Photo : M. Hacène Par Faouzia Ababsa «Nous étions une vingtaine de personnes issues de l'Institut national d'arts dramatiques de Bordj El Kiffan. Une promotion avec un bel avenir devant elle. Il n'en reste malheureusement aujourd'hui que deux qui sont sur le terrain, Boudaoud et moi-même. Les autres ont préféré les bureaux et les horaires administratifs avec en sus un salaire garanti. Certains d'entre eux occupent des postes de directeurs au niveau du ministère de la Culture ou de directeurs de wilayas.» Ces propos sont de l'acteur de cinéma et de théâtre Hichem Mesbah, dont le groupe avait fait vibrer le public en 1992 à travers la comédie musicale «Les folies berbères». Le même intervenant a indiqué qu'un véritable artiste n'a pas à recevoir de salaire. Il vit de son produit, des cachets et autres cachets qu'il décroche. «Même si le statut en question n'existe pas juridiquement en Algérie, nous sommes des intermittents du spectacle de fait.» Avec cette précision que s'ils ne font pas de représentations ou qu'ils ne se produisent pas, ils ne sont pas rémunérés. En somme, les véritables artistes professionnels vivent du produit de leur labeur exclusivement et n'attendent pas que l'Etat leur verse une rente qui les ferait entrer dans une sorte d'hibernation. En France, exemple le plus connu sur ce plan, il existe une caisse vers laquelle se dirigent les intermittents en présentant pas moins de 48 cachets arrachés et œuvres produites pour espérer avoir une rémunération. Dans ce sens, les choses sont règlementées.En Algérie, beaucoup d'artistes naviguent à vue soit en raison d'absence de projets cinématographiques, théâtraux ou de télévision, soit parce qu'on ne leur fait pas appel pour telle ou telle autre production, et se retrouvent «sur la paille». Mais il n'en demeure pas moins que lorsqu'ils sont inscrits à l'Office national des droits d'auteurs et droits voisins (Onda), ils ouvrent droit à une certaine protection dite de droits voisins. L'article 107 de l'ordonnance relative aux droits d'auteurs et droits voisins dispose que «tout artiste qui interprète ou exécute une œuvre de l'esprit ou une œuvre du patrimoine culturel traditionnel, tout producteur qui réalise des phonogrammes ou vidéogrammes relatifs à ces œuvres et tout organisme de radiodiffusion sonore ou audiovisuelle qui produit des programmes communiquant ces œuvres au public, bénéficient sur leur prestations, de droits voisins des droits d'auteur, dénommés droits voisins».Cependant, la question qui se pose consiste à savoir si ces artistes, producteurs ou autres contribuent au financement de la collectivité à travers le versement des cotisations à la sécurité sociale et au titre de l'IRG. Force est de constater que l'écrasante majorité n'émarge ni aux caisses de sécurité sociale ni aux services des contributions des impôts. Souvent par méconnaissance des textes, mais aussi par l'omniprésence de la culture de l'assistanat et de la rente. Pourtant, la législation est claire, notamment celle régissant les professions libérales (Casnos) et les différentes lois de Finances établissant les mesures fiscales et parafiscales (IRG). Sous prétexte d'absence du statut national de l'artiste, qui faut-il le souligner tarde à voir le jour, ces artistes qui font rentrer du baume dans les foyers, refusent de s'acquitter de leur dû constitutionnellement consacré au titre de «tous les citoyens sont égaux devant l'impôt.» N'empêche qu'ils ne se gênent pas de recourir à l'Onda où certains d'entre eux se sont inscrits lorsqu'ils se retrouvent en difficulté de tout ordre. L'Office se transforme par la force des choses, mais aussi de la loi en caisse de sécurité sociale et en commission de conciliation lorsqu'il y a des conflits entre producteurs et cachetiers. Cela étant, si ces intermittents du spectacle ont trouvé une brèche pour échapper à la règlementation en vigueur, il est pour le moins étonnant que les services concernés ne se sentent pas dans l'obligation de les rappeler à l'ordre et de procéder à des contrôles en faisant appel à l'aide justement de l'Onda ou à d'autres organismes du secteur à l'image de l'Onci, théâtre, etc. N'est-ce pas un manque à gagner, même s'il n'est pas important, pour le Trésor public et le système de solidarité du régime de protection sociale et de la retraite ?