Photo : APS Par Hasna Yacoub Dans une conférence de presse, animée hier au CIP à l'issue de la réunion du conseil de gouvernement, Ahmed Ouyahia a présenté les mesures prises en ce qui concerne l'aide aux sinistrés et la reconstruction de la wilaya de Ghardaïa. Le bilan provisoire des victimes a augmenté avec 34 décès et 89 blessés, dont trois encore hospitalisés et une personne toujours portée disparue. Jusqu'à hier, selon les chiffres du Premier ministre, 756 familles sinistrées ont été mises à l'abri dans des salles des organismes de l'Etat. Le recensement des sans-abri est toujours en cours et l'expertise des habitations fait état, provisoirement, de 600 logements complètement détruits. Sur les 9 600 logements expertisés jusqu'à maintenant, 1 250 sont classés dans la catégorie orange du CTC et 8 000 autres sont dans la catégorie verte. Concernant les établissements scolaires, 19 ont été touchés lors des inondations, dont quatre CEM et un lycée. Une dizaine d'entre eux pourra être de nouveau exploitée dès le début de la semaine prochaine, selon le chef du gouvernement qui a assuré que les cours vont reprendre à Ghardaïa samedi prochain. Une aide sera apportée aux élèves sinistrés afin de leur permettre de poursuivre leur scolarité et une opération de transfert des élèves vers des établissements voisins sera mise en route avec la prise en charge du transport et de la restauration. Des classes mobiles seront réalisées dans les 45 jours pour remplacer tout établissement détruit, a assuré le conférencier. Le retour à une vie normale sur les lieux du sinistre se fait graduellement, notamment avec une alimentation à 100% pour l'eau potable et de plus de 90% pour le gaz et l'électricité. Quant aux moyens de communication, les réseaux ont été rétablis à un taux de 80%, selon le chef de l'Exécutif qui a annoncé la mise en service d'un numéro vert. Ahmed Ouyahia a assuré, sur un autre volet, celui de la santé, que la prévention sanitaire est assurée et que les actions nécessaires pour la prise en charge des malades et la prévention des épidémies se poursuivront. Faisant état du refus des habitants de la région de Ghardaïa d'occuper les tentes provisoirement, le chef du gouvernement, qui a maintenu son engagement à reloger tous les sinistrés avant la fin de l'année 2008, a annoncé qu'une aide de loyer durant la période de transition sera octroyée aux familles qui se relogent elles-mêmes. Il a assuré, à ce sujet toujours, que 700 logements sont déjà prêts pour l'accueil des sinistrés et que 200 chalets seront fabriqués avant la fin de l'année. Au titre de la reconstruction, Ahmed Ouyahia a déclaré qu'une aide du Fonds national des calamités naturelles et risques technologiques majeurs sera octroyée aux propriétaires des habitations endommagées (assurés et non assurés) après l'étude de leur dossier et que des entreprises de travaux seront mobilisées par l'Etat pour contribuer à la réparation des habitations atteintes à un degré avancé. Ces aides seront octroyées, a assuré le chef du gouvernement, malgré l'existence d'une loi obligeant le propriétaire à souscrire une assurance. «Les propriétaires assurés seront remboursés à 100%. Le reste bénéficiera de l'aide de l'Etat. L'entraide est dans nos traditions, de plus les caisses de l'Etat ne sont pas vides. Mais je lance un appel aux citoyens pour assurer leurs biens.» La liste des communes sinistrées vient d'être élargie d'une commune, portant le nombre à neuf, a annoncé Ahmed Ouyahia. Il s'agit des communes de Ghardaïa, Grara, Berriane, Daya, Bendahoua, Bounoura, El Atteuf, Zelfana, Metlili et Sebseb. Des mesures légales d'aide fiscale sont arrêtées au bénéfice des opérateurs économiques, y compris les commerçants et artisans. Il s'agit d'un report des déclarations fiscales jusqu'à juin 2009, de la réduction de l'impôt par la révision de la base taxable de l'IFU, de l'IRG, de l'IBS et de la TAP. Il est aussi question d'une obtention du régime gracieux pour les pénalités et la suspension des actions coercitives de pénalités d'assiette et de recouvrement. Des mesures bancaires ont également été arrêtées au profit des sinistrés à l'exemple de l'octroi d'un crédit d'un montant de 2 millions de dinars avec un taux d'intérêt bonifié à 2% pour la réhabilitation et la reconstruction des biens industriels et commerciaux. Pour le secteur de l'agriculture, une enveloppe de 5 milliards de dinars est prévue pour la reprise de l'activité. Des mesures spéciales seront arrêtées et publiées sous peu, a affirmé le chef du gouvernement. Pour la réhabilitation des infrastructures et services publics, l'enveloppe décidée est de 20 milliards de dinars pour le moment. Mais ce budget ne sera dégagé, a tenu à avertir Ahmed Ouyahia, qu'après la présentation d'un dossier complet par chaque secteur. En réponse à quelques questions de la presse, M. Ouyahia est revenu sur les protestations des habitants d'El Ghaba lors de sa visite à Ghardaïa, pour dire : «Ils ont raison de protester, leur situation était dramatique. Mais il faut reconnaître que le drame a été évité grâce à la digue construite qui a pu retenir plus de 20 millions de mètres cubes d'eau.» Quant au dépôt de plainte contre X par les notables de la région, Ahmed Ouyahia a rappelé qu'à la suite de la mort d'une personne, une information judiciaire est ouverte automatiquement. «Oui, il y a des manquements, il y a une certaine anarchie», reconnaît sans gêne le chef du gouvernement en faisant référence à la gestion de l'après-catastrophe et à la construction urbanistique, mais «il y a aussi des avancées. Nous avons réussi une meilleure coordination du sinistre et nous avons un meilleur matériel. Nous ne pouvons pas dire que l'Algérie sera à l'abri des catastrophes à l'avenir car ce serait une aberration. Face aux catastrophes, il n'y a jamais de mesures immédiates et il y a des désastres qui atteignent un certain seuil face auquel aucun pays ne peut se prémunir. Simplement dit, il n'y a pas d'organisme qui peut nous mettre à l'abri mais les moyens pour faire face existent en Algérie. Quant à l'anarchie urbanistique, nous savons qu'il y a une crise de logements mais si l'Etat décide demain d'évacuer des zones dangereuses comme El Ghaba et parce que le drame sera oublié, certains vont provoquer l'émeute». Enfin et en réponse à une question sur les mesures prises par l'Etat, après l'établissement en 2003 par le CNES d'un rapport explicite sur les zones inondables en Algérie et les constructions aux bords des oueds, Ahmed Ouyahia a dit : «Nous avons eu des rapports d'autres organismes spécialisés qui font état de risques qu'encourt le pays, de Guelma à Oran. Que faire donc ? Le seul traitement à cette situation est le développement stratégique. Il faut aérer le pays. Nous avons 90% de la population qui occupe le littoral. On ne peut pas déplacer un peuple en un jour mais nous devons construire une économie ailleurs pour décider les gens à quitter le Nord».