Photo : Riad Par Wafia Sifouane Leur son captive, charme et transporte. Venus du sud-ouest algérien, de la wilaya de Béchar, les enfants de Knadsa qui forment la troupe El Ferda ont carrément subjugué le public venu nombreux vendredi dernier veiller au sein de la kheïma de solidarité organisée par le quotidien La tribune.Vêtus de leurs tenues traditionnelles sahraouies d'un blanc immaculé, Larbi et ses compagnons ont dévoilé tout leur savoir-faire en matière de musique. Jouant la carte de l'originalité pour un public initialement non habitué à ce genre de prestation authentique, El Ferda, qui excelle dans le genre du Melhoun et gnaoui, a réussi le temps d'un concert d'une heure à se faire plusieurs adeptes et fans. Gumbri, violons, pilon, soussane, bangos et autres percussions, les membres d'El Ferda rejoignent majestueusement la scène et prennent place sur les chaises qui leurs sont réservées, une véritable qaâda s'impose. Le public garde les yeux rivés sur la scène et guette le moindre son, on peut dire que ce dernier a un avant-goût en assistant à la balance du groupe, ce qui n'a fait qu'attiser sa curiosité, quelques instants plus tard la troupe entame sa prestation avec le morceau «ya krim el kourama». Ancien texte de diwan, le titre est sublimé par la voix résonnante du vocaliste. Quant au public, c'est un silence religieux qu'il s'impose jusqu'à ce que la troupe l'invite à suivre son rythme en claquant des mains. Les musiciens enchaînent vite avec le titre «la illah ila Allah touba» sur lequel la troupe s'amuse à accélérer le rythme crescendo tandis que le vocaliste s'occupe à orchestrer le public. L'ambiance atteint son summum, des youyous retentissent et des jeunes, timides face aux caméras de la télévision présentes sur les lieux, dansent dans les coins isolés de la Kheïma. Après avoir mits le feu, les membres d'El Ferda interpréteront le morceau «Ahl Zemani» oû le pilon devient le chef d'orchestre. L'assistance composée d'habitants du quartier de Ruisseau est charmée par cette prestation à laquelle il est loin d'être habitué. Conscient de cela, les musiciens en rajoutent une couche et enchainent avec «Nefssi fi Nefssi», qui s'inscrit dans le genre melhoun. Comme on réserve toujours le meilleur pour la fin, El Ferda clôturera sa prestation en apothéose en reprenant l'incontournable titre «Ben Bouziane». Après le doux istikhbar de Larbi, le rythme s'accélère, les percussions s'enchaînent, deux tambours rejoignent la scène et c'est parti pour du pur gnaoui bien de Béchar, le temple de tagnawite. Rien à dire, c'est complètement impressionnant et, contrairement à ses habitudes, le public algérois n'a pas osé perturber cette prestation. il savoure doucement telle une personne en transe. A la fin, des youyous retentissent et l'assistance gratifie les artistes d'une avalanche d'applaudissements. Se produisant bénévolement après une nuit blanche passée sur la route, El Ferda a donné un exemple de générosité sans faux semblant. D'ailleurs la troupe n'a pas hésité à donner le meilleur d'elle- même et de s'éclater sur la scène en plein air qui leur était réservée. «Je trouve que c'est une excellente initiative de dresser une telle scène au milieu d'un quartier populaire ! Nous nous sommes produits à Alger à différentes reprises durant ce mois mais croyez moi de celle là j'en garderais un bon souvenir», affirme Larbi à la fin du concert. Après l'authenticité du diwan, la scène s'ouvre sur un autre genre non moins noble, il s'agit du malouf avec en prime l'un des dignes héritiers du maître Mohamed Tahar Fergani, l'artiste Kamel Bouda surnommé «le rossignol du vieux rocher». Vêtu d'un costume blanc, un violon à la main, l'artiste était fier de présenter sa nouvelle recrue, un petit jeune homme qui maîtrise la derbouka. Célèbre pour avoir introduit le dhikr et les chants Aïssaoua dans le medh constantinois, Kamel Bouda régalera l'assistance par une belle virée au cœur du patrimoine malouf et interprétera les plus beaux titres, à l'instar de «dawi ya adra hali». Le charme opère, le public se délecte ravi de jouir d'un tel spectacle offert gracieusement par la kheïma de solidarité de La Tribune. Transportant ses fidèles de l'ouest à l'est, la soirée de jeudi dernier a été une véritable réussite et cela en drainant un grand nombre de visiteurs pour deux concerts de qualité. Du diwan au malouf constantinois, les artistes invités ce soir- là ont gravé en lettres d'or la richesse et la diversité de la musique algérienne, le tout dans un esprit de partage et de solidarité bien propre au peuple algérien.