A la tête du département de l'Energie et des mines, depuis quelques moins, Youcef Yousfi semble vouloir se démarquer de la politique de son prédécesseur, Chakib Khelil. M. Yousfi en a donné le ton, dès son arrivée aux commandes du ministère de l'Energie. Le nouveau ministre a changé la direction de Sonatrach, annoncé la modification de loi sur les hydrocarbures de 2005 et s'emploie à faire avancer Desertec, le projet le plus important inscrit dans les perspectives sur le renouvelable, en Algérie.Quelques semaines après sa désignation à la tête du ministère, Youcef Yousfi a promis qu'il allait mettre en place un programme sur les énergies renouvelables, beaucoup plus important que Desertc. Le programme sur les énergies renouvelables dont le ministre de l'Energie se fait le promoteur aujourd'hui a été approuvé par le gouvernement, début février dernier. Ce programme (plus de 60 milliards de dollars d'investissement) dont les Allemands ignoraient tout, M. Yousfi l'a sommairement présenté à Paul Van, le Directeur général de Desertec industrial initiative (DII), en visite à Alger, il y a quelques mois de cela. Celui-ci a marqué «son intérêt» pour cet ambitieux programme et a exprimé «sa disponibilité» à apporter sa contribution à sa réalisation. Convergences de vues des Allemands. Changement d'attitude des autorités allemandes ? La question mérite d'être posée, car le gouvernement fédéral allemand et les entreprises privés n'apprécient pas de la même façon les opportunités que devrait offrir Desertec, une initiative aux contours vagues, flous. Le gouvernement n'a pas réellement adhéré à ce projet. C'est tout le contraire, côté algérien, où les choses commençaient à se préciser au sujet de ce projet et le ministre de l'Energie et des Mines, l'a signifié à Paul Van, lors de cette visite. M. Yousfi a déclaré que l'Algérie est prête à entamer, dans le cadre de Desertec, une coopération fondée sur un partenariat «à long terme», intégrant «impérativement la fabrication des équipements industriels en Algérie, la réalisation de futures centrales solaires, la formation et la recherche développement avec les centres de recherches et laboratoires algériens». Le ministre a également ajouté que ce partenariat doit permettre à l'Algérie «d'accéder aux marchés extérieurs pour l'exportation de l'électricité».Le ministre emble avoir été entendu, et les exigences qu'il a ainsi formulées, à l'adresse des Allemands, ont été notées, discutées et transposées en partie dans le mémorandum signé le 9 décembre dernier entre Sonelgaz et Desertec. L'accord a été signé par le P-DG de Sonelgaz, Noureddine Boutarfa, et le directeur général de DII, Paul Van, en présence du Commissaire européen chargé de l'Energie, Gunter Oettinger, et du ministre de l'Energie et des mines, Youcef Yousfi. C'est un premier pas dans l'engagement de l'Algérie dans le projet Desertec. L'accord signé porte sur le «renforcement des échanges d'expertise technique, l'examen des voies et moyens pour l'accès aux marchés extérieurs et la promotion commune du développement des énergies renouvelables en Algérie et à l'international», qui sont au cœur de ce partenariat stratégique. Le DG de DII se félicite de l'engagement déterminé des autorités algériennes pour les énergies renouvelables. L'accord paraît répondre au souci, exprimé par l'Algérie de favoriser un transfert de technologie et de création d'une industrie en Algérie. Il prévoit en effet que les deux parties encourageront les coopérations industrielles en matière de R&D dans les domaines de la fabrication, de l'installation et de l'exploitation des énergies renouvelables. Côté algérien comme côté allemand, il y a de l'intérêt dans ce projet.L'Allemagne, après avoir décidé d'abandonner le nucléaire, et appelée à trouver des solutions alternatives et l'Algérie demeure une bonne adresse pour investir dans l'électricité verte.Quant à l'Algérie, elle affiche ses ambitions pour mettre en place une industrie dans le domaine du renouvelable. Elle s'est donnée comme objectif de produire 40% de son énergie électrique à partir des énergies renouvelables en 2030. Elle escompte produire 22 gigawatts d'électricité issue d'énergies renouvelables d'ici à 2030, dont 10 gigawatts seront destinés à l'exportation. Fondé à Munich en octobre 2009, le consortium international DII comprend aujourd'hui plus de 56 entreprises et institutions, dont la fondation Desertec et les instituts de recherche Fraunhofer et Max-Planck. DII escompte qu'à la fin de l'année 2012, les principales conditions politiques, juridiques, réglementaires, économiques et technologiques nécessaires à la mise en œuvre de la vision Desertec auront été créées. Le projet ambitionne d'assurer un approvisionnement énergétique durable grâce à l'exploitation du potentiel énergétique des déserts. Il s'agit de créer les conditions favorables à l'exploitation, à grande échelle, de l'énergie solaire et éolienne dans les déserts. Le grand projet Desertec, ce sont des installations importantes du point de vue technologique, dédiées au solaire. Desertec, c'est quatre cent milliards d'euros, des investissements colossaux que le capital public ne peut, à lui seul, supporter. Aussi, les Allemands évoquent-ils souvent la question du financement de ce projet et l'exportation de l'électricité qui sera produite.Le concept Desertec est né au sein d'un réseau mondial de scientifiques, de responsables et d'entrepreneurs, le TREC, qui l'a développé en collaboration avec la branche allemande du Club de Rome. TREC a participé à la réalisation de trois études qui ont permis d'évaluer le potentiel des énergies renouvelables dans les pays du Moyen-Orient et d'Afrique du Nord (MENA), les besoins attendus pour 2050 en eau et en énergie de ces pays, et la faisabilité d'une construction d'un réseau de transport électrique entre l'Union Européenne (UE) et le MENA. C'est le Centre allemand pour l'aéronautique et l'aérospatiale (DLR pour Deutsches Zentrum für Luft- und Raumfahrt) qui a mené les trois études techniques, financées par le ministère fédéral de l'Environnement en Allemagne (BMU). En 2009, la fondation Desertec est créée afin de faire avancer la mise en œuvre du concept Desertec à l'échelle mondiale. Le 13 juillet 2009, un protocole d'accord pour la réalisation du concept Deseretc dans la région EU-MENA est signé. Y. S.