Trente ans après l'introduction officielle des réformes dans le monde du sport, où en est la situation ? Pas trop sorcier la réponse ! Il suffirait de se rendre à la triste évidence dans laquelle se trouve le secteur, : une totale déliquescence qu'il serait honteux de ne pas admettre ou d'assumer par ses fossoyeurs, quelles que soient leurs bonnes intentions, si tant est qu'il en ont. Les réformes ont été décidées sur le seul critère de la volonté politique, une volonté politique importée parce que, est-il besoin de le rappeler, c'est plus par mimétisme, sans nul doute imposé à une époque, que par un choix dicté par des objectifs précis qu'aurait sous-tendu la recherche de l'émulation, l'obtention de résultats positifs et la notion de performance. L'Algérie a donc imprimé son modèle sur celui de l'Union soviétique, qui, pour les mêmes raisons évoquées pour notre pays, avait intégré dans son sillage d'autres pays satellites (Roumanie, RDA, Yougoslavie, Tchécoslovaquie, Bulgarie, etc.) qui fabriquaient des athlètes, à l'image des usines qui usinaient en série des Stakhanov. Les procédés ayant permis l'émergence de Cornelia Ender, Heike Dreschler, Alexeev, Sparwasser et ses coéquipiers de l'équipe de RDA sont aujourd'hui connus au même titre que ceux permettant d'obtenir un maïs transgénique. La réalité ci-dessus évoquée est confirmée par une chute payée cash au lendemain de l'effondrement de l'empire russe. En s'effondrant, le bloc de l'Est entraînait l'effondrement de tous les Etats qui étaient sous sa «protection» et, avec cet effondrement, était, dans la foulée, prononcé l'arrêt de mort des sportifs émérites, champions entre les champions, dieux et demi-dieux d'un Olympe frelaté. En Algérie, contrairement aux autres disciplines, seul le football a été sauvé, peut-être pour la simple raison que les entreprises économiques qui avaient parrainé les clubs de l'élite se sont quelque peu désengagées en douceur. La rupture a été effective et pour cause, parfois la liquidation même de l'entreprise concernée. La rupture a été aussi amortie par une prise en charge feutrée des pouvoirs publics par l'intermédiaire de subventions conséquentes à une époque et insignifiante aujourd'hui, dès lors que, dans d'autres réformes, comme si aucun enseignement n'avait été tiré des expériences passées, installant une forme de professionnalisme, les exigences des joueurs et, partant, des clubs, devenaient plus importantes et impossibles à satisfaire. Dans une logique linéaire, l'Etat ou les instruments des pouvoirs publics qui s'en réclament ont doublement fauté. Une première fois en décidant de prendre en charge les associations sportives dans le cadre du statut général du travailleur (SGT) et, ce faisant, promouvant des athlètes au rang de cadres d'entreprise, assurant leur salaire, leur bien-être social, leur réinsertion en fin de carrière ainsi que leur formation. Mais tout cela n'était qu'un leurre en réalité, sachant que l'organisation du secteur telle qu'elle était auparavant et sa prise en charge par des mécènes, des donateurs, des supporters, fonctionnait nettement mieux parce que la sincérité dans l'engagement des hommes prenait le pas sur toute autre considération. Une sincérité vite corrompue par la mise à disposition rapide de moyens, un déversement massif de sommes d'argent colossales, des attitudes dispendieuses et le peu de propension à assurer une traçabilité des fonds octroyés et de l'orthodoxie de leur gestion. Les clubs récupèrent leurs sigles après la réforme Des clubs comme le MCA, le CSC, le MCO, le RCK etc… sont devenus MPA, CMC, MPO, NARA et des clubs récupérés comme le MOC et l'USM Annaba, devenus par la grâce d'une mesure incongrue AJC et AJA et rapidement enrichis par la manne de l'Etat, reviendront à leurs origines dès que la première crise financière mondiale a lieu en 1986 et contraints de revenir à l'ancienne organisation. Sauf qu'entre-temps -parmi les puristes, sportifs et autres rêveurs désabusés, il était clair que nul ne risquait de reprendre les belles et honorables aventures- l'Algérie n'était plus cette Algérie déjà faussement opulente où tout le monde faisait semblant de travailler, le pays était autant happé par la crise évoquée… comme le reste de la planète pris dans le tourbillon de la mondialisation, le fléau terroriste venant ensuite brouiller toutes les cartes. Restituer aux masses, aux villes, aux cités, aux supporters… des clubs démunis parce que amputés des moyens sur lesquels ils avaient jusque-là vécu ne devenait alors qu'un cadeau empoisonné que d'aucuns, parmi ceux qui, par leur seule volonté, depuis l'indépendance et parfois bien avant, ont fait de la compétition ce qu'elle a été, jusqu'à ce qu'elle soit pervertie pour des raisons politiques… refuseront, sinon déclineront non sans une certaine forme d'élégance. Toutefois, des opportunistes allaient saisir toutes les occasions pour se bâtir une réputation, des fortunes et un avenir en se faisant les repreneurs de clubs illustres dont on mesure aujourd'hui la descente aux enfers. A. L.