L'Egypte a connu, dimanche dernier, les violences les plus meurtrières depuis la grande révolte qui a fait chuter le président Moubarak, en février dernier. Devant la gravité de la situation, un couvre-feu a été décrété dans le centre de la capitale pour tenter de rétablir le calme et la sécurité. Autour du Parlement, du siège du Conseil des ministres et du musée archéologique du Caire la tension était à son comble. Tout a commencé lorsqu'une marche de milliers de Coptes, du quartier de Chobra vers Maspero, a dégénéré. Le bilan est lourd. Vingt-quatre personnes tuées et plus de 200 autres blessées. Les coptes (10% de la population) accusent des islamistes fanatiques d'avoir partiellement démoli et incendié une église dans la province d'Assouan la semaine dernière. Les Coptes s'estiment discriminés dans une société en grande majorité musulmane. Cette communauté a été visée par plusieurs attentats, en particulier celui du Nouvel an contre une église à Alexandrie qui a fait 23 morts. Ahmed al-Tayyeb, grand imam d'al-Azhar, la plus haute institution de l'islam sunnite, est intervenu pour appeler à des discussions entre les membres de la Famille égyptienne, une organisation réunissant des religieux musulmans et chrétiens, «afin de tenter de contenir la crise». Suite à la gravité de la situation, le gouvernement égyptien a appelé à une réunion d'urgence. Le Premier ministre, Essam Charaf, a affirmé que l'Egypte était «en danger» après les violences meurtrières qu'a connues le Caire. Bien que la police militaire ait assuré que le calme était revenu dans la capitale, la tension reste à son comble. «Ces évènements nous ont ramenés en arrière (...) au lieu d'aller de l'avant pour construire un Etat moderne sur des bases démocratiques saines. La chose la plus dangereuse qui puisse menacer la sécurité de la nation, c'est de jouer avec la question de l'unité nationale et de provoquer la sédition entre chrétiens et musulmans (...) et aussi entre le peuple et l'armée», a déclaré le premier ministre. Les Coptes ont manifesté pour demander le renvoi du gouverneur, à qui ils reprochent de n'avoir pas su, ou voulu, protéger leur lieu de culte. Le cortège a bloqué une rue devant le siège de la télévision officielle égyptienne et a mis le feu à plusieurs véhicules militaires. En marge de la manifestation, des échanges de tirs ont eu lieu, provoquant des mouvements de paniques dans la foule. Les manifestants Coptes affirment avoir été sciemment attaqués par la police militaire accusant les forces de l'ordre d'avoir tiré à balles réelles sur la foule. L'Egypte connaît depuis plusieurs mois une montée des tensions confessionnelles, nourries notamment par des querelles de voisinage et des différends sur la construction de lieux de culte. M. B.