L'assassinat de l'opposant tunisien, Chokri Beläid, a provoqué une crise politique sans précédent en Tunisie. La menace de démission de son poste brandi hier par le Premier ministre est un indice d'un blocage politique total, pas seulement entre opposition et pouvoir mais surtout au sein du parti majoritaire lui-même, dont est issu le Premier ministre, Hamadi Jebali. Ce dernier a assuré, hier, que les ministères régaliens aux mains de son parti islamiste seront remplacés par des indépendants dans le gouvernement apolitique qu'il veut former contre l'avis de son propre camp. «Tous les ministres seront des indépendants, y compris à l'Intérieur, la Justice et aux Affaires étrangères», a déclaré M. Jebali à la chaîne d'informations française France 24 qui l'interrogeait sur l'avenir de ces ministères clés auxquels le parti Ennahda refuse de renoncer. Faute de pouvoir former un gouvernement apolitique, Hamadi Jebali menace de jeter le tablier. Une annonce qui coïncidait avec la manifestation à laquelle avait appelé son parti prônant la légalité et la légitimité des urnes. Ces développements risquent d'enfoncer le pays un peu plus dans la crise qui le marque depuis un moment. Ennahda, faut-il le rappeler, est dans l'incapacité de s'accorder avec ses alliés laïcs, dont le président Moncef Marzouki, sur un remaniement gouvernemental. Une situation qui se greffe à un climat socioéconomique des plus difficiles. «Je présenterai l'équipe au plus tard au milieu de la semaine prochaine. Si elle est acceptée je continuerai à assumer mes fonctions, à défaut, je demanderai au président de chercher un autre candidat pour former un nouveau cabinet», a dit M. Jebali à des médias tunisiens. Le Premier ministre a souligné que son initiative visait à empêcher que le pays «bascule dans le chaos et l'irrationnel», avant de lancer à ses détracteurs: «Quelle alternative? La loi de la jungle?». Sur des blogs tunisiens on va jusqu'à évoquer la démission de Jebali de la direction d'Ennahda tout en restant un militant de base de sa formation politique. C'est dire à quel point le fossé est creusé entre le Premier ministre et la direction de son parti, mais aussi avec le reste de la classe politique. En tout état de cause, c'est la première fois que M. Jebali évoque sa démission du premier ministère. Les divisions au sein du parti opposent les modérés, dont il fait partie, et une frange radicale rangée derrière le chef Rached Ghannouchi. Qui aura le dernier mot ? On ne tardera pas certainement à le savoir.