Des chars continuent d'occuper des quartiers de la ville de Daïr Ezzor, après la semaine la plus sanglante en Syrie depuis le début de la révolte contre le président Bachar al Assad, il y a cinq mois. En effet, dimanche dernier, l'armée, chargée de mater les manifestations, a tué 54 civils à Daïr Ezzor, où les chars sont intervenus, selon des militants syriens des droits de l'Homme. Cette nouvelle journée sanglante, après l'offensive de la semaine passée sur la ville de Hama qui avait fait 300 morts, a isolé encore plus le président Bachar Al Assad qui a vu, pour la première fois, les alliés arabes de Damas condamner la répression. Ainsi donc, après l'Occident qui a imposé des sanctions au régime Syrien, la Russie qui désormais l'appelle à cesser les violences, le Conseil de sécurité de l'ONU et les monarchies du Golfe qui le pressent d'arrêter la répression, la Ligue arabe l'a pour la première fois exhorté à mettre «immédiatement» fin aux violences. Le roi saoudien a, lui, été plus loin. Outre le rappel de l'ambassadeur saoudien pour «consultations», il a estimé, dans un communiqué, que la répression des protestataires syriens «contrevient à la religion, aux valeurs humaines et à la morale». Le roi Abdallah qui n'avait jamais, depuis le début du «printemps arabe», critiqué un autre pays pour sa politique répressive, a estimé que «la Syrie devrait réfléchir sagement avant qu'il ne soit trop tard et mettre en oeuvre des réformes qui ne soient pas de simples promesses mais de véritables réformes». Il a ajouté que la Syrie peut «opter volontairement pour la sagesse ou plonger encore davantage dans le chaos et la violence». Le Secrétaire général de l'Onu, Ban Ki-Moon, a directement fait part à Bachar Al Assad de sa «très grande préoccupation» lors d'une conversation téléphonique. Enfin, le ministre turc des Affaires étrangères se rendra aujourd'hui à Damas porteur d'un message «déterminé», selon le Premier ministre Erdogan, un ancien allié du président syrien. La secrétaire d'Etat, Hillary Clinton, a d'ailleurs demandé à M. Davutoglu de dire au régime syrien de «renvoyer les soldats dans leurs casernes». La Syrie réserve au ministre turc un accueil glacial. «Si Davutoglu vient délivrer un message déterminé à la Syrie, alors il entendra des propos encore plus déterminés concernant la position de la Turquie», a prévenu un conseiller de Bachar al Assad. Adoptant la même version depuis le début des manifestations contre son régime, le président Assad continue de justifier sa campagne militaire par les agissements de groupes extrémistes armés. Le gouvernement affirme qu'aucune attaque n'a eu lieu à Daïr Ezzor. «Pas un seul char n'est entré dans Daïr Ezzor» selon l'agence officielle SANA. Les informations signalant la présence de chars dans la ville sont, dit-elle, «le fait de chaînes satellite provocatrices». Les autorités syriennes affirment que des groupes armés ont tué 500 membres des forces de sécurité depuis le début de la révolte. La télévision officielle a montré dimanche des corps mutilés flottant sur le fleuve Orontes à Hama, disant qu'il s'agissait de 17 policiers tués dans une embuscade. «Agir face aux hors-la-loi qui coupent les routes, ferment les villes et terrorisent la population est une obligation pour l'Etat qui doit défendre la sécurité et protéger la vie des citoyens», a ainsi déclaré M. Assad. De leur côté, les groupes de défense des droits de l'Homme ont confirmé plusieurs attaques contre les forces de sécurité mais disent que les hommes de Bachar Al Assad ont tué au moins 1 600 civils ces cinq derniers mois. La Syrie a expulsé la plupart des journalistes étrangers, ce qui rend très difficile la confirmation des événements.Dans tous les cas, qu'elle soit de la répression ou due à des groupes de hors-la-loi, le régime syrien devra impérativement trouver une solution pour faire face à la violence qui le mine s'il veut éviter de s'enliser dans le chaos et la violence. H. Y./agences