Photo : S. Zoheir Par Younès Djama Si, auparavant, les bidonvilles évacués sont vite réoccupés par de nouveaux venus, ces dernières années, le gouvernement a pris la ferme intention de raser l'ensemble des sites une fois leurs occupants relogés. Grâce à ce processus, un nombre non négligeable de terrains ont ainsi été récupérés. Cela représente une panacée pour les pouvoirs publics qui devraient les réutiliser à bon escient comme, par exemple, y construire de nouveaux logements. D'autant que la nécessité s'en fait sentir avec acuité. De 40 000, en 2005 et 2006, ils sont passés à plus de 45 000 constructions illicites. En 2007, près de 600 000 bidonvilles étaient recensés à l'échelle nationale abritant 3 millions de ménages, soit près du dixième de la population algérienne, en 2008 et 2009, érigés sur des terrains vagues, à proximité des terres agricoles ou des canaux des eaux usées, aux environs des cités et autres quartiers résidentiels menaçant le Grand-Alger, la sécurité publique et le cadre de vie de tout un pays. Durant l'année 2009, pas moins de 450 bidonvilles ont été rasés. A titre d'exemple, au niveau de la capitale, 45 000 constructions illicites sont recensées. Les services de la wilaya d'Alger ont pu en éliminer 10 000 en relogeant les occupants. Il faut signaler que la politique de la wilaya en la matière a été de s'occuper prioritairement des bidonvilles situés à l'intérieur d'Alger. Avec la démolition des baraquements de Zâatcha (commune de Sidi M'hamed) et de Doudou Mokhtar (Hydra), il n'y a pratiquement plus de bidonvilles dans le centre de la capitale. Que deviennent les sites des anciens bidonvilles de Douar Cheklaoua (Oran), de Khraïssa, Gué de Constantine et de Zâatcha à Sidi M'hamed à Alger, ceux informels d'El Haïcha à Hassi Messaoud dans le Grand Sud ? Vu le manque criant d'infrastructures d'utilité publique, a-t-on pensé à bâtir des aires de jeux, des espaces verts, des écoles ou des polycliniques, des salles de sport, etc. ? La même interrogation est aussi valable pour les sites ayant abrité des chalets. Ceux-là mêmes que l'Etat a mis «temporairement» à la disposition des sinistrés, victimes de calamités naturelles (séismes, inondations). Installés pour une période bien déterminée, soit le temps que des logements soient construits au profit des sinistrés, un nombre non négligeable de sites ont ainsi été évacués. Quid des terrains ? Force est de constater, par ailleurs, qu'aussi bien les bidonvilles que les chalets sont le plus souvent utilisés à des fins purement mercantilistes. A Boumerdès, à défaut d'avoir décampé, les occupants des chalets s'accrochent à «leurs» biens, privant par là même l'Etat de dizaines d'hectares. L'abnégation avec laquelle les pouvoirs publics se sont attelés pour éradiquer les bidonvilles et récupérer les terrains où ils sont implantés ne semble pas avoir les mêmes résultats pour ce qui est des chalets. Souvent utilisés comme faire-valoir pour bénéficier d'un logement, les chalets octroyés aux sinistrés du séisme de 2003 se trouvent au centre d'un grand trafic. Les occupants convertis en marchands sans scrupules font perdre à l'Etat des centaines d'hectares qui auraient pu servir comme assiettes pour l'implantation de logements. La réapparition des bidonvilles, qui ceinturent aujourd'hui les grandes métropoles d'Algérie, a été constatée quelques années après avec l'avènement du terrorisme intégriste qui a contraint les populations des localités isolées à l'exode vers les grandes villes. Dans la wilaya d'Annaba, à l'est du pays, à El-Bouni, à Aïn Berda, en passant par les communes de Sidi Amar, Hadjar Eddis, Oued El-Nil, ainsi que dans une partie de la région d'Oued El Aneb, les baraques de différents types de constructions poussent comme des champignons. Si l'on se réfère à des déclarations des habitants de ces régions, chaque nuit, notamment durant l'été, une dizaine de masures voient le jour, un peu partout sur le territoire de la wilaya. Aussi, de véritables réseaux spécialisés dans la réalisation des baraques existent à Annaba. L'unité est écoulée pour une somme variant de 15 à 30 millions de centimes, selon nos sources. Le prix des baraques diffère d'une région à une autre. Les plus chères sont celles de la plaine ouest et, à un degré moindre, celles de Sidi Salem. «A Sidi Herb, par exemple, la baraque est cédée entre 25 et 30 millions de centimes», explique un «kacher» (courtier) versé dans ce créneau. Décidément, aujourd'hui rien n'arrête la poussée des bidonvilles. A Annaba, ce phénomène, qui a énormément porté préjudice à l'image de marque de la Coquette, a atteint en quelques endroits, surtout dans la périphérie de la ville, des proportions alarmantes. L'on dénombre, par exemple, du côté de la forêt située sur les hauteurs des 378 logements de Hadjar Eddis, dans la commune de Sidi Amar, plus de trois cents baraques dont la plupart sont construites en dur.