Le gouvernement tunisien a tenu parole. Le dispositif sécuritaire mis en place n'a pas laissé la moindre chance aux partisans du mouvement salafiste pour tenir leur manifestation interdite. Il n'y a pas eu de congrès de Ansar Al-Chariaa. Les militants du mouvement ont cependant tenté de changer de lieu de rassemblement. De la ville de Kairouan qui était totalement bouclée depuis samedi, ils ont choisi d'investir une banlieue de Tunis, la cité Ettadhamen. Une cité acquise aux partisans de ce mouvement radical où leurs militants se comptent en grand nombre. Ce coup de force fut également avorté mais les partisans du mouvement salafiste ne se sont pas démontés sans se frotter aux forces de l'ordre tunisiennes. Histoire de tirer un baroud d'honneur avant de céder le champ aux jeunes défavorisés des banlieues remontés contre tout ce qui représente l'Etat. Hier midi, des affrontements ont, donc, fini par éclater entre policiers et salafistes à la cité Ettadhamen. «Lors des protestations, onze agents de sécurité ont été blessés, dont un grièvement, ainsi que trois manifestants, dont un est gravement blessé», a annoncé le ministère de l'Intérieur tunisien. Il évoque «plus de 700 (...) islamistes extrémistes» équipés de «mélanges incendiaires, de projectiles et d'armes blanches». Le ministère, qui a évoqué un «retour relatif au calme», n'a pas donné de précisions sur la nature des blessures ni sur le nombre d'émeutiers interpellés. Les islamistes ont estimé sur leur site le nombre de manifestants à 6 000. Le porte-parole d'Ansar Al-Chariaa, Seifeddine Raïs, a été arrêté, a annoncé son organisation en début de matinée. Annonce confirmée par une source sécuritaire. Pour protester contre l'interdiction de leur rassemblement, des centaines de salafistes ont érigé des barricades à l'aide de pneus en feu dans les rues du quartier Ettadhamen, et jeté des pierres sur les policiers. La police a répliqué avec des tirs de sommation et de lacrymogènes puis déployé des blindés et des bulldozers pour disperser les militants et détruire les barricades. Les policiers ont réussi dans un premier temps à disperser les militants de la cité Ettadhamen, avant que les jeunes émeutiers se soient repliés vers le quartier voisin d'Intilaka, où les heurts continuaient peu avant 16h00 (15h00 GMT). Les forces de l'ordre avaient du mal à contrôler cette banlieue populaire et répliquaient par des salves de gaz lacrymogènes aux cocktails incendiaires jetés par les manifestants. Des heurts sporadiques ont également éclaté entre les forces de l'ordre et des groupes de jeunes à Bab Jalladine à Kairouan, où la police a également utilisé des gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants qui jetaient des pierres. La ville de Kairouan devait accueillir dans la journée le 3e congrès du courant «Ansar Al-Chariaa» qui avait été interdit par le ministère de l'Intérieur. Selon l'agence d'information tunisienne TAP, quatre salafistes appartenant à ce courant ont été arrêtés alors qu'ils se trouvaient dans un hôtel à Kairouan. Tôt dans la matinée des renforts sécuritaires ont été déployés à proximité de l'enceinte de la mosquée Okba Ibn Nafaa et les différentes rues qui y mènent après l'interdiction du 3e congrès annuel d'«Ansar Al-Chariaa». Les affrontements se sont poursuivis tout au long de l'après-midi. Bilan de cette journée de heurts : une personne tuée et 14 autres blessées dont 11 policiers. La grande batille promise par les islamistes aux autorités tunisiennes n'a pas eu lieu. Néanmoins la situation demeurait tendue à Kairouan et Tunis. Ennahda qui commande le gouvernement tunisien a réussi son premier test face aux salafistes. Reste à voir si elle saura gérer avec la même habilité le développement de la situation. G. H./Agences