouveau gouvernement au pays du Cèdre aura particulièrement reçu le satisfecit du voisin syrien. Bachar el-Assad, en proie à une contestation populaire pour plus d'ouverture démocratique a été le premier chef d'Etat à féliciter le président de la République, Michel Souleiman. Une position qui n'a pas manqué de faire jaser. Pour les uns, ce n'est pas un hasard car ce nouveau gouvernement est tenu majoritairement par ses alliés. Pour les autres, la constitution de ce cabinet n'est qu'une nouvelle démonstration de la persistance de l'influence syrienne au Liban. M. B.