Neveu de Jean-Marc Guillou, fondateur de la société JMG, Olivier Guillou participe à la troisième aventure de sa carrière dans la conduite d'une Académie du football. Neveu de Jean-Marc Guillou, fondateur de la société JMG, Olivier Guillou participe à la troisième aventure de sa carrière dans la conduite d'une Académie du football. Chaleureux et très communicatif, il réussit à faire passer le message auprès des enfants de l'Académie du PAC, leur inculquant des bases technico-tactiques révolutionnaires dans notre pays. A la fin d'une séance d'entraînement, il a aimablement accepté d'évoquer son travail en Algérie, entouré de ses gosses et de son adjoint, Djamel Aïch.
Qu'est-ce qui a motivé votre décision de tenter l'aventure en Algérie ? J'ai commencé au sein de l'Académie de l'ASEC Mimosa à Abijan, puis je suis parti à Madagascar pour y ouvrir et y diriger une Académie de football. J'ai passé 7 années merveilleuses là-bas en accomplissant du bon travail et j'espère que ce travail se poursuivra. Je sais que l'Académie créée là-bas a été championne cette année, ce qui prouve qu'il y a du talent. Là, je suis à Alger pour diriger la formation au sein de l'Académie que la société JMG a ouverte en partenariat avec le Paradou AC. Ce qui m'a motivé à venir ici est surtout le potentiel qui existe ici en Algérie. Non pas qu'il n'y a pas de potentiel dans d'autres pays, mais le football en Algérie est culturel. Ce qui m'a aussi encouragé à venir ici est la proximité de la France car ma fille vit là-bas. C'est donc plus facile pour moi d'y aller que lorsque j'étais à Madagascar. Il y a aussi le désir de découvrir un nouveau pays, une nouvelle culture, de nouveaux enfants. Lors de la phase de prospection, est-ce que vous trouvé la qualité brute recherchée ? Comme la période de prospection s'étale sur deux ans, nous avons pu superviser environ 20 000 enfants. Nous sommes allés deux fois à l'Est et à l'Ouest, nous sommes également partis au Sud, sans compter la prospection sur Alger. Il y a eu une présélection, puis un stage pour choisir les meilleurs. On cherche les joueurs qui apportent quelque chose en plus. Je crois qu'on n'a pas à se plaindre car, sur les 16 qu'on a pris, on ne s'est pas trompé. En formateur avisé et expérimenté, pensez-vous avoir de la matière brute pour former de futurs bons joueurs, pour ne pas dire très bons joueurs ? Oui, même si je dis qu'il ne faut pas se griser un peu vite. Il faut avoir un discours cohérent et ne pas dire aux enfants : vous allez y arriver ! Le discours qu'il faut leur tenir est qu'ils ont beaucoup de travail à faire, surtout qu'ils n'ont accompli qu'un an et demi sur les 7 ans de travail complet de formation. Il y a réellement de bons joueurs. J'irai même jusqu'à dire qu'il y a de futurs grands joueurs. Abdallah El Moudene, dont tout le monde a remarqué le talent, en fait-il partie ? Oui. L'avantage de Abdallah est qu'il est plus costaud que les autres. Il allie donc la qualité technique à la qualité physique. Il a 20 centimètres et parfois 20 kilos de plus que ses camarades. C'est également le plus âgé du groupe. Aujourd'hui, tout le monde parle de lui car c'est le métronome de l'équipe, celui qui distribue. Cependant, je suis impatient de voir comment vont évoluer certains petits, comme Raouf Benguit ou Zaki. Cela dit, j'ai tellement vu de jeunes joueurs qui avaient beaucoup de talent et qui ne sont pas arrivés... En fait, en plus du talent, il faut voir ce qui se passe dans la tête. Justement, est-ce que vous veillez à ce qu'ils ne prennent pas la grosse tête et qu'ils ne soient pas perturbés par d'éventuelles sollicitations ? Absolument, car cela fait partie de la philosophie de l'Académie au niveau de la formation. L'objectif est de prendre des enfants qui ont du talent et de faire d'eux des hommes. Pas seulement des footballeurs, mais des hommes avec des têtes pleines et des vraies valeurs. Quel que soit leur avenir footballistique ou professionnel, il faut qu'après le football ils puissent faire quelque chose. Pouvez-vous expliquer au public algérien pourquoi les enfants s'entraînent et jouent pieds nus ? C'est surtout pour une question de handicap physique. Comme ils ne sont pas bien lourds (il y en a, quand ils sont rentrés, qui pesaient 27 kg), si on ajoute 300g à chaque pied, ce serait un handicap supplémentaire. Donc, ils vont beaucoup plus vite pieds nus. Et puis, jouer pieds nus améliore la sensibilité et le rapport avec le ballon. Le fait de jouer sans gardien de but est-il une manière de leur apprendre à défendre seuls ou c'est parce que l'Académie n'a pas pour vocation de former des gardiens de but ? D'un, on n'a pas de gardiens de but. Et de deux, nous apprenons ainsi aux enfants à défendre haut. Dans la méthodologie, mieux vaut défendre en avançant plutôt qu'en reculant. Dès la perte du ballon, les enfants se mettent à presser le porteur du ballon. Ce n'est pas que je leur conseille de jouer sans gardien de but, mais je leur apprends à défendre ensemble. Il y a, paraît-il, des degrés d'apprentissage... En fait, il s'agit d'une succession de séquences de mouvements avec ballon à exécuter et à réussir par tous les élèves. C'est en trois degrés. Celui qui atteint le 1er degré pourra mettre les souliers. Le partenariat avec le PAC vous satisfait-il ? Absolument. D'ailleurs, nous sommes condamnés à tirer tous dans le même sens car nos intérêts nous y obligent. La société JMG contribue au financement de l'Académie, même si c'est d'une manière différente que le PAC. Il y a une grande complicité dans la gestion et on nous donne tous les moyens nécessaires. Cela dit, la société JMG est seul décideur dans le domaine technique. Il n'y a pas d'ingérence du PAC dans le choix des joueurs. Ne trouvez-vous pas des difficultés à communiquer en français avec les enfants ? Non, ils comprennent bien généralement. Lorsqu'ils ne comprennent pas, il y a mon adjoint Djamel, qui vient de Constantine, pour faire le relais. Certains comprennent bien le français, mais certains autres moins. Espérez-vous sortir un jour des Madjer ou des Belloumi ? Pourquoi pas ? Si leur évolution se poursuit au même rythme, il y a assez de talents pour permettre d'ici 7 ans, non pas d'oublier les gloires du football algérien, car il ne faut pas oublier l'Histoire, mais d'arrêter de toujours vivre là-dessus car cette génération ne rejouera plus jamais au football. Il est temps de faire confiance aux jeunes. Que manque-t-il donc au football algérien pour avoir à nouveau des joueurs de haut niveau ? Je connais un peu l'histoire de l'Algérie car je m'informe. Je sais que votre pays est passé par une période difficile durant laquelle il était difficile de travailler. De plus, les présidents de club actuellement cherchent uniquement les résultats, et vite. Ce serait difficile avec des enfants. Et puis, ce n'est pas parce qu'on paye cher un joueur qu'il est bon ! Moi, je ne trouve pas bizarre qu'on le paye s'il est bon, mais c'est anormal de le payer cher lorsqu'il n'est pas bon. Lorsqu'un joueur est moyen, il reste moyen. Ce n'est pas l'argent qui va doper son talent. Ce qui manque en Algérie, c'est le travail avec les jeunes et la patience. On me dit souvent qu'il manque des terrains, mais je ne suis pas d'accord car j'ai constaté qu'il y en a beaucoup plus qu'en Côte d'Ivoire ou au Sénégal. Entretien réalisé par Farid Aït Saâda et Badreddine Djaafar