Chaque recrudescence des comportements de violence dans nos stades et autour est suivie d'appels au calme, à la sagesse et à la prévention. C'est visiblement le cas pour la violence du mois de novembre. Croyant pouvoir résoudre le problème de la violence au détour d'une simple réunion de cadres et de représentant de l'invisible «société civile», le ministère de la Jeunesse et des Sports a donné naissance, au cours de la semaine écoulée, à un organisme nommé «Comité national de coordination intersectorielle pour la prévention de la violence». Le procédé a été maintes fois expérimenté et les résultats tardent à se traduire sur le terrain où la violence fait encore des victimes. Il y a décidément urgence à abandonner ce type de réactions. La solution ne saurait être trouvée sans une identification objective des sources de cette violence. Elles sont naturellement nombreuses. Mais au-delà de toutes ces sources de violence, il en existe une que personne ne veut ouvertement nommer ni traiter comme telle. Il s'agit de la faiblesse des instances qui ont pour mission d'assurer la gestion des compétitions nationales. A bien y regarder, ces instances sont responsables du phénomène de violence qui est en train de générer un sentiment d'angoisse au sein de toute la population. Il serait incorrect de dire que la Fédération algérienne de football et sa fille légitime, la Ligue nationale de football, sont les responsables exclusives de ce qu'endure la discipline en Algérie. Il y a néanmoins des raisons de comprendre que la faiblesse, les atermoiements de ces instances nourrissent jusqu'au bout la violence qui s'exprime avant, pendant et après un match de football. La FAF, peu importe le nom de celui qui en est aux commandes, semble consommer la petite dose de sympathie qui lui restait au sein de l'opinion sportive. Avec l'accumulation des litiges et des «affaires», cette instance a dangereusement glissé vers l'absurde et l'inacceptable. La succession de maladresses et de prises de décision aléatoires a considérablement terni l'image d'une fédération. Cette dernière fait continuellement face à de légitimes critiques des amoureux du foot compte tenu du niveau atteint par la sélection nationale toutes catégories confondues. La manière avec laquelle est gérée la discipline est ainsi une source supplémentaire pour discréditer davantage une FAF en mal de rationalité et parfois d'équité, du fait des pressions qui s'exercent sur elle. La manière dont ont été traitées les réserves de l'USMH contre le RCK, s'agissant du joueur Khelidi, est la parfaite illustration de la déliquescence de cette structure. Précisons que la fédération de football n'en est pas à son premier cas. Mais celle-ci, sous la direction d'un Haddadj, a invité, durant un mois d'août caniculaire, les Algériens à attendre les délibérations d'un tribunal helvétique sur un «cas maison». En traitant l'affaire avec une légèreté qui a surpris tous le monde, la fédération aura ainsi bouclé la boucle d'un cycle olympique où il est franchement très difficile de retenir quelque chose de positif en termes techniques. A partir d'un tel constat, tout le monde s'accorde à dire que la violence est la championne indétrônable des éditions de ces dernières années. Déficit de crédibilité Mais est-il possible de mener un travail de prévention en direction des foules qui se rendent au stade quand la prestation des instances encourage ce genre de comportements ? Il est clair que lancer le débat sur le phénomène de la violence servira toujours à quelque chose. Mais, force est de reconnaître que, sans des instances solides, performantes et respectueuses de leurs propres délibérations, les appels qu'on entend ici et là s'avéreront des prêches dans un désert. C'est de ça qu'il s'agit en vérité : il est insensé de demander à un supporter de respecter l'ordre et ses règles quand la fédération et la ligue de football transgressent les décisions qu'elles ont prises quelques heures plus tôt. Aujourd'hui, les tergiversations de ces deux instances alimentent la violence jusqu'à l'implantation d'un sentiment de peur dans les villes, chaque après-midi footballistique que la LNF fait. Il est urgent pour les instances qui gèrent notre football de trouver un mode de fonctionnement à même de leur faire gagner quelques points de crédibilité. Car, sans cette crédibilité, il est vain de prétendre pouvoir assurer un bon déroulement d'une simple rencontre. Et c'est à ce niveau que le bât blesse. Disons-le sans ambages ni démagogie : qui a pris un jour au sérieux une décision de ces deux instances sans penser un instant qu'elle ne serait pas annulée dans les heures qui suivent ? Difficile d'en trouver. Une telle attitude est la résultante d'un déficit de crédit de ces instances, lesquelles, à force de compter plus sur les humeurs que de veiller sur le respect de la loi, ont sombré dans une déliquescence indescriptible. Aujourd'hui, le remède à prescrire à nos instances est qu'elles œuvrent à reconquérir leur crédit, condition sine qua non pour une vie saine et une place digne au sein du mouvement sportif national. La mission est loin d'être une sinécure. C'est plutôt un vaste programme. Car il faudrait effacer tout le passif qui pèse lourd sur la morale des instances. Un passif garni d'accointance et de favoritisme, cause de toutes les injustices et les partialités. L'ordre, un remède à appliquer Pour que nos instances soient prémunies contre ces virus, il faut rétablir le vrai sens d'une élection et éviter la cooptation qui est en train de devenir le mode d'emploi le plus privilégié par les concurrents. Gérer les affaires footballistiques en Algérie n'est pas une simple affaire que l'exercice ne permet pas la légèreté qui est de mise actuellement. Présider une fédération de football ou une ligue nationale n'est pas une affaire d'amis. Accéder à une telle responsabilité, c'est d'abord présenter un programme rationnel, ensuite s'entourer d'hommes intègres, crédibles, compétents et disponibles à instaurer une discipline et une rigueur dans la gestion des affaires. A l'heure du renouvellement des fédérations, nous assistons à une étonnante production de procédés ayant conduit le football national à la dérive. Des gens s'élèvent par-ci par-là, pour faire croire à l'opinion publique que le bilan de tel président de fédération est des plus catastrophiques et que le moment du changement a bel et bien sonné. C'est qui n'est pas faux, objectivement parlant. Ces vrais promoteurs d'un faux changement feignent néanmoins de présenter les bilans techniques comme un critère d'accession aux hautes responsabilités. Ces mêmes personnes ont défendu, il n'y a pas si longtemps -comble de la malhonnêteté-, la reconduction d'une administration qui a échoué sur tous les plans. Nul n'est donc dupe pour ne pas voir dans cette adversité de circonstance une vraie lutte d'intérêts. Signe de la défaillance d'un personnel incapable d'instaurer des structures solides et crédibles, l'opération de renouvellement des instances ne prendra pas de l'altitude. Elle continuera à évoluer bas. Très bas. Nous n'avons pas encore entendu un potentiel candidat proposer un programme. Comme s'il était possible de réussir sans l'élaboration d'un programme. Pour l'heure, les courtisans promettent l'équité entre les différents clubs. Mais, pendant ce temps, la faiblesse des instances continuera d'alimenter la violence. Jusqu'au futur dérapage… A.Y.