«Si l'Algérie passe au deuxième tour, elle aura son mot à dire» Henry Stambouli est l'entraîneur qui avait dirigé la sélection malienne lors de la Coupe d'Afrique 2004, en Tunisie, et qui a emmené les Aigles aux demi-finales et a vu la défaite des camarades de Diarra contre l'équipe marocaine. L'actuel entraîneur du club français Istres a accepté, en sa qualité de connaisseur du football malien, de nous donner son avis sur les camarades de Kanouté et ce qu'il pense des Verts et de la rencontre entre les sélections. * Bonjour Monsieur Stambouli, je suis journaliste algérien du quotidien Le Buteur. Je souhaiterais vous poser quelques questions sur l'équipe nationale d'Algérie… C'est avec plaisir que je répondrai à vos questions, d'autant plus que votre équipe sera sous les feux de la rampe lors de la prochaine CAN, vu son statut de mondialiste. Il faut s'attendre à ce qu'elle joue les premiers rôles. * L'Algérie affrontera le Mali, une équipe que vous connaissez très bien. Etes-vous au courant ? Absolument. * Comment voyez-vous cette rencontre ? Ce sera un match vigoureux, qui verra la confrontation de deux équipes avec des joueurs qui évoluent dans les plus grands championnats d'Europe. Nous allons assister donc à un amalgame de l'intelligence tactique d'Espagne, l'engagement physique de l'Italie et l'Angleterre, le réalisme français et allemand. Nous devons voir un spectacle royal sur le rectangle vert, et une bataille tactique entre votre entraîneur Saâdane et son homologue Keshi. Je voudrai parler à cette occasion de votre entraîneur… * Allez-y… J'admire la personnalité de Rabah Saâdane que j'ai découvert lors de la rencontre du Caire. Certains lui ont rapproché son calme avec ses joueurs lors du match retour contre l'Egypte, mais en vérité il a agi avec raison en évitant une pression supplémentaire à ses poulains après tout ce qu'ils avaient subi. Il était conscient que tout se jouera au Soudan, et c'est ce qui est arrivé. Je le félicite pour son caractère, il a été pour beaucoup dans la qualification de l'Algérie au Mondial. * Qu'est-ce qui pourrait renverser la tendance en faveur de l'Algérie face au Mali ? Une seule chose : la défense qui est trop lourde. Ce qui nous est arrivé lors de la CAN de 2004 contre le Maroc en est la meilleure preuve. En se qualifiant au dernier carré, tout le monde nous donnait comme favoris pour animer la finale, sauf que nous avions affronté une respectable équipe du Maroc, dont la mission de ses attaquants était de bien exploiter les erreurs de notre défense à l'époque. Ce qui nous a coûté une sévère défaite et quatre buts encaissés. * Vous avez évoqué le point faible du Mali, où réside alors son point fort ? Le milieu du terrain et l'attaque. Il suffit de jeter un œil sur la qualité des joueurs que possède Stéphane Keshi pour se rendre compte de ce que je dis. Des joueurs comme Kanouté, Seydou Keita et Mamadou Diarra sont des éléments de grand calibre, mais la défense sera le casse-tête du staff technique du Mali. L'Algérie pourrait donc inscrire plus de deux buts si elle met à profit ce point faible en sa faveur. Pour résumer la situation, je dirai que le Mali est un groupe d'individualités. * Pierre Lechantre nous a dit la même chose à ce sujet, c'est-à-dire que le Mali possède des individualités et non un groupe… Il connaît bien l'équipe du Mali et il n'a pas tort. L'équipe algérienne, en revanche, est devenue plus forte et plus soudée ; le jeu collectif et la solidarité sur le terrain sont ses points forts. Il y a maintenant un bon moment que les joueurs algériens jouent ensemble, c'est un atout pour l'Algérie qui devra réaliser une honorable participation en Angola. Cela dit, je n'ai pas oublié les incidents du Caire. * Avez-vous suivi ces événements ? Evidemment. Tout le monde est au courant de l'accueil catastrophique réservé à la délégation algérienne au Caire. C'est regrettable. Malheureusement pour les Egyptiens, et ceux qui étaient derrière ces agissements, l'agression des Algériens leur a donné plus de détermination et de volonté pour prendre leur revanche sur le terrain. Et je crois qu'aucune équipe ne pourra maintenant influencer cette sélection, après tout ce qu'elle a vécu au Caire. * Avez-vous une idée sur l'autre adversaire de l'Algérie, le Malawi, avant de parler de l'Angola ? Pour le Malawi, malheureusement, je ne connais rien sur cette équipe. Cela ne nous empêche pas de dire que sa présence en phase finale de la CAN n'est pas l'effet du hasard. Ses adversaires, dont l'Algérie, doivent la prendre au sérieux. Devant des adversaires pareils, Saâdane doit jouer l'offensive dès le début et marquer le maximum de buts. C'est la meilleure façon de respecter son adversaire. C'est aussi la clef de la qualification pour les quarts de finale. * Et qu'en est-il de l'Angola ? Vous savez, j'ai beaucoup travaillé en Afrique que ce soit au niveau des clubs ou des sélections. Je ne sais pas quand le continent africain se débarrassera du phénomène de la partialité des arbitres. On a concédé des défaites qu'on ne méritait pas à cause de l'arbitrage et attendez-vous à la même chose contre l'Angola. Les hommes en noir seront comme le douzième homme de certains de vos adversaires. * Ne pensez-vous pas que vous êtes un peu sévère avec l'Angola en liant ses exploits uniquement à l'arbitrage ? Non, ce n'est pas ce que je voulais dire. Lorsque je dis qu'il faut s'attendre à la partialité des arbitres, je ne diminue pas de la valeur d'une équipe qui renferme des joueurs qui font les beaux jours de grands clubs en Europe. Même l'entraîneur Jos Manuel est connu sur la scène footballistique mondiale. Mais qu'on le veuille ou non, la partialité de l'arbitrage sera présente d'une manière ou d'une autre, car il est inconcevable que l'Angola ne passe pas au deuxième tour. * Ce qui veut dire que les trois autres équipes se battront pour le deuxième ticket, n'est-ce pas ? Oui, c'est la logique du football. Le pays hôte est toujours favori pour se qualifier pour le deuxième tour. Et si vous me demandez mon avis sur la deuxième équipe qui l'accompagnera je dirai que les chances du Mali et de l'Algérie sont équilibrées. Même si le Malawi ne se contentera pas du rôle de figurant mais pour honorer sa participation. * D'après vous, qu'elle est l'équipe qui accompagnera l'Angola au deuxième tour, le Mali ou l'Algérie ? Je dirai l'Algérie. * Merci pour le compliment, mais pourquoi l'Algérie ? Ce n'est pas un compliment que je vous fais parce que vous êtes Algérien, mais je trouve anormal de penser autrement après ce que j'ai vu au Caire et à Khartoum. Je pense que c'est un devoir de donner à vos joueurs le minimum de respect qu'ils méritent, et je ne crois pas que le visage qu'ils ont montré va changer. L'esprit du groupe qui caractérise votre équipe fera la différence en Angola. * Quelle équipe croyez-vous capable de remporter le trophée ? Sans hésitation aucune, je dirai que ça se jouera entre la Côte d'Ivoire et le Cameroun, et un degré moindre entre les autres équipes qualifiées au Mondial, l'Algérie entre autres. Celle-ci aura son mot à dire si elle passe le premier tour. Cela sans diminuer de la valeur des autres équipes, puisque le football n'est pas une science exacte et la réalité du terrain est complètement différente. * Parlons du Mondial. Comment voyez-vous les chances de l'Algérie de se qualifier au deuxième tour ? Des chances importantes, à condition que les joueurs aient confiance en leurs capacités et jouent sans complexe. Mais j'ai un sentiment que vos joueurs n'auront peur de rien, du moment que la plupart viennent des meilleurs centres de formation d'Europe et se comporteront comme des professionnels avant tout. * Suivez-vous le championnat algérien ? Avant que je ne m'engage avec Istres, certains responsables m'avaient parlé de leur intérêt pour certains joueurs qui évoluent dans le championnat algérien afin de renforcer nos rangs. * Quels sont ses joueurs ? Je n'ai pas retenu les noms, malheureusement. * Et pourquoi vous ne les avez pas engagés ? A défaut des moyens financiers, en plus de la mentalité de certains présidents de club qui, dès qu'un club européen contacte l'un de leurs joueurs, se croient en position de force. Ce qui prive plusieurs joueurs doués d'un contrat professionnel. Pour l'intérêt du football algérien, ces présidents doivent changer de mentalité. * Quelle équipe soutenez-vous, l'Algérie ou le Mali ? L'Algérie et ne me dites surtout pas merci pour le compliment (il rit). * Un dernier mot ? Mes salutations au peuple algérien que je respecte beaucoup. Je souhaite bonne chance aux poulains de Saâdane lors de la prochaine CAN, je leur demande de jouer comme ils savent le faire ni plus ni moins. Entretien réalisé par Lyès F.