Photo : Riad Par Abderrahmane Semmar L'Algérie a lancé officiellement jeudi dernier son Plan national pour l'enfance. Le renforcement de la promotion des droits de l'enfant à l'horizon 2015 est «l'un des objectifs majeurs de ce plan national», a déclaré à ce sujet la ministre déléguée chargée de la famille et de la condition féminine, Mme Nouara Saadia Djaafar. Lancé sous le thème de «l'Algérie digne des enfants», ce plan, confectionné avec le soutien de 20 secteurs ministériels, de 10 instances nationales et de nombreuses associations nationales en relation avec l'enfant, comporte également des mécanismes d'évaluation des politiques et programmes nationaux sur les différents domaines de l'enfance ainsi que les moyens de les améliorer. Outre ce plan, a précisé Mme Djaafar, le ministère s'attelle à la mise en œuvre d'autres programmes existants en collaboration avec les institutions nationales. Il s'agit du plan de communication pour la promotion de l'enfant, de la stratégie nationale de lutte contre la violence sur enfants et de la politique nationale des adolescents. Pour ce faire, le département de Mme Djaafar organisera des ateliers d'information et de formation pour faire connaître les droits de l'enfant. Il est prévu aussi dans ce sillage la publication de revues, de dépliants, en plus de l'élaboration d'un programme de diffusion de spots publicitaires. A ce propos, il convient de signaler que l'Algérie, en matière de protection de l'enfance, accumule les retards et peine à enregistrer la moindre avancée notable. Ce constat amer est dressé par l'ensemble des acteurs du milieu associatif engagés dans la lutte pour la protection des droits de l'enfant dans notre pays. «Nous sommes très en retard par rapport aux autres pays du monde dans la lutte contre les violences à l'égard des enfants. Notre législation doit absolument se renforcer et des mécanismes de protection de l'enfant doivent être mis en œuvre car, dans notre pays, l'enfant subit plusieurs violences et ce, depuis la décennie noire», a relevé à cet effet Abderrahmane Arrar, président du réseau NADA, réseau algérien pour la défense des droits des enfants. Et en dépit de ce plan national, qui a trop tardé à voir le jour, selon de nombreux observateurs avertis, les enfants en Algérie continuent de subir des maltraitances à tous les niveaux. Outre le problème de la déscolarisation, la délinquance juvénile et les violences sexuelles sont autant de fléaux qui touchent de plein fouet l'enfant dans notre pays. Il est à souligner sur ce chapitre que la Ligue nationale de la défense des droits de l'Homme (LDDH), suite à son enquête portant sur la réalité de l'enfance en Algérie, a révélé récemment des chiffres effrayants qui témoignent de la situation dramatique que vit cette frange fragile de la population. Il faut savoir qu'au moins 6% de nos enfants ne savent ni lire ni écrire. 10% ne sont pas scolarisés. Par ailleurs, plus de 1 800 000 enfants sont exploités dans différentes activités. Ces enfants exercent généralement dans le secteur des professions libérales où l'employeur échappe aux impôts en ne déclarant pas la nature de l'activité et le nombre d'employés. Aussi, une augmentation alarmante a été enregistrée sur le nombre des crimes commis par les mineurs des deux sexes. Preuve en est, 12 000 enfants sont jugés annuellement alors que, pour le premier semestre de cette année, on a recensé plus de 5 000 enfants sanctionnés par la justice. A signaler également que le code national de protection de l'enfance élaboré par le ministère de la Justice en collaboration avec le mouvement associatif n'a toujours pas été discuté à l'APN pour permettre son adoption officielle. Visant à mettre en place un mécanisme de protection des enfants contre toutes formes de violence, de mauvais traitement, de sévices et de négligence, ce code en est encore au stade de projet depuis 2005. Dans ce contexte, des juristes ont depuis longtemps montré du doigt la législation nationale qui n'est pas en totale conformité avec les principes et dispositions de la Convention internationale des droits des enfants, pourtant ratifiée par l'Algérie. C'est dire enfin que le Plan national pour l'enfance devra surmonter de nombreux obstacles, les tabous et la loi de l'omerta notamment, pour soulager l'enfance de ces maux dont elle souffre grandement. Une lueur d'espoir, certes. Mais les attentes sont grandes et les défis à relever sont surtout immenses.