«Je dédie le Ballon d'Or à ma famille,à mes coéquipiers,à Rabah Saâdane,à Mohamed Raouraoua et au président Abdelaziz Bouteflika» Madjid Bougherra a remporté hier le 9e Ballon d'Or du Buteur-El Heddaf haut la main. Le défenseur des Glasgow Rangers était tout heureux après cette consécration, qui était son rêve. Reçus dans sa chambre, «Magic» nous a livré ses impressions, surtout après avoir assisté à la précédente cérémonie, lorsque Rafik Saïfi a remporté ce trophée. Depuis, le Ballon d'Or était devenu son objectif personnel. Entretien. Qu'avez-vous ressenti après avoir reçu le 9e Ballon d'Or ? C'est une immense fierté. Recevoir le trophée du Ballon d'Or algérien était comme un rêve pour moi. Dieu merci, il s'est réalisé. Je tiens à remercier Le Buteur et toutes les personnes qui ont voté pour moi. Demain (NDLR : aujourd'hui), je me réveillerai tout heureux après cette consécration. Je dirai que c'est aussi celle de l'équipe nationale. Ma joie est immense parce que cette récompense est venue de mon pays. C'est une immense fierté d'être reconnu par les nôtres. Peut-on connaître votre réaction au moment de la remise du trophée ? Je ne vous cache pas, j'avais la chair de poule. C'était un moment fabuleux. Jamais je n'oublierai cette cérémonie. Après avoir assisté à la précédente cérémonie où Rafik Saïfi avait remporté le trophée, je me suis fait une fixation sur ce Ballon d'Or. A qui avez-vous pensé en premier ? Ma première pensée était pour ma famille, c'est-à-dire ma mère, mon père, ma femme et mes deux filles. J'ai songé aussi à mes coéquipiers en équipe nationale, qui m'ont beaucoup aidé, au staff technique, à sa tête Rabah Saâdane, au président de la FAF, Mohamed Raouraoua, au président de la République, Abdelaziz Bouteflika, qui a, lui aussi, contribué à cette qualification au Mondial, et enfin au peuple algérien. A tous, je dédie ce Ballon d'Or. En recevant le trophée des mains de Madjer, votre idole, quelle a été votre réaction à cet instant-là ? C'était une joie indescriptible. C'est vrai Rabah Madjer est mon idole, il est aussi adulé par tout un peuple. L'année dernière, je l'avais approché timidement, discutant à peine avec lui. Mais cette saison, j'ai eu le privilège de recevoir le trophée de ses propos mains, en compagnie bien sûr du directeur du Buteur et du représentant du président de la République. Sincèrement, vous avez fait le bon choix en désignant Rabah Madjer pour me remettre le trophée. Il était un excellent joueur, il a fait les beaux jours du football algérien. Peut-on savoir ce qu'il vous a dit ? Il m'a dit que j'ai progressé cette saison et cela m'honore beaucoup. Il a ajouté que je mérite ce trophée. Il n'a pas manqué l'occasion pour me souhaiter bon courage. C'est très aimable de sa part. Il est vraiment modeste. Abdelmalek Ziaya, qui sera avec vous lors de la CAN, a été lauréat du prix de Meilleur joueur du championnat d'Algérie pour ses nombreux buts marqués. Un commentaire… Ah, oui. Il le mérite. C'est un excellent joueur. J'ai vu ses vidéos et je pense que c'est un joueur de qualité. Il pourra donner le plus à la sélection. C'est clair. Il a sens du but, il en a marqué beaucoup cette saison, en plus il joue des deux pieds. Avec lui, je serai très à l'aise. Il y a aussi le meilleur buteur du championnat (NDLR : Messaoud), lui aussi est un bon joueur. Il a marqué de très jolis buts. Le fait de recevoir cette récompense quelques jours seulement avant la CAN et à quelques mois du Mondial ne constitue pas une lourde responsabilité pour vous ? Il n'y a aucun doute là-dessus. C'est une lourde responsabilité sur mes épaules. C'est tout le peuple algérien qui m'a décerné ce trophée ; de ce fait, je ne peux pas le décevoir. Maintenant qu'il m'a investi de sa confiance, il exigera encore plus de moi. C'est son droit. De mon côté, je lui promets de donner le meilleur de moi-même que ce soit lors de la CAN ou au Mondial. Après cette consécration, pensez-vous déjà à quitter votre club ? Pas du tout. Ce trophée est une source de motivation, il va m'aider sur le plan psychologique. Pour ce qui est de mon club, les Glasgow Rangers, j'ai un objectif de remporter avec lui le triplé, après le doublé de la saison dernière. Le stage de l'EN approche, ne craignez-vous pas de rater le début du stage, vu que vous avez des matchs très importants à livrer avec votre équipe ? Non, Il n'y a aucun problème concernant le stage de l'équipe nationale au Castelet. Je serai présent le 28 décembre. C'est avec un grand plaisir que je retrouverai mes coéquipiers. Sincèrement, j'attends le début du stage avec impatience. Revenons si vous le voulez bien sur l'affaire Lacen. N'a-t-elle pas perturbé le groupe ? Non, je ne pense pas. En tout cas, c'est une affaire qui ne nous concerne pas. Mehdi Lacen est le bienvenu à tout moment. Il aime l'Algérie et c'est de son droit de défendre les couleurs de son pays, tout comme nous. A mon avis, on est arrivés à un stade où il n'y a pas de place au sentiment. Que voulez-vous insinuer ? Les choses sont claires. Certes, il y a des affinités entre joueurs, mais je pense qu'on a atteint un stade où on n'a pas le droit de réfléchir avec les sentiments en sélection. Il y a ceux qui méritent de rester et ceux qui sont contraints de partir. Je pense que j'étais explicite avec vous. Soyez direct, est-ce qu'il peut donner un plus à l'EN ? Au début, je ne le connaissais pas. Je l'ai vu tout dernièrement. A mon avis, il peut donner le plus à la sélection. C'est un très bon milieu de terrain. Cela dit, ce n'est pas moi qui décide. Le fait de jouer en Espagne, cela veut dire que c'est un grand joueur. L'Espagne, ce n'est pas donné à n'importe qui. En plus, en équipe nationale, il nous manque un milieu de terrain gaucher. Avec son super pied gauche, je ne vous dis pas. Mais cela reste l'avis de Madjid Bougherra. Un commentaire sur le somptueux but de Nadir Belhadj dans les filets de Liverpool ? Ah, oui. Je l'ai vu en direct. J'étais dans le vestiaire. Eux, ils ont joué à 12h30 et nous à 15h. Donc, cet horaire m'a permis de suivre le match, et surtout ce but de Nadir. Sincèrement, c'est un grand joueur. Il a d'énormes qualités, seulement la chance n'était pas à ses côtés. C'est tout. Il est dans un club où l'entraîneur ne l'utilise pas beaucoup, mais il reste tout de même un grand joueur. Il est aussi très sérieux, Walah. Il est d'ailleurs tous les jours le premier à l'entraînement. Nadir ne vit pas un passage à vide. La preuve, sa meilleure réponse était ce but face à Liverpool. Peut-on dire que le match Algérie-Angleterre en Coupe du monde a déjà commencé ? Non, je ne le pense pas. Il est trop tôt de se prononcer. Certes, le but de Nadir va sans doute avertir les Anglais, mais nous, nous pensons tout d'abord à la CAN, avant le Mondial. On a une compétition continentale très importante qui va commencer dans quelques semaines et nous sommes décidés à faire bonne figure. Depuis le tirage au sort du Mondial, comment vivez-vous avec cette confrontation face aux Anglais ? Le plus normalement du monde. Je ne crains pas cette confrontation. Vous savez, les Algériens sont habitués aux grands rendez-vous. Prenez- l'exemple des matchs du Brésil et de l'Argentine. On s'est bien battus même si on avait perdu et les gens, en Algérie, étaient très heureux. Moi, personnellement, je pense que ce sera un match ordinaire. Cela va nous permettre de prendre part au match le plus normalement du monde. En coupe, ça change beaucoup. Il faudra aussi bien estimer les USA et la Slovénie. Est-ce que vous faites partie de ceux qui souhaitent préparer le match d'Angleterre face à une équipe britannique ? Oui, c'est une très bonne idée. Je pense que l'idéal pour nous, c'est de préparer l'Angleterre face à une équipe britannique. Ça va nous permettre d'étudier la manière de jouer des Anglais. Ce sera un apport considérable. Le fait que l'Algérie possède un grand nombre de joueurs qui évoluent en Grande-Bretagne, cela est-il un avantage pour les Verts ? Oui, bien sûr. On connaît les Anglais. Moi, par exemple, je connais les joueurs de la sélection anglaise un par un. Ce sera un grand avantage car je saurai les contrer. Idem pour les autres joueurs. Tout le monde est unanime à dire que l'Angleterre de Fabio Capello est un des favoris en force pour le sacre mondial... Je suis tout à fait d'accord avec vous. L'Angleterre est une grande équipe, elle renferme en son sein des joueurs de grands calibres. C'est l'archifavori pour remporter ce tournoi. Mais nous allons les affronter sans complexe. Vous allez avoir en face un étincelant Wayne Ronney. Etes-vous prêt pour cette mission ? Bien sûr que oui. Ronney est un très bon attaquant, il est vif et technique aussi. Même s'il est petit de taille, il est très fort. Contrairement à Peter Crouch, qui est fort physiquement et de grande taille. Donc, il y aura les deux extrêmes. Et pour la CAN, est-ce que vous croyez en les chances de l'Algérie ? Moi, je ne suis pas un défaitiste. Au contraire, j'irai en Angola pour remporter le titre. C'est clair. Seulement, ce n'est pas comme la Coupe du monde. Il faut l'avouer. La Coupe du monde est la plus prestigieuse compétition de la planète. On est motivé tout seul. La CAN, c'est une autre compétition. Elle va se dérouler dans un pays, où on aura peut-être un problème de climat. Bon, je ne sais pas combien il fera là-bas. En tout cas, on va préparer la Coupe d'Afrique au Castelet, c'est le bon choix, à mon avis. Ce centre va nous permettre de bien se préparer pour la CAN et bien se concentrer, vu le calme qui règne là-bas. Lacen a déclaré qu'il pourrait vous rendre visite au Castelet pour faire connaissance avec tous les joueurs. Votre réaction ? Il n'y a aucun problème. Il est le bienvenu parmi nous. S'il vient, il va découvrir l'esprit familial qui règne au sein du groupe. Il va se rendre compte qu'il est le toujours, comme je l'ai dit, le bienvenu. En tout cas, j'espère qu'il nous rendra visite. Après le coup de sifflet final du match de Khartoum, avez-vous réalisé à cet instant que vous allez disputer la Coupe du monde ? Sincèrement, non. Sur le coup, j'étais fou de joie, j'avais aussi la rage de gagner, après tout ce qu'on a enduré au Caire. Mais en regagnant la capitale, j'ai vu tout ce peuple. C'est à partir de là que j'ai réalisé que nous sommes qualifiés en Coupe du monde. J'ai senti une grande fierté et une joie immense. Chaque joueur veut disputer la Coupe du monde. Personnellement, c'était mon rêve d'enfance. Dieu merci, il a été réalisé. Quels sont vos objectifs personnels ? Mon objectif personnel, c'est de remporter le triplé avec les Rangers. La saison passée, j'ai remporté la coupe et le championnat, mais il manquait la Coupe de la ligue. Je sais que vous allez peut-être me poser la question sur mon avenir avec les Rangers. Il me reste deux ans de contrat et tout sera tiré au clair après la Coupe du monde. Sans oublier aussi que je veux prouver que je mérite le trophée du Ballon d'Or. Et avec la sélection ? Avec la sélection, je veux remporter la Coupe d'Afrique des nations avec l'Algérie et participer à la prochaine Coupe du monde, avant de raccrocher les crampons. Ainsi, j'aurais une carrière exemplaire. Entretien réalisé par Hamza Rahmouni Des secrets sur Bougherra Son plat préféré : «J'aime beaucoup le couscous avec du poulet, surtout celui de ma mère.» Sa musique préférée : «Le rap, le raï, le RNB.» Ses chanteurs préférés : «Dans le raï, j'ai un penchant pour cheb Billel, cheb Tarik et cheb Hassane. Je les admire beaucoup. Même les chansons de l'équipe nationale je les entends tous les jours.» Sa chanson de l'EN préférée : Bye- bye ya Shehata, bye- bye ! Qu'est-ce qu'il a fait avant le match de l'Egypte ? «A une semaine du match du Caire, j'étais en Ecosse et j'entendais beaucoup les chansons de l'équipe nationale. Antar Yahia a même ramené avec lui avant le match un CD du fameux film révolutionnaire La bataille d'Alger. On a vu le film et on avait eu tous la chair de poule.» Le personnage qui l'a marqué : «C'est Ali La Pointe. Il était le héros incontesté. Il m'a attiré par son courage. Il n'a pas voulu rendre les armes.» Sa série de films préférée : «J'aime beaucoup les films action.» Son acteur préféré : «Morgan Freeman.» Comment s'habille-t-il quotidiennement ? «Toujours après les entraînements, je me mets en tenue sportive, en survêtement sportif de marque Nike. C'est ma marque préférée, car c'est l'équipementier du club. Pour mes tenues classiques, c'est Dolce & Gabana.» Combien chaussez-vous ? «46, comme Zinédine Zidane. A l'étranger, je ne trouve pas de problème pour s'acquérir une paire, mais ici en Algérie je trouve des difficultés à en trouver.» La ville qu'il souhaite visiter un jour : «C'est Jijel, je n'ai jamais visité cette ville, alors qu'on dit beaucoup de bien. Il y a La Mecque aussi que je souhaite visiter.» Investir dans la formation des jeunes footballeurs algériens : «Oui, je compte investir pour aider les jeunes talents. Je compte faire une académie de football dans l'avenir.» Son joueur préféré du championnat : «C'est Yahia-Chérif, l'attaquant de la JSK. Il est pétri de talent.» Son club préféré : «Le FC Barcelone.» Où il était précisément dans le bus, lorsque ce dernier a été pris à partie par les supporters égyptiens ? «J'étais parterre en compagnie de Ghilas pour se camoufler et éviter les projectiles. Mais on n'avait pas eu peur, on était tous solidaires.» Qu'a-t-il ressenti après la fin du match Algérie-Guinée de juin 2007 au stade du 5-Juillet ? «C'était une immense frustration. On a déçu tout un peuple, surtout ceux qui étaient au stade. Sincèrement, c'est un mauvais souvenir que je veux oublier.» Hamza R.
