Le Congrès et l'administration Bush, après une semaine d'âpres négociations, viennent de conclure un accord sur les dispositions d'un plan de résorption de la crise financière qui étouffe depuis plus d'un semestre l'économie américaine. Un programme de sauvetage bancaire sans précédent de l'ordre de 700 milliards de dollars sera progressivement dégagé par le contribuable à cet effet. La nouvelle, tant attendue, a vite fait le tour du monde. Mais les marchés, à défaut d'être sérieusement rassurés, restent toujours crispés. Les principales places boursières évoluaient, hier matin, en baisse. Certains experts, qui situent les pertes de crédits à plus de 2 000 milliards de dollars, prédisent l'accélération de la baisse des prix de l'immobilier, un recul dramatique de la consommation des ménages, la poursuite de la vague des nationalisations avec, en plus, une contagion aux quatre coins du monde. En effet, le plan Paulson est jugé en dessous des exigences de la situation réelle. La confiance demeure, donc, absente malgré les garanties de la Réserve fédérale américaine. Bien au contraire, la crise s'aggrave et l'onde de choc s'étend à l'Europe. Après l'effondrement spectaculaire de grandes institutions bancaires et des géants des assurances aux Etats-Unis (Washington Mutual, Lehman Brothers, AIG…), la panique se saisit présentement des pays l'UE. Là encore, c'est évidemment le contribuable qui trinque. La Belgique, la Hollande et le Luxembourg annoncent la «nationalisation» partielle du groupe Fortis. Au Royaume-Uni, le Trésor public s'apprête, en catastrophe, à «acquérir» la banque Bradford and Bingley, quatrième institution monétaire britannique à succomber à cet effet domino après Northern Rock, Alliance & Leicester et HBOS. Le Danemark, l'Allemagne et la France sont aussi autant de pays qui comptent des établissements financiers en difficulté même si la Banque centrale européenne (BCE) ne cesse d'injecter des liquidités sur le marché. Le choc se répercute à travers le monde entier. Le dynamisme économique asiate risque vraiment d'en pâtir dans les mois qui viennent. Les Chinois parlent déjà d'un «tsunami» et plaident ouvertement pour un nouveau système financier international. En Occident même, des voix s'élèvent pour réclamer une refonte de la finance mondiale et une moralisation du capitalisme marchand. Néolibéral convaincu, le président français Nicolas Sarkozy se repent et appelle à la remise à plat du système financier et monétaire actuel afin, dit-il, de «créer une régulation mondiale que la globalisation des échanges rend, désormais, nécessaire». De l'autre côté, des voix, de plus en plus nombreuses, estiment tout simplement que le capitalisme libéral a pleinement montré ses limites. Il doit assumer son échec et «dégager» pour laisser la place à autre chose. De nombreux économistes soulignent que le régime capitaliste a toujours été immoral. La crise est un élément constitutif et une base à son fonctionnement. Il se serait fondé depuis toujours sur la privatisation des bénéfices pour la classe dirigeante et la mutualisation des pertes pour les travailleurs et les petits clients. Le monde moderne ne peut s'accommoder encore de ces arnaques grossières. Il met au devant, chaque jour, l'exigence d'une économie saine où la spéculation n'aura plus de grandes marges de manœuvre. Un système économique où la priorité sera accordée à ceux qui travaillent, produisent et créent des valeurs. Un monde où l'humain sera mis au-dessus du profit K. A.