«Des élections, nous en avons connu. Nous avions connu même des élections à la Naegelen». Cette phrase, prononcée par le président de la République à l'ouverture de l'année judiciaire, a le mérite de remettre sur le devant de la scène un sujet qui a de tout temps accompagné les élections dans notre pays, la fraude électorale en l'occurrence.En faisant référence à l'homme politique français Marcel-Edmond Naegelen, qui avait organisé en 1948, en Algérie, des élections truffées d'irrégularités et vu, depuis, son nom associé à des élections frauduleuses, Abdelaziz Bouteflika a donc remué la plaie. Une blessure qui entache à chaque fois les élections organisées dans le pays depuis maintenant plus de 20 ans. Simple rappel historique ou reconnaissance d'un fait, d'une réalité présente ?Quoi qu'il en soit, le spectre de la fraude électorale plane déjà sur les élections à venir. Cela n'est pas anodin, d'autant plus que le pays a connu, au moins depuis 1997, des fraudes à répétition.Lors des «premières élections législatives pluralistes» de 1997, l'administration avait fraudé, parfois de manière ostentatoire, au profit du Rassemblement national démocratique (RND), né deux mois seulement avant le scrutin. Le modus operandi employé était très simple : le bourrage des urnes au vu et au su de tout le monde. Une grande protestation avait été alors organisée par les partis de l'opposition. Mais rien n'a changé.Depuis cette date, la fraude est devenue plus pernicieuse. Ce sont carrément les procès-verbaux qui changent. Entre les bureaux de vote et les centres régionaux, il suffisait parfois de changer d'écriture pour que le résultat change de manière profonde.Ces données, ajoutées à un système de quotas de plus en plus assumé à la fois par des responsables du pouvoir et des partis de l'opposition, font craindre à la classe politique de nouvelles élections truquées pour 2012. Cela malgré les assurances de l'actuel parti majoritaire, le FLN, qui se dit lui-même «victime de la fraude», alors que pendant 40 ans, il faisait seul les élections.Pour les élections législatives, les choses n'ont pas vraiment changé, malgré les déclarations de bonne intention des responsables gouvernementaux. Puisque, à part la nomination de juges à la tête des commissions de surveillance - encore faut-il qu'ils soient indépendants ! - et la prise en compte de nouvelles mises en forme (urnes transparentes et encre indélébile), rien n'a vraiment changé par rapport aux précédents scrutins. L'administration, décriée de toute part, sera-t-elle vraiment indépendante ? Pas si sûr. A. B.