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Emplois précaires et absence de perspectives
Entre vocation industrielle et agricole… L'expectative
Publié dans La Tribune le 16 - 01 - 2012


Photo : Riad
La politique de privatisation a finalement connu des fortunes diverses à travers le territoire national. Des opérations qui ont abouti. D'autres qui seront remises en cause tout simplement. Ou d'autres encore qui, sans être remises en cause, n'ont pas connu l'aboutissement souhaité par le gouvernement, les repreneurs et les travailleurs. Dans la wilaya de Tizi Ouzou, il n'est pas aisé de répondre à la question de l'échec ou de la réussite de la politique de privatisation menée par le gouvernement.A Constantine, Sonacome, Sonitex, Ecotec, Sonatiba, Sempac, SNMC, Sowis, Sotraco, SNTR, SNTV, Comamo, Copreba employaient des milliers de travailleurs et grâce à l'Etat providence assuraient leur transport, leur restauration, des actions sociales de nature à leur assurer un cadre de travail, de vie, de santé formidable. C'est précisément à partir de 1996 qu'allait être entrepris ce démantèlement difficilement imaginable

De notre correspondant à Constantine
A.Lemili
La fin des années 90 allait, comme rarement, précipiter le démantèlement quasi féroce d'une industrie réputée incomparable dans la wilaya de Constantine. La ville des ponts s'enorgueillissait, il est vrai, d'un secteur du bâtiment qui fonctionnait à pleins gaz avec une kyrielle d'entreprises, voire de grandes entreprises ; il en était de même pour la mécanique et l'électromécanique, le textile, l'agro-alimentaire. Une industrie qui employait à tour de bras des milliers de travailleurs, et relayée accessoirement par des sociétés moins gargantuesques qui jouaient le rôle d'appoint en contribuant à la production de matériaux intermédiaires et en absorbant une partie de la main- d'œuvre moins qualifiée, sinon sans qualification.Sonacome, Sonitex, Ecotec, Sonatiba, Sempac, Snmc, Sowis, Sotraco, Sntr, Sntv, Comamo, Copreba, employaient des milliers de travailleurs, et, grâce à l'Etat providence assuraient leur transport, leur restauration, de formidables actions sociales de nature à leur permettre un cadre de travail, de vie, de santé formidables. C'est précisément à partir de 1996 qu'allait être entrepris ce démantèlement difficilement imaginable. Des textes réglementaires, et plus précisément des décrets présidentiels, mettaient en place le canevas le plus parfait pour vider de sa substance l'impressionnant secteur de production qui existait. Il faudrait, toutefois, rappeler que la conjoncture économique internationale, le climat politique interne ne permettaient plus de prendre en charge un chômage jusque là déguisé et transformé par l'alchimie socialiste en plein emploi.
Partant de cette donne, des cohortes de salariés étaient d'autorité versés à une caisse créée spécialement pour leur prise en charge, en attendant qu'ils retrouvent un emploi, ce qui d'ailleurs, relevait du vœu pieux pour les raisons précédemment évoquées, la retraite anticipée et/ou départ volontaire indemnisé. Mais nombreux seront ceux qui refuseront le deal, jugeant plus sûr de rester au sein de l'entreprise que d'aller vers un marché de l'emploi non seulement hypothétique mais quasi définitivement verrouillé. Une autre alternative est proposée par le gouvernement alors dirigé par Ouyahia offrant l'opportunité à des travailleurs de se constituer en société de salariés. Une solution assortie de nombreux avantages dont la cession à titre provisoire des locaux et équipements, une fiscalité spécifique, le maintien du carnet d'adresses et des relations commerciales existantes qui leur permettaient d'assurer leur trésorerie immédiate, en attendant de nouvelles perspectives et surtout la capacité des repreneurs d'assurer l'obligation de performance. Dans cet ordre d'idées, des travailleurs appartenant à la SAA, ERIAD, SNMC, ENATB allaient réaliser leur mue en se constituant sous cette forme commerciale. Elles ont connu des fortunes diverses, les unes gardant pignon sur rue (SAA et ERIAD) les autres n'ayant finalement profité qu'à un ou deux associés qui, à mesure que passaient les années et que le plan de charge était moins évident, ont eu la lumineuse idée de racheter la part de leurs collègues.Entre-temps, une entreprises importante comme la Sempac était restructurée, ses activités diversifiées alors que la Sonacome, délestée de presque les trois quarts de ses effectifs, tentait avec de tierces sociétés étrangères partenariat sur partenariat sans succès, revenant à la case départ et bénéficiant, dans la foulée, de régulières mises à niveau assorties : annulation des dettes contractées avec les banques, dettes sociales et fiscales payées selon un souple échéancier, avantages commerciaux préférentiels, avec le secteur public notamment, et parfois jusqu'à la garantie de salaires durant une certaine période.
Il y a lieu de souligner, par ailleurs, qu'une entreprise comme l'EPCA Khroub promise à une cessation d'activité, en raison de la décision de son conseil d'administration de confier le ramassage des ordures ménagères à des prestataires privés, a très vite démenti l'idée que la privatisation ou l'affectation d'activités à des prestataires privés alliait automatiquement le rapport qualité/prix. Lesdits prestataires n'ont pas été à la hauteur, d'une part en raison de moyens limités et d'autre part parce que leur main- d'œuvre était bien loin d'avoir l'expérience et le professionnalisme des agents de la commune. De grève en grève, avec la mobilisation d'une partie des élus, l'implication effective de l'union locale UGTA mais aussi un rapport de la sûreté de daïra favorable aux travailleurs de l'EPCA, le conseil d'administration faisait marche arrière et l'entreprise dont il évoquait le gros endettement pour justifier son démantèlement, a, aujourd'hui, épongé toutes les dettes, encaissé ses créances et permis de garder l'ensemble des postes d'emploi.Une particularité dans la wilaya de Constantine : aucun essai de privatisation d'une entreprise publique ; mais ladite non privatisation du secteur public, ou de ce qui en restait, avait pour pendant le quasi démantèlement des secteurs de production précédemment évoqués. Ce qui, si le bilan était fait, serait alors pire qu'une privatisation qui aurait permis, même a minima, de garder un tant soit peu l'emploi.Pour l'anecdote, il y a lieu de rappeler que, depuis la disparition de ses fleurons industriels, la wilaya de Constantine s'est, comme par miracle, découvert une vocation agricole. Ce sont, du moins, les responsables locaux qui le disent.


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