Critique est la situation en Egypte. Les évènements se succèdent et le glissement vers une confrontation armée inquiète de plus en plus les observateurs de la scène égyptienne. Désormais la voix des armes couvre de plus en plus celle de la raison. Les victimes tombent dans les deux camps. Pas moins de 51 personnes ont été tuées hier devant le palais de la Garde républicaine et 451 autres blessées. Les rangs des manifestants pro-Morsi comptent la majorité des victimes. Côté militaire, un soldat a été assassiné et 42 autres blessés dans les rangs de la Garde républicaine. Un bilan qui augure de lendemains sombres pour les Egyptiens. Dans une conférence de presse, les porte-paroles de l'armée égyptienne ont affirmé qu'ils n'ont tiré sur les manifestants qu'après avoir été agressés. Selon eux, une attaque a visé la caserne de la Garde républicaine, les soldats qui s'y trouvaient n'ont fait que se défendre et défendre l'institution où ils se trouvaient. L'armée soulignera, dans ce sillage, qu'elle ne permettra à personne de menacer la sécurité nationale. Les islamistes qui campent depuis le 1er juillet sur certaines places publiques racontent une toute autre version. Ils affirment qu'ils venaient d'accomplir la prière de l'aube quand ils ont été surpris par des tirs nourris des soldats. Et par conséquent ils appellent les Egyptiens à l'insurrection. Entre les uns et les autres près d'une cinquantaine d'Egyptiens ont été tués et pas moins de 100 autres blessés, dont plus de 10 dans un état grave. Le Président intérimaire a ordonné, pour sa part, l'ouverture d'une enquête. Pour la première fois aussi, depuis le début des manifestations en Egypte, la haute autorité religieuse du pays se met en marge de ce qui se trame dans le pays. Après avoir averti longtemps sur la dangerosité de la situation, le cheikh d'Al Azhar a décidé de «se mettre en marge et d'observer la neutralité». La décision du cheikh d'Al Azhar de «se mettre en retrait» jusqu'à la fin des violences a été accompagnée par la demande d'ouverture d'une enquête sur ce qui s'est passé. Le cheikh, Ahmed Al-Tayeb, qui avait apporté jeudi sa caution à la mise en place d'une «feuille de route» présentée par l'armée pour mener la transition, a annoncé à la télévision sa distanciation avec ce qui se passe en Egypte, exhortant les uns et les autres à arrêter l'effusion du sang des Egyptiens. La gravité de l'heure au pays du Nil est d'autant marquée par le retrait du parti salafiste Al Nour de toutes tractations avec le nouveau Président. Ces derniers ont qualifié de boucherie les évènements d'hier. La communauté internationale a exhorté les deux parties à plus de retenue. Berlin a exigé une enquête indépendante alors que l'UE demande aux parties de cesser toute provocation. Dans son communiqué, l'UE a appelé également à «la plus extrême mesure» et à «une fin immédiate des violences». Washington a condamné les appels des Frères musulmans à la violence et invite l'armée à faire preuve d'un maximum de retenue. Plus que jamais, les Egyptiens sont appelés à faire valoir la voix de la raison. La violence appelle la violence et le dérapage fatal n'est jamais loin. G. H.