Exception faite des coups de gueule presque chorégraphiés de quelques-unes de ses figures parmi les plus médiatiques et non plus parmi les plus charismatiques, le Front de libération nationale (FLN) est devenu plus que quelconque depuis l'éjection de son dernier secrétaire général «élu», en l'occurrence Abdelaziz Belkhadem. Avec ce retrait obligé et la résurgence de vieux démons, une transition gérée sur le fil et surtout au petit bonheur la chance par un précaire timonier plus proche du funambule que de l'acteur consensuel habituellement consacré dans les formations politiques étanches, monolithiques, à la résolution des missions impossibles pour donner satisfaction à toutes les factions en lutte officielle et tout aussi à celles underground, le parti est par voie de conséquence et par excellence devenu une sorte de bateau-ivre. La confusion y est telle que l'ancien secrétaire général qui a été renvoyé à ses pénates, à la limite, avec un coup de pied au bas du dos par ceux-là même qui l'ont plébiscité il y a presque une dizaine d'années, envisage de se porter candidat aux prochaines élections (quoiqu'encore hypothétiques) du parti. C'est dire que le bâtiment navigue à vue si tel serait le cas et que l'hypothèse d'un retour de M. Belkhadem selon le scénario évoqué se matérialise. En fait, la scène politique donne de réels signes de mutation quelque part orchestrée et qui viserait non pas à effacer, du moins de manière brutale parce que trop grossière aux yeux d'une opinion laquelle d'ailleurs n'y accorde aucune attention et encore moins d'importance, une mutation d'ailleurs qui la renouvellerait en «douceur». Un peu à la manière de ce qui s'est installé dans le jargon médiatique comme «coup d'Etat scientifique». Y a-t-il en réalité besoin de s'interroger sur une telle hypothèse à partir du moment où les deux autres partis qui formaient sinon donnaient l'impression, il n'y a pas longtemps, de constituer un triumvirat fort, puissant et surtout indéracinable, ont été réduits à leur plus simple expression alors que le triumvirat qu'ils formaient avec le Front était réputé avoir l'écoute du président de la République au programme politique, ils (les membres de l'alliance) juraient inconditionnellement leur adhésion. De manière plus simpliste, il y aurait lieu de souligner qu'Abdelaziz Belkhadem a eu le nez creux en décidant unilatéralement, tout en impliquant savamment (et même machiavéliquement) son parti, que le chef de l'Etat, qui est le président de tout le peuple, donc sans couleur politique marquée ou du moins officiellement déclarée quoiqu'il soit historiquement lié au FLN, porterait ou portait désormais les couleurs de ce parti, entérinant de fait et encore une fois d'autorité l'idée que l'un des symboles de l'Etat était frontiste. Une manière comme une autre de tracer un territoire et partant de plomber le reste des initiatives pouvant émaner de ses concurrents directs en l'occurrence le RND et le MSP. Toutefois, depuis que le charisme populaire préfabriqué de ces deux formations a été sérieusement ébréché et, autant l'affirmer, atomisé, d'autres formations politiques, dont certaines franchement lilliputiennes, ont été pressenties pour servir d'interface pour la prochaine élection présidentielle à laquelle la participation d'Abdelaziz Bouteflika demeure l'inconnue de l'équation, même si, malgré la tourmente interne dans laquelle le Front de libération nationale se trouve, s'évertue, sans répit, à vouloir en faire son champion. Or, sans l'actuel président de la République, le parti provisoirement dirigé par M. Belayat n'a pas le poids nécessaire pour aller à une consultation où il se sait indéniablement avachi et pour cause une impopularité qui n'a jamais diminué depuis son effondrement en 1990. Ceci, malgré les miracles de la politique-spectacle d'une décennie tendant à faire croire le contraire. Celle qui a consisté à porter Abdelaziz Belkhadem à la tête du parti et à entretenir une illusion de façade. A. L.