L'Agence internationale de l'energie (AIE) a alerté l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) quant aux «tensions persistantes» sur les marchés pétroliers. Elle met la pression sur l'organisation viennoise, en évoquant la possibilité de recourir aux stocks stratégiques si la situation perdurait. «Nous sommes prêts à réagir à tout moment si nécessaire», a déclaré son président, le Japonais Nobuo Tanaka, cité par des agences de presse. M. Nobuo estime qu'une interruption longue et complexe à gérer de la production libyenne est désormais «inévitable». L'Agence internationale de l'énergie parle également d'une demande en hausse de pétrole. Elle précise que sur les cinq prochaines années, elle devrait progresser «plus rapidement que prévu» dans les pays émergents. Pendant ce temps, l'Opep scrute les marchés, après la décision qu'elle a prise à Vienne, le 8 juin dernier, en maintenant inchangés ses quotas de production, une mesure «réfléchie», estiment certains, «pas tout à fait», nuancent d'autres. Au-delà de l'atmosphère dans laquelle s'est déroulée cette conférence – une des pires réunions selon les Saoudiens – le maintien des quotas a fait augmenter les cours du pétrole qui ont atteint 19,90 dollars, le 9 juin dernier. A moins d'un bouleversement spectaculaire, les choses devraient se tasser dans les semaines à venir, ainsi que le relèvent nombre d'observateurs. Il est évident que cette tendance à la hausse n'agrée pas les pays consommateurs qui souhaitaient voir l'Opep augmenter ses quotas. Bien avant la réunion de Vienne, ils pressaient l'organisation de tenir une conférence extraordinaire et de prendre une décision face à «l'envolée» des cours. Sous présidence iranienne, l'organisation viennoise ne s'est pas réunie en conférence extraordinaire, comme ils le lui demandaient, jugeant inapproprié de le faire dans un contexte où les marchés pétroliers sont suffisamment approvisionnés et les prix raisonnables. La plupart des membres de l'Opep estiment qu'un baril autour de cent dollars reste «logique». En tout cas, l'organisation défend le haut de la fourchette, et rappelle que si les cours de brut augmentent, ce n'est pas en raison de déséquilibre entre l'offre et la demande. Une appréciation qui rejoignait relativement celle de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), celle-ci estimait, il y a quelques jours, que l'écart entre l'offre et la demande ne se creuse pas. Mais cela ne l'a pas empêché de demander à l'Opep de réaménager l'offre. L'Opep demeure inflexible, soutenant que les réserves sont élevées. Et le prix est fixé par le marché. Si on prend en considération le facteur de l'offre et on y ajoute la fluctuation de la valeur du dollar, on peut estimer que le prix actuel n'est pas «illogique», notent les Iraniens. L'Iran est le deuxième producteur de l'Opep. Il préside aux destinées de l'organisation pétrolière depuis janvier dernier. L'Iran, de même que le Venezuela sont catalogués de l'aile dure de l'Opep. Les deux pays se sont toujours opposés à un réajustement des quotas de l'organisation. L'Iran n'apprécie pas d'ailleurs l'attitude des Saoudiens et des Koweïtiens, entre autres membres de l'organisation, qui essayent, chaque fois qu'il y a pression sur les marchés, de solliciter l'Opep dans le but de relever la production, comme ce fut le cas en mars dernier, alors que les installations pétrolières libyennes tournaient au ralenti. L'Opep allait effectivement discuter d'une possible augmentation de sa production pour apaiser la flambée des cours du brut, mais n'avait pas pris de décision sur un dépassement des quotas. Des consultations sur une possible hausse de la production avaient été engagées sans, toutefois, aboutir. La question essentielle aujourd'hui est celle de la cohésion interne et du leadership, estiment des spécialistes au fait de l'évolution de l'Opep. Il y a quelques années, elle vivait une période difficile, l'Irak voulant la réintégrer. Une situation qui ressemble beaucoup à celle que vit l'Opep d'aujourd'hui, avec la Libye. Le Conseil national de transition (CNT) représentant les insurgés libyens a demandé qu'il soit représenté au sein de l'organisation pétrolière, une demande qui semble diviser l'Opep. Y. S.