La wilaya manque de tout, les infrastructures de base et les besoins structurels font tellement défaut qu'aucun responsable ne peut nier la situation de sous développement socio-économique qui frappe sa population, qui ne cesse de lutter pour l'amélioration de son vécu quotidien à travers ses comités de villages, des élus et des associations de bénévoles. Au lieu que ce soit l'administration qui s'inquiète en premier lieu des préoccupations populaires, étant la tutelle publique des habitants, ce sont plutôt des jeunes et moins jeunes, des zones déshéritées et des villes dont le cadre de vie se dégrade continuellement, qui s'engagent pour solutionner les problèmes posés par les victimes de la gestion chaotique de la cité par les pouvoirs publics. Et, ce que les responsables défendent comme «acquis et réalisations des plans quinquennaux présidentiels» dans les Assemblées communales et de wilaya et dans les hautes institutions de l'Etat, la réalité finit par les dévoiler comme des petits pas, des progrès boiteux, qui, une fois confrontés à la dure réalité, son sans impact sur le quotidien des habitants. Les deux saisons d'hiver et d'été suffisent à elles seules à montrer l'échec des programmes de développement de la région de Kabylie. En février dernier, alors que la région a connu les pires intempéries jamais enregistrées depuis des décennies, les milliers de sinistrés étaient presque seuls à affronter le froid et la neige, devant l'absence de secours attendus de la part des autorités. Des morts étaient déplorés et des villages entiers coupés du monde, isolés par des chutes ininterrompues de neige. C'était grâce à la solidarité villageoise et à des associations locales et d'expatriés que des aides ont été acheminés aux centaines de familles bloquées par les intempéries, alors que les rares actions des pouvoirs publics attendaient les caméras de la télé algérienne pour être menées. Pour parer au plus urgent, et sans prévision aucune, les autorités locales étaient allées demander des convois de gaz butane aux autres wilayas d'Algérie, pour dépanner des habitants transis de froid dans les villages du Djurdjura, où les demandes de raccordement au gaz naturel sont restées lettre morte (environ 40 % de foyers sont alimentés en gaz naturel dans la wilaya de Tizi Ouzou, selon des chiffres de la direction des mines et de l'industrie de wilaya). Des kilomètres de files d'attentes devant des stations Naftal, à Oued Aïssi et Fréha s'étaient formés pour l'approvisionnement en gaz butane, alors des milliers de foyers étaient sans électricité. Il fallait passer plusieurs nuits dehors à greloter de froid, parfois en vain, pour pouvoir rentrer chez soi avec une bouteille de gaz. Il est utile de rappeler que la partie sud et des communes de l'extrême nord est de la wilaya de Tizi Ouzou sont les plus pénalisées par l'absence de raccordement au gaz naturel. Fin 2011, on annonçait que le gazoduc devant alimenter le flanc nord de la wilaya de Tizi Ouzou (16 pouces et d'une longueur de 62 km), projet datant d'une de plusieurs années, sera mis en service avant la fin de l'année. A ce jour, des dizaines de foyers sont privés d'électricité dans la wilaya de Tizi Ouzou. On a appris récemment qu'une centaine de foyers des villages Aït Yakoub et Aït Hague, dans la daïra de Larbaa n'Aït Irathène, ne bénéficient pas de l'énergie électrique pour cause d'opposition des riverains. Il y a quelques mois, des dizaines d'habitants des villages Aït Aïcha et Ighrayen, commune d'Aït Idjeur, daïra de Bouzeguène, à une cinquantaine de kilomètres de Tizi Ouzou, ont fermé la quasi-totalité des services administratifs publics de la daïra de Bouzeguène pour protester contre «l'exclusion» de leurs villages du projet de raccordement au gaz naturel. Dans la même daïra de Bouzeguène, des habitants du village Aït Mizar, ont fermé juillet dernier le siège de l'APC pour demander du gaz naturel, avec des slogans sur des banderoles comme : «Du gaz pour tout le monde». Ces habitants craignent et refusent de revivre le froid glacial qu'ils ont vécu l'hiver dernier, et rappellent que le village en question manque d'infrastructures et de réseaux élémentaires comme l'eau, l'assainissement, l'éclairage public, centres de loisirs…etc. Le mot développement ne signifie décidément pas la même chose pour la population et les pouvoirs publics en Kabylie.