Alger compte un nombre important de «Diar El Fahs», «résidences de repos» ou «résidences d'été» datant de l'ère ottomane et dont la plupart se trouvent actuellement dans un état de délabrement avancé. Outre la Casbah qui tombe en ruine à vue d'oeil, «Diar El Fahs» connaissent elles aussi un état de vétusté et de détérioration avancé entamant ainsi leur patrimoine architectural antique dont la beauté a fini par céder à l'abandon et à l'altération. Aussi, Alger voit, au fil du temps, son patrimoine architectural se dégrader progressivement, bien que constituant une partie de sa mémoire. «Diar El Fahs» sont des biens (jardins, maisons, palais, etc.) qui se situent en dehors de la ville d'Alger, c'est-à-dire en dehors de la Casbah (région urbaine), comme l'a expliqué Omar Hachi, expert en patrimoine et auteur de plusieurs études à ce sujet. Près de 1 500 maisons Fahs ont été détruites durant l'ère ottomane par un chef turc afin d'empêcher les Espagnols d'y habiter, selon des récits. Après les deux violents tremblements de terre ayant secoué la capitale en 1365 et 1716, il a été décidé au début du XVIIIe siècle la reconstruction de la ville. Le nombre des biens Fahs atteint alors les 20 000 unités. Durant la colonisation française, ce nombre est réduit à 2 000 seulement dont la majorité sont devenues des bâtiments militaires. Après l'Indépendance, et n'ayant pas fait l'objet de l'intérêt requis, ces bâtiments ont été exposés à des agressions, notamment par des privés, comme ce fut le cas pour «Dar Bensiam» à Birkhadem, «Djenan Zeïtoun» à Bouzaréah, «Dar Arika» à Ruisseau, «Dar Omar Mouhoub», «Dar El Khaznadji» (Laperlier-Sfindja, devenu jardin public du même nom sous l'occcupation française avant d'être occupée par un particulier à l'Indépendance), «Djenane Boursas» en face de la cité Malki, «Bordj Polignac» à Bouzaréah, «Sidi Naâman», «Rahat Dey» à Z'ghara, «Haouche Gaïd El Bab» à El Harrach, «Houche Far Nibiri», «Dar Haouche Népal» à Birkhadem, «Dar Raïs Hamidou» à El Biar et «Oued Mustapha Raïs» à la rue des Martyrs en face l'hôtel El Djazaïr. Actuellement, le nombre des résidences Fahs à Alger est de 119 seulement dont un nombre réduit sont des biens de l'Etat, alors que les privés sont propriétaires de la grande majorité, a indiqué le directeur général de l'Office national de gestion et de protection des biens protégés, M. Abdelouahab Zekkar. Le caractère architectural de ces maisons est identique à celui des maisons de la Casbah. Toutefois, «Diar El Fahs» disposent de fenêtres donnant sur l'extérieur, contrairement à celles des maisons de la Casbah qui donnent sur la cour (patio). Ces maisons se caractérisent également par leurs jardins, leurs fontaines et leurs espaces verts. Parmi toutes ces résidences, l'Etat a pris en charge la restauration de la villa Abdellatif qui abrite actuellement le siège de l'Agence algérienne du rayonnement culturel en attendant de retrouver ultérieurement son ancienne vocation de résidence des artistes. Selon un expert, il convient en premier lieu de faire «un inventaire de ce patrimoine architectural» à travers un recensement et une évaluation de son état pour pouvoir procéder ensuite à des études de restauration. Les services du patrimoine relevant de la Direction de la culture de la wilaya d'Alger avaient entamé, en 2006, des travaux de restauration urgents ayant touché «Djenane Lakhdar» (jardin), la résidence de «Rahet El-Dey» (repos du Dey), «Djenane Raïs Hamidou» à El-Biar (jardin), «villa Mahieddine» en soutenant ces résidences de colonnes en bois pour éviter l'effondrement des murs, a affirmé le président du Bureau des sites historiques et archéologiques, M. Farid Fettouche. S'agissant des causes ayant retardé le lancement des opérations de restauration des autres résidences Fahs, notamment celles ayant fait l'objet d'études de restauration, M. Farid Fettouche a indiqué que le problème résidait «dans l'absence de subventions allouées par la wilaya», ajoutant que «celles-ci ne correspondaient pas au programme de mise en œuvre arrêté par la direction». Le manque d'archives, notamment celles concernant les plans de construction et la décoration intérieure de ces résidences, entrave leur restauration et de ce fait, empêche de les rétablir dans leur conception authentique. M. Zekkar a souligné que l'absence d'une main-d'œuvre qualifiée et spécialisée était le principal problème auquel sont confrontées les opérations de restauration, d'où la nécessité de lancer des formations dans les différents domaines de restauration, à savoir la construction, la pierre et le marbre. Les lenteurs administratives constituent un autre obstacle pour les travaux de restauration qui nécessitent du temps et une main-d'œuvre spécialisée, outre l'absence de textes législatifs, indique-t-il. Heureusement, rappelle M. Zekkar, des lois ont été promulguées depuis 2003 formant ainsi une plateforme juridique en faveur des entreprises et bureaux d'études travaillant sur des sites historiques afin de faciliter leurs tâches. Outre les difficultés citées ci-dessus, les organismes chargés des travaux de restauration sont confrontés à l'indisponibilité des équipements sur le marché algérien, ce qui les pousse à recourir à une main-d'œuvre locale. Bien que plusieurs résidences aient résisté au temps et à la nature, l'être humain a été le facteur majeur de la dégradation et de la spoliation du patrimoine historique qui deviendra synonyme de désolation. APS