«Le Mondial se jouera sur de petits détails. Aux Algériens, je leur dis de ne pas se laisser impressionner par l'Angleterre et les Etats-Unis» Alain Perrin est un connaisseur du football algérien, en étant derrière la découverte de certains talents comme Karim Ziani. C'est lui qui avait donné la chance à l'ex-Mouloudéen Rafik Saïfi et l'ex-buteur de la JSK, Farid Ghazi, de jouer et s'illustrer à Troyes. Le désormais ex-entraîneur de Saint-Etienne connaît parfaitement le football du continent Noir, du fait de son contact avec plusieurs joueurs africains qu'il a eus sous sa coupe dans différents clubs français. Nous l'avons contacté pour avoir son avis sur la prochaine CAN et l'équipe d'Algérie, entre autres. * Tout d'abord, comment allez-vous monsieur Perrin ? Tout va bien, je suis en train de régler certains détails après mon départ de Saint-Etienne. Cela fait partie de la vie des entraîneurs. Aujourd'hui on est là, demain on se retrouve ailleurs, et ainsi de suite. * Nous voulons connaître votre avis sur la participation de l'Algérie à la Coupe d'Afrique en Angola… Avant de vous répondre, je voudrais d'abord dire que rater deux éditions de Coupe d'Afrique de suite n'est pas évident. C'est le cas de l'Algérie qui normalement de par son histoire et ses grands joueurs qui ont marqué de leur empreinte cette compétition doit être présente régulièrement à chaque édition, que ce soit au niveau continental ou mondial. Après sa double qualification, l'Algérie a retrouvé son lustre d'antan. Je crois que le spectacle et le suspense seront assurés avec la présence de l'équipe algérienne dont les résultats enregistrés jusque-là font d'elle une équipe solide et respectable qui fera des miracles, si elle est bien protégée. * Cela signifie que vous vous intéressez de près à notre Equipe nationale… Absolument, d'autant plus que j'ai beaucoup d'amis algériens. Après les scènes de joie de la communauté algérienne un peu partout en France, tout le monde a pris conscience des capacités de l'équipe d'Algérie. Il est cependant indispensable pour moi de suivre tout ce qui se passe dans le football au niveau mondial. Je dirai donc que j'ai suivi le parcours de l'équipe algérienne avec beaucoup d'attention. * Comment avez-vous accueilli la nouvelle de la double qualification de l'Algérie en Coupe d'Afrique et au Mondial ? Comme je l'ai déjà dit, l'Algérie possède une équipe respectable qui donnera de la joie au peuple algérien durant plusieurs années, si elle bénéficie de toute l'attention nécessaire. La qualification de l'Algérie au Mondial est logique et méritée. J'étais naturellement content, du moment que j'ai coaché certains éléments doués de votre équipe qui, j'espère, sera à la hauteur des attentes de son public. * Commençons par la Coupe d'Afrique, comment jugez-vous le niveau de cette équipe avant d'évoquer le groupe d'Algérie ? Franchement, il n'y a plus de place pour les faibles en Afrique, et je suis persuadé que tout le monde est d'accord avec moi sur ce point. Toutes les équipes se valent actuellement. Nous allons assister à une rude rivalité entre toutes les équipes présentes en Angola. La CAN bénéficie aussi d'une large et importante couverture médiatique, vu les noms des nations qui y participeront. On s'attend un tournoi relevé sur tous les plans. * Nous avons sollicité plusieurs techniciens connus sur la scène footballistique pour leur demander leurs avis sur le groupe de l'Algérie. Nous avons eu droit à différentes réponses ; qu'en pensez-vous, vous personnellement ? Tout est possible dans ce groupe. Mais il y a des priorités, à savoir le degré de pression que subira l'Algérie en tant que mondialiste, mais qui sera minime comparativement à la Côte d'Ivoire, au Cameroun, au Nigeria et au Ghana. L'Algérie, dans le même groupe de l'Angola est, de l'avis des spécialistes, l'une des équipes favorites pour remporter le trophée. * Cela veut-il dire que l'Algérie pourrait tirer profit de la pression que subira l'Angola ? La pression est une arme à double tranchant. L'Angola bénéficiera de l'avantage du terrain et de son public. Mais d'un autre côté, la pression du public angolais pourrait être fatale pour son équipe. L'Algérie pourrait exploiter cette donne, à condition que ses joueurs soient forts mentalement et psychologiquement. Ils se doivent aussi d'éviter certaines choses qui pourraient les pousser à passer à côté de leur sujet. * Des choses... comme quoi ? Ne me dites pas qu'on déroulera le tapis pour l'Algérie et qu'elle sera accueillie avec des fleurs. Les responsables de votre équipe doivent préparer les joueurs à affronter certains aspects négatifs de la compétition. Même si je n'ai aucun doute sur la force mentale et l'esprit de groupe qui caractérisent votre équipe qui est composée tout de même de joueurs professionnels qui jouent ensemble depuis un bon moment. * Le scénario du Caire pourrait-il se reproduire face à l'Angola ? Non, pas à ce point. Le match du Caire était une question de vie ou de mort pour l'Algérie et l'Egypte, alors que pour le match de l'Angola, je pense que les joueurs algériens auront leur destin entre leurs mains, d'autant plus qu'ils entameront la compétition contre le Malawi et tout dépendra de ce match. Il y a une possibilité de réaliser un résultat probant contre le Mali par la suite. Le dernier match contre l'Angola pourrait donc être une simple formalité pour vous. * Que pensez-vous du stage des Verts effectué en France, contrairement à certaines équipes qui ont opté pour des pays dont les conditions climatiques sont les mêmes qu'en Angola. C'est une question qui a suscité une polémique en Algérie… Il ne faut pas tomber dans le piège. Je crois que la décision d'effectuer le stage de préparation en France est sage sur tous les plans. Si l'Algérie avait opté pour un pays chaud, ça aurait été catastrophique pour vos joueurs. S'entraîner deux heures en France est tout à fait différent que de s'entraîner deux heures dans un pays africain. Ne me dites pas que la préparation de la sélection ghanéenne en Suisse n'a pas été étudiée. E plus de ça, la France est un choix judicieux sur le plan géographique, car elle est proche des pays où la plupart des joueurs algériens évoluent. * Vous pensez donc que le climat n'influencera pas sur les joueurs… Il est tout à fait normal que les conditions climatiques en France, ou en Europe en général, ne sont pas les mêmes qu'en Afrique australe dont la chaleur et le taux d'humidité sont trop élevés. Le plus important a été fait en France, et la réalité du terrain prouvera la vraie valeur de vos joueurs. L'intelligence dans le jeu aura un rôle important aussi. Il faut savoir gérer les minutes des matches dans des conditions climatiques très difficiles. * Quelles sont les deux équipes qui passeront, à votre avis, au deuxième tour ? L'Angola est le favori numéro un, le deuxième ticket se jouera entre l'Algérie en tant que mondialiste et le Mali qui possède de grands joueurs, à un degré moindre le Malawi. Il faut s'attendre aussi à une surprise concernant la deuxième place du groupe. * Il y a deux joueurs en Algérie que vous connaissez parfaitement, n'est-ce pas ? Vous faites allusion à Saïfi et Ziani, ce sont deux joueurs doués parmi les ceux que j'ai dirigés à Troyes. * Comment voyez-vous leur rendement lors de cette CAN ? Sans diminuer de la valeur de leurs camarades, à l'instar de Yebda, Abdoun, Belhadj, Bougherra, Meghni et les autres, je dirai qu'ils apporteront leur touche à la prochaine Coupe d'Afrique. Il est vrai que le rendement de Saïfi a régressé par rapport aux années précédentes, mais sa longue expérience des terrains pourrait faire la différence dans une ou deux actions seulement. Ziani, qui est sur une courbe ascendante, sera un atout majeur pour les Verts. S'il joue sur sa véritable valeur, aucune équipe ne sera capable d'arrêter l'Algérie. * En ce qui concerne la Coupe du monde, croyez-vous que le tirage au sort a été clément pour l'Algérie sachant qu'elle affrontera l'Angleterre, les Etats-Unis et la Slovénie ? On ne peut pas répondre à cette question pour le moment. La Coupe du monde est loin, car les données en football changent d'une seconde à une autre et le niveau d'un joueur risque de progresse ou de régresser d'un moment à l'autre. Vos joueurs ne doivent pas penser au Mondial, mais se concentrer uniquement sur le présent. Cela dit, le Mondial se jouera sur de petits détails. Si je dois donner un conseil à l'Algérie, c'est de ne pas se sous-estimer et ne pas se laisser impressionner par l'Angleterre ou les Etats-Unis, mais avoir confiance en ses capacités. * Seriez-vous tenté par l'Equipe nationale algérienne ? L'équipe algérienne est bien structurée et toutes les conditions de travail ont été mises en place. Ce sont des choses qui encouragent n'importe quel entraîneur pour tenter une aventure avec cette sélection. * Que voulez-vous dire en guise de conclusion ? Je suis très honoré de m'adresser à votre journal Le Buteur que je respecte beaucoup. Aussi, je voudrais adresser mes salutations à tous les Algériens et je souhaite plus de progrès et de prospérité pour votre football qui mérite d'être présent dans toutes les compétitions mondiales. Entretien réalisé par Lyès F.