Le Premier ministre russe, Vladimir Poutine, a appelé hier les Occidentaux à «ne pas se comporter comme un éléphant dans un magasin de porcelaine» en Syrie estimant que le peuple syrien devait décider lui-même de son avenir. Evoquant la situation en Syrie, mais aussi en Libye, Poutine, lui-même au centre d'une controverse en Russie, a souligné qu'il fallait «bien entendu laisser la possibilité aux peuples de ces pays de résoudre eux-mêmes leurs problèmes». «Notre tâche, c'est de les aider sans aucune forme d'ingérence», dira Poutine en allusion aux pays occidentaux qui exigent le départ du président syrien, Bachar al-Assad, et redoublent de pression contre Damas. Moscou semble engagé dans la crise syrienne faisant contrepoids aux positions des Occidentaux et certains pays arabes. Le chef de la diplomatie russe, Sergueï Lavrov, de retour de Damas où il a rencontré le président syrien, a indiqué de son côté que le sort de Bachar al-Assad devait être réglé par «les Syriens eux-mêmes». Pour les Russes, seules des négociations entre le pouvoir et l'opposition sont susceptibles de calmer la situation et trouver une issue à la tragédie qui secoue le pays du Cham. La visite de Lavrov en Syrie est intervenue après le veto de la Russie et de la Chine samedi dernier à l'ONU à un projet de résolution du Conseil de sécurité présenté par les Occidentaux et des pays arabes condamnant Damas. Ce double veto sino-russe a provoqué l'indignation des Occidentaux et de certains pays arabes, notamment ceux du Golfe. L'opposition syrienne à l'étranger l'a assimilé à un «permis de tuer». Poutine est revenu sur l'intervention occidentale dirigée par l'Otan en Libye, provoquant la chute en octobre dernier du régime de Mouammar Kadhafi dans des conditions extrêmes. Dans certaines villes de Libye qui soutenaient l'ancien régime du colonel Kadhafi «se produisent aujourd'hui de terribles exactions, mais personne n'en parle», dénonce Poutine. «Ce sont les horribles conséquences des ingérences étrangères, avant tout militaires», dira-t-il. La Russie, membre permanent du Conseil de sécurité de l'ONU, s'était pourtant abstenue lors du vote sur la Libye en mars 2011 permettant les frappes contre la Libye conduisant inéluctablement à la chute du régime. Moscou semble depuis regretter son attentisme arguant que l'ampleur de l'intervention des avions de l'Otan en Libye était largement sortie du cadre de la résolution des Nations unies. En décembre dernier, le premier ministre russe avait accusé clairement les forces spéciales américaines d'être impliquées dans la mort du dirigeant libyen tué dans des circonstances troubles peu après son arrestation. La Syrie reste un important client de Moscou en matière d'armement. En 2007, la Russie a conclu un accord pour vendre 24 Mig 29 à Damas. Moscou est engagée dans la remise à niveau d'anciens Mig 23 et Mig 29, ainsi que dans la fourniture de plusieurs systèmes antimissiles. Après la chute de la Libye de Kadhafi, qui a coûté quelques milliards de dollars aux usines d'armement russes, Moscou ne semble pas disposé à laisser tomber un autre allié dans le très explosif Proche-Orient. M. B./Agences