Pour une journée d'investiture, François Hollande n'a pas ménagé sa peine, il est entré de plain-pied dans l'action de son quinquennat présidentiel. L'homme sait qu'il ne bénéficiera pas d'un état de grâce et qu'il faudra gagner les élections législatives des 10 et 17 juin pour avoir une majorité parlementaire, indispensable pour appliquer son programme.Lorsqu'il serra la main à Nicolas Sarkozy vers la mi-journée d'hier sur le perron de l'Elysée, Hollande ne s'est pas attardé pour voir son prédécesseur quitter définitivement le palais qui était le sien cinq ans durant. Dans son discours d'investiture, Hollande insistera sur le rassemblement, la confiance, l'unité des Français, le respect des valeurs républicaines, le rejet de toute discrimination pour affronter la crise économique et appliquer les promesses qu'il a faites durant sa campagne électorale.Passant au deuxième acte de son intronisation, Hollande a remonté les Champs Elysées, sous la pluie, dans une voiture à toit ouvert pour se rendre, comme le veut le protocole, devant la tombe du Soldat inconnu et raviver sa flamme. Vint ensuite, en début d'après-midi, la cérémonie très attendue car piégeante : l'hommage à Jules Ferry devant sa statue dans les Jardins des Tuileries. Piégeante car si l'ancien président du Conseil et ministre de l'Instruction civique est considéré comme le père de l'école publique, avec ses lois du 16 juin 1881 sur la gratuité de l'école primaire et du 28 mars 1882 rendant l'école obligatoire et laïque, il avait une autre facette horrible. Celle d'un raciste et apologue de la colonisation. Hollande a su déminer cet «os» dès le début de son intervention en déclarant : «Tout exemple connaît des limites, toute grandeur à ses faiblesses et tout homme est faillible. En saluant aujourd'hui la mémoire de Jules ferry qui fut un grand ministre de l'Instruction publique, je n'ignore rien de ses engagements politiques. Sa défense de la colonisation fut une faute morale et politique. Elle doit à ce titre être condamnée. C'est donc empreint de cette lucidité indispensable que je suis venu saluer le législateur Ferry.» Il a rappelé que «le grand Clémenceau lui-même porta, en son temps, le réquisitoire le plus implacable du colonialisme au nom de la conscience universelle».Avec cette prise de position, Hollande a certainement rassuré les associations, qui se sont inquiétées du choix de son hommage, en marquant tout l'intérêt qu'il porte à l'éducation nationale. Elles attendaient et souhaitaient une telle déclaration du nouveau président.Ensuite, après avoir honoré la mémoire de Marie Curie et une réception à la mairie de Paris, le nouveau chef de l'Etat est allé au devant de sa deuxième difficulté de la journée : rencontrer la chancelière allemande, Angela Merkel, à Berlin. Une rencontre capitale pour l'avenir des relations franco-allemandes et de l'Union européenne. Paris et Berlin ont à surmonter une divergence de taille sur la façon de faire face à la crise économique et financière. Merkel s'en tient au pacte budgétaire européen qui axe l'action sur la rigueur et l'austérité. Hollande refuse ce pacte, signé par Sarkozy mais pas encore ratifié, s'il n'est pas accompagné d'un pacte de relance de la croissance.Avant de quitter Paris, Hollande à nommé Jean-Marc Ayrault, 62 ans, Premier ministre. Le président du groupe des députés socialistes à l'Assemblée nationale sortante, maire de Nantes, est chargé de former le gouvernement, qui devrait être connu aujourd'hui en fin de journée. S'il y a fidélité à l'engagement électoral de Hollande, le gouvernement sera composé à parité égale hommes-femmes.