Il n'y a pas que dans leur pays que les musulmans en général et les Algériens en particulier sont, au cours du mois de Ramadhan, victimes d'arnaques en tous genres. A la suite du reportage d'une chaîne du PAF français, un scandale ébranlerait les communautés musulmanes résidant dans l'Hexagone. La viande qu'elles consomment depuis lundi dernier ne serait pas halal même si l'estampille qui le certifie… ne fait seulement que le certifier.Faudrait-il pour autant que les communautés évoquées en tombent à la renverse ? Sans doute pour leurs membres qui y croient et même ceux qui, pour les apparences, feignent de le croire jusqu'à en manger pour de vrai de la viande licite, alors qu'habituellement il leur importait si peu de s'intéresser dans quelles conditions la bête a été mise à mort. L'essentiel étant que dans l'assiette le filet soit des plus tendres, et il est donc peu évident que l'étourdissement ou l'égorgement aient à peser sur sa qualité.L'affaire est donc partie comme une traînée de poudre avec un reportage de Canal+, ses journalistes démontrant images à l'appui, cela coule de source, que «des dysfonctionnements graves, inquiétants et illicites» ont fait que des milliers de membres de la communauté musulmane établie en France auraient en fait dans leur frigo «bien rempli pour le Ramadhan des produits illicites abusivement estampillés halal».Il y a plusieurs mois déjà, un de nos confrères de la presse nationale posait la question suivante : «Comment réagiraient les millions de musulmans d'Europe quand ils réaliseront que ce qu'ils consomment en guise de viande halal est en réalité une pure tromperie ?» Sur cet aspect précis, la réponse a vite été donnée, mais il pourrait également ne s'agir que d'une gesticulation politicienne, par huit élus locaux d'origine musulmane qui ont énergiquement appelé à la mise en place d'une commission d'enquête. Il n'y a nul besoin de faire un dessin sur la question dès lors qu'une commission a été désignée, il n'y a plus qu'à attendre des conclusions qui ne viendront que dans quelques années pour proposer qu'«à partir de dorénavant et plus jamais, etc., etc.».Visiblement excité, notre confrère parle même de dynamite que tous les contrôles possibles n'ont pas été en mesure de dépister. Or, en Algérie même, des compatriotes n'ont cesse de se lécher babines et doigts, consommant au cours de soirées vespérales sur les différentes corniches du magique littoral des brochettes de viande asine, de casher et merguez additionnés de viande de chien et, dans le meilleur des cas, d'animaux morts dans des conditions douteuses. Tout cela au nom d'un halal virtuel dans une société totalement déglinguée.Une telle situation incite à s'interroger sur les frontières du halal et du haram. Un prédicateur établi en Hollande et dont il est fait état de la grande dimension religieuse et également politique estime : «Pour que la viande soit halal, le sacrificateur doit obligatoirement croire en Allah… qu'il soit musulman, juif ou chrétien importe peu. S'il est musulman il doit dire bismi Allah avant l'égorgement sauf s'il a… oublié (sic). Mais si le sacrificateur est juif ou chrétien, bismi Allah ne devient pas une obligation mais la viande est quand même… halal (re-sic).» Le prédicateur, qui semble s'orienter encore à la boussole ou selon la direction du vent, n'hésite pas de vaticiner que «l'orientation de l'animal en direction de la Kaâba n'est pas une obligation». Autrement dit le parfait exemple de la religion à géométrie variable.L'affaire soulevée par Canal+ et qui évidemment, comme la canicule de 2003, peut être motif à débat estival a le mérite quand même d'avoir éventé le pot aux roses. Qu'en aurait-il été ici ? La question ne se pose même pas, voire elle serait évacuée d'un consensuel revers de la main des responsables à tous les niveaux de décision pour la simple raison que cela ne peut arriver qu'aux autres et qu'en Algérie «(…) toutes les mesures ont été prises pour que nos concitoyens passent un mois de Ramadan paisible», avaient alors assuré dès le mois de janvier les porte-parole du ministère de l'Agriculture, du Commerce, de l'Intérieur.Moralité de l'histoire : les Algériens sont en train de juger sur pièces les énergiques et fermes engagements des grands commis de l'Etat. A. L.