Des incidents ont éclaté hier au Caire lors d'une manifestation de protestation contre l'acquittement de plusieurs responsables de l'ancien régime égyptien coupables d'exactions. Ces incidents illustrent les tensions toujours vives en Egypte, plus d'un an et demie après la chute d'Hosni Moubarak et près de quatre mois après l'investiture de son successeur, candidat des Frères musulmans. La tension était montée d'un cran mercredi, lorsqu'un tribunal du Caire a acquitté par manque de preuves 24 anciens hauts fonctionnaires du régime Moubarak accusés d'avoir ordonné l'attaque des manifestants de la place Tahrir le 2 février 2011. Des hommes de main du régime à dos de chameau s'en étaient pris violemment aux manifestants. Le procès de cet épisode marquant de la «révolution du Nil» était suivi de très près par ceux qui en Egypte réclament justice pour les centaines de morts des journées révolutionnaires de janvier-février 2011. Le procureur général a été démis de ses fonctions par le président Mohamed Morsi après les critiques virulentes ayant suivi l'acquittement. Cent jours après son élection, Morsi veut donner l'image d'un président contrôlant les leviers de la décision dans un pays où la mainmise politique des militaires est patente. Seulement le procureur Abdel Meguid Mahmoud a annoncé qu'il refusait de démissionner de son poste affirmant que la loi n'autorise pas le pouvoir exécutif à démettre de ses fonctions un personnel du corps judiciaire. Un bras de fer s'est enclenché entre le président et le pouvoir judicaire soupçonné d'être toujours affilié à l'ancien régime. La décision de Morsi a, par contre été saluée par les libéraux pourtant très critiques envers les Frères. Et pour davantage calmer la colère de la population, le président égyptien entend pousser le magistrat à l'exil en lui proposant un poste d'ambassadeur. L'Egypte post-Moubarak est en proie à une phase complexe où une guerre larvée oppose les révolutionnaires aux foulouls (rebuts) de l'ancien régime. En poste depuis sept ans, ce cacique de l'ancien régime est accusé d'avoir délibérément dissimulé les preuves du dossier ayant permis la condamnation des anciennes figures du régime totalitaire de Hosni Moubarak. La Cour pénale a jugé «insuffisantes» les preuves contre les accusés et a décidé l'acquittement provoquant la colère des Egyptiens. Les polémiques à propos des acquittements prononcés en faveur de responsables dans des cas de corruption et de torture, sont devenus monnaie courante dans la nouvelle Egypte. Le président égyptien Mohamed Morsi se retrouve face à un bras-de-fer difficile sur fond de pressions multiformes. Le président égyptien élu au suffrage universel est face à un défi crucial risquant fortement d'être décrédibilisé et donner l'image de plier sous les menaces de figures de l'ancien régime toujours présents dans les rouages de l'Etat égyptien. M. B. /Agences