Face au déni, historique et politique, d'un certain octobre noir, l'art demeure le meilleur moyen pour détourner les obstacles et assener des vérités. C'est le cas du 9ème art, qui, le temps d'un festival qui lui est consacré à Alger, revient sur un événement majeur gravé à jamais dans la mémoire des Algériens. Au cœur de l'événement, et coïncidant avec la célébration du 50 anniversaire de la manifestation du 17 octobre 1961 à Paris - une tache noire dans les relations algéro-françaises -, qui s'est achevée par le massacre de très nombreux manifestants algériens, dont des centaines (les chiffres divergent jusqu'a nos jours) ont même été balancés dans la Seine, la 4ème édition du Festival international de la bande dessinée d'Alger revient sur cette date sombre à travers une série d'expositions. Revenant sur cet événement historique afin de graver cette date à jamais dans la mémoire collective, le Festival international de la bande dessinée d'Alger (Fibda) consacre une grande exposition intitulée «Octobre 1961, les auteurs de BD témoignent». L'exposition, abritée sur une surface de plus de 500 m⊃2;, regroupe les planches d'une vingtaine de bédéistes algériens, français et un espagnol. De planche en planche, d'un style à l'autre, les bulles se rencontrent autour d'un seul thème ou plutôt d'un seul drame. Une exposition poignante qui intervient à pic pour raconter avec cynisme et réalisme un massacre longuement occulté. Dans ce sillage, trois ouvrages traitant de cet événement seront dévoilés au grand public, dont un édité par l'association Au nom de la mémoire. Il s'agit du livre “17 octobre 1961, 17 écrivains se souviennent”. Parmi ses auteurs, on citera Maïssa Bey, Gérard Alle, Magyd Cherfi, Leila Sebbar, Akli Tadjer et Michel Piquemat. Le second ouvrage n'est autre que l'album Octobre noir des illustrateurs Didier Daeninckx et Mako. Préfacé par l'historien Benjamin Stora, l'album est paru chez les éditions Ad Libris. En exclusivité, 200 exemplaires en seront mis en vente durant le Fibda. Le troisième s'intitule 17 octobre 1961, 17 bulle ; il est signé d'Abbas Benyoucef Kébir et publié par les éditions Dalimen. Archéologue, musicien, illustrateur et bédéiste natif de Miliana, l'auteur de cet album inédit revient sur ce qu'il appelle «la tragédie sur Seine», à travers l'histoire de l'ouvrier Mouloud établi en France. Un seul personnage pour dire le drame de centaines de martyrs. Loin de faire les choses à moitié, les organisateurs du 4ème Fibda ont même procédé à la mise en place d'une petite scénographie (reconstitution du pont de la Seine) et ce à l'intérieur même de la salle de l'exposition. Pour Mme Dalila Nedjam, commissaire du Fibda, le festival ne pouvait se tenir en octobre sans célébrer cette date phare. Elle n'omettra pas de souligner l'intérêt croissant que porte la jeunesse algérienne à l'histoire afin de mieux comprendre le présent et appréhender le futur. W. S.