Gros problème en vue le 10 mai prochain. Le rendez-vous «tellement attendu» par le peuple algérien risque d'être compromis. Explication : les propriétaires d'armes menacent de ne pas voter. Voilà donc un retournement de situation qui renvoie une république tranquille à l'instabilité chronique d'une ville de Tombstone déchirée par la guéguerre entre la famille Earp et le reste des bandes organisées. Le pays et la démocratie s'en relèveront-ils alors ?Bien entendu qu'ils s'en relèveront ! Pour tellement de raisons aussi convaincantes que non convaincantes qu'avancera le pouvoir en ce sens que tout ce qui est à sa périphérie et/ou qui justifierait les incessantes courses pour y accéder n'aboutira qu'à un incontournable remake de ce qui est, a été et sera. Au-delà de cette question d'armes et de l'utilité que veulent lui accoler les propriétaires et qui est en réalité plus destinée à leur permettre de faire la bamboula lors des fêtes qu'à l'usage bucolique officiel consistant à taquiner perdreau et poule d'eau, c'est aussi et surtout de la réaction, au lendemain du 10 mai de quelques partis politiques à la dimension variable, qu'il faudrait tenir compte. Ainsi, un parti, au demeurant très respectable, ne s'embarrasse pas d'états d'âme et décide de boycotter ce qui est ridiculement qualifié de «jour de fête» estimant que les dés sont d'ores et déjà pipés. Les mauvaises langues diront que le RCD, puisque c'est de lui qu'il s'agit, refuse d'aller, en réalité, à une épreuve à l'issue de laquelle il sortirait transi. Toujours histoire de boycott, l'incontournable Aït Ahmed dont la formation, jusque-là, en faisait sa marque de fabrique, assure aujourd'hui qu'il ne s'agit pas, en réalité, d'une alternative altérant toutefois cette profession de foi par le premier secrétaire «pour nous, une éventuelle participation à ces élections n'implique en aucun cas un consensus sur la règle du jeu politique tel qu'il se joue actuellement». La direction du Front, qui voudrait avoir deux fers au feu, tout en s'évertuant à préserver ses distances par rapport à un système qu'elle a de tout temps rejeté de manière épidermique, pourrait mieux faire autrement. Il s'en trouvera, malgré tout, qui iront aux législatives même s'ils restent persuadés «que lesdites élections ne seront pas propres», précisant que l'abstention sera phénoménale et allant jusqu'à annoncer un taux de participation à hauteur de 3%. Une estimation d'une telle précision qu'elle donnerait la jaunisse aux instituts de sondage les plus prestigieux à travers la planète. Et dans ce qui va être une «usine à gaz» (dixit Saïd Sadi), Louisa Hanoune met en garde contre «toute tentative de détournement de la volonté populaire lors des prochaines élections législatives». Encore eut-il fallu qu'il existât une volonté populaire de se rendre aux bureaux de vote, sinon pour quelle raison le ministère de l'Intérieur s'échinerait-il alors à harceler Algériens et Algériennes par SMS ? La secrétaire générale invite ses militants à «se mobiliser pour déjouer toute forme de fraude lors de la consultation électorale». Pas jusqu'à se tapir dans les urnes quand même ! Il y a toutefois une formation qui n'est pas certaine d'y aller, à ce rendez-vous du 10 mai prochain, c'est le Parti des jeunes. Vraisemblablement, ce sera le congrès national qui se tiendra dans les jours à venir qui en décidera, belle leçon de démocratie, mais ne serait-ce pas là une dérobade annoncée parce qu'en réalité ce Parti des jeunes n'a aucun ancrage au sein de la… jeunesse. Or, démarrer une existence par un gros échec risque de marquer pour la vie.Morale : vouloir le beurre accompagné du sourire de la laitière est sans nul doute légitime, mais prétendre à l'argent du beurre est quelque peu, voire trop exagéré. La décantation sera terrible le 11 mai et la grosse désillusion dans certains camps n'aura d'égal que les cris d'orfraie qu'ils pousseront pour dénoncer encore une fois la fraude. Mais ce sera déjà trop tard et tellement inutile. A. L.