La déclaration sanctionnant les travaux de la réunion des ministres des Affaires étrangères des pays du groupe dit 5+5 sonne, à bien des égards, un frappant déphasage entre le discours et la réalité. Il est pour le moins surprenant de voir les ministres des pays concernés énumérer leurs supposées satisfactions alors que la Méditerranée, sur ses deux rives, vit l'incertitude au pluriel. Les deux rives de la Méditerranée font face à des situations de crise. Angoisse financière chez les pays européens et incertitudes politique et institutionnelle chez les pays de l'Afrique du Nord. Les ministres des AE des 5+5 préfèrent, cependant, ne pas voir cette réalité. Pour n'inventorier que les «satisfactions» et souligner, accessoirement, la nécessité de renforcer la coopération. Satisfaits donc des acquis de «l'expérience unique» qu'ils ont développée dans le domaine sécuritaire, les 5+5 ont convenu d'une autre réunion visant à renforcer la coopération dans divers domaines. Ils ont ainsi plaidé pour la reprise et la relance du travail de la Conférence des ministres de l'Intérieur du groupe des 5+5. Cette relance se fera à Alger, où vont se rencontrer les ministres de l'Intérieur des pays concernés. La rencontre succédera à celle de Venise en 2009. C'est ce qui ressort de la réunion des ministres des Affaires étrangères des pays membres du dialogue des 5+5, au terme de laquelle une déclaration commune a été rédigée par les participants, dont le ministre des Affaires étrangères, M. Mourad Medelci. «Le dialogue des 5+5 constitue le noyau dur de la coopération euro-méditerranéenne et représente un modèle de partenariat Nord-Sud susceptible de consolider les complémentarités et les solidarités entre les deux rives de la Méditerranée occidentale», est-il souligné dans ladite déclaration. Les pays ayant pris part à cette rencontre, coprésidée par la Tunisie et l'Italie, sont l'Algérie, la Libye, le Maroc, la Mauritanie, la Tunisie, l'Espagne, la France, l'Italie, le Portugal et Malte. Contexte régional oblige, les ministres des Affaires étrangères ont évoqué les bouleversements qu'ont connus certains pays du pourtour méditerranéen. Ils ont exprimé leur «grande satisfaction suite aux changements historiques intervenus, en 2011, dans ces pays et aux réformes démocratiques entreprises dans d'autres pays». Le groupe 5+5 est visiblement convaincu que «ces changements et les processus de réformes démocratiques ont engendré et renforcé des valeurs partagées sur lesquelles se fonde un nouveau départ du dialogue des 5+5 et que seront relancées des activités de coopération entre les pays membres». Les rédacteurs de la déclaration se sont, par ailleurs, intéressés à la question sécuritaire dans le Sahel. C'est dans cette optique qu'un consensus a été établi pour œuvrer à «renforcer la coopération en tenant compte des nouveaux défis», allusion à la situation dans la région du Sahel, estimant qu'une attention particulière doit être dédiée au thème migratoire dans «une approche globale qui prenne en compte les dimensions du développement, de la mobilité légale et de la lutte contre les flux illégaux». Les ministres des AE des 5+5 ont émis le souhait «d'élargir le dialogue à d'autres domaines de coopération, tels que la sécurité alimentaire, la sécurité énergétique, l'environnement, le commerce et les transports». Comme ils ont soutenu l'idée «d'une coopération régionale structurée dans les domaines de l'Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique» afin de «créer un véritable espace intégré de recherche et d'innovation basé sur un pont technologique entre les deux rives». A. Y.