Entre 1976 et 1985, deux joueurs ont marqué l'histoire de ce derby. Un du Mouloudia et un autre de l'USMA. Le Mouloudéen est incontestablement, Ali Bencheikh, de par ses dribles, a donné une saveur particulière à ce derby. Il aura ainsi fait des misères aux défenseurs usmistes, qui ne sont pas prêts à l'oublier de sitôt. L'Usmiste, c'est Nacer Guedioura, l'homme qui a failli priver le Doyen du titre de champion d'Algérie en 1976, après avoir offert une victoire inespérée aux Rouge et Noir, face à la grande équipe du Mouloudia, et l'attaque des B. Nacer Guedioura a été à maintes reprises le bourreau du vieux club algérois. Autrement dit, après une domination à sens unique des Mouloudéens, voici un attaquant qui est venu faire des misères à Zenir, Mahiouz, Azzouz et les autres où il a marqué quatre buts. C'était aussi un bagarreur, qui faisait peur aux défenseurs. Bencheikh, avec sa technique, était presque devenu la bête noire, au point où on voulait l'éviter sur le terrain. Deux grands joueurs ayant marqué l'histoire de ce derby, parlent du match, c'est vraiment passionnant. Bencheikh : «J'ai battu l'USMA comme entraîneur et comme joueur» Ali, parlez-nous du derby MCA-USMA durant votre époque... Il n'y a pas photo par rapport au derby d'aujourd'hui. A notre époque, c'était comme le Ramadhan, on s'y préparait un mois avant. Il y avait une motivation spéciale surtout qu'il y avait à l'époque beaucoup de joueurs, enfants du club. Donc, il fallait qu'on gagne, c'est contrairement à aujourd'hui. Il y avait une ambiance exceptionnelle, notamment dans les quartiers populaires car dans toute la capitale, il y a Mouloudéens et Usmistes, même si nous sommes majoritaires (rires). Et l'ambiance entre les joueurs ? C'était formidable. On était des amis. Que ce soit un joueur du Mouloudia ou de l'USMA, on était tous des amis et des frères. Sur le terrain, on ne se parlait pas car chacun de nous cherchait la victoire, mais en dehors on était souvent ensemble. D'ailleurs, ça m'est déjà arrivé qu'après un MCA-USMA, on est sortis manger ensemble et il y avait des joueurs des deux clubs. C'était vraiment formidable. Y avait cette pression sur vos épaules ? C'était une pression positive. Les supporters voulaient à tout prix la victoire. Nous, on ne pensait qu'à nos fans pour les rendre heureux. C'était d'ailleurs le charme de ce derby. Lequel des derbys vous a marqué ? Sincèrement, un derby m'a marqué mais dommage je n'ai pas joué, je n'étais même pas sur le banc de touche. C'est incontestablement la finale de la Coupe d'Algérie de 1973. J'étais sur la main courante, les gars les ont dominé et sur un large score. On avait remporté la Coupe d'Algérie aux dépens du voisin et du frère ennemi. Et les derbys que vous avez joués... Il y a celui de 1985 au stade du 5-Juillet lorsqu'on les a balayés sur le score sans appel de quatre buts à un. Cette saison-là, le derby s'est joué en D2 et nous avons gagné. J'avais même inscrit un but et Bousri avait marqué un doublé. On a dominé l'intégralité de la rencontre. Beaucoup parlent du fameux 4-4 de Coupe d'Algérie en 1982, Est-il réellement le meilleur match entre les deux équipes ? Oui, c'est vrai, ça reste un des meilleurs matchs car les deux équipes étaient au rendez-vous. Il y avait huit buts. C'était aussi un match plein de rebondissements. Je me souviens qu'on avait été menés au score, puis on a pris l'avantage avant d'être menés par 4-3. Si ma mémoire est bonne, c'est Mahiouz qui a égalisé durant la prolongation. Durant les années 70 et 80, vous étiez leur bête noire ? Oui, exactement. On était leur véritable bête noire. D'ailleurs, ils avaient peur de nous à chaque match. On avait la grande équipe même si eux aussi, ils possédaient de bons joueurs. Notre ligne d'attaque crachait le feu. On leur marquait beaucoup de buts. Le derby, c'est bien de le jouer à Bologhine ou au 5-Juillet ? Pour moi au 5-Juillet, pour permettre aux supporters des deux clubs d'être nombreux. A Bologhine, le stade à notre époque nous était acquis à plus de 80%, ce qui est tout à fait logique car on était la meilleure équipe d'Algérie. On n'entendait pas beaucoup les supporters de l'USMA. Quel était votre sentiment lorsque vous perdiez le derby ? On était triste notamment pour nos supporters. Ils n'acceptaient pas la défaite face à l'USMA. On était tous des gars du même quartier, il y avait les taquineries. On avait une grande tristesse après chaque défaite car nos supporters étaient déçus. Il y avait une pression sur vous après chaque défaite comme maintenant ? Non, jamais. Maintenant, c'est la jungle. A notre époque, il y avait le respect. Vous avez aussi dirigé un match comme entraîneur du Mouloudia en 1996... Oui et je les ai battus comme joueur et entraîneur. J'ai bien motivé les joueurs et la présence de Lazizi ce jour-là, qui était le capitaine, nous a aidés car il a motivé les joueurs et montré la voie à ses coéquipiers, en sa qualité d'enfant du club. Lequel des joueurs de l'USMA vous faisait des misères ? Incontestablement, c'est Nacer Guedioura. Il était très fort et il nous a marqué des buts. Votre message aux joueurs ? Je leur demande de jouer au football, leur vrai football et surtout de penser aux supporters et leur faire plaisir. La victoire, ils doivent l'offrir à nos supporters. Un message à Casoni... Il a tout mon soutien, qu'il continue à travailler et faire progresser notre cher club. Guedioura : «Suite à notre victoire en 1976, le Mouloudia a failli perdre le titre» Qu'est-ce que ça vous rappelle le derby MCA-USMA ? C'est le derby numéro 1 d'Algérie. Il regroupe les deux grands clubs de la capitale. C'est un plaisir de jouer une telle rencontre, dans la mesure où il y a une ambiance impeccable. On le préparait bien avant pour essayer de gagner et faire plaisir aux supporters car ils étaient trop exigeants. Ils ne cherchaient que la victoire face au Mouloudia. Beaucoup disent que durant les années 70 et 80, le derby avait un charme particulier... Oui, effectivement. Le derby avait une saveur particulière. On était tous des amis. On sortait même ensemble avant les matchs car on était issus du même quartier. A l'époque, il y avait la Casbah, Bab El Oued et Soustara d'où beaucoup de joueurs étaient issus. Différent par rapport à aujourd'hui ? Oui, évidemment. Ça n'a rien à voir. Les derbys d'aujourd'hui connaissent beaucoup de dépassements. A notre époque, dans les gradins, il y avait des gens mûrs et responsables. Aujourd'hui, il y a beaucoup de gamins dans les tribunes. C'est pour cela qu'il y a des dépassements et un peu d'excès. Vous avez la particularité d'avoir battu le voisin et offert la victoire à l'USMA, l'année où le Mouloudia a remporté le triplé... Exactement, je me souviens de ce match. J'avais réussi à marquer le but de la victoire. Cette défaite a fait beaucoup de mal au Mouloudia car il a failli ne pas remporter le titre, si ce n'était l'USMA qui a battu le NAHD. Les Mouloudéens ne s'attendaient pas à cette défaite. Je vais vous raconter même une anecdote sur ce match. La veille de la rencontre, on était tous ensemble dehors. On était avec des joueurs du Mouloudia et on avait mangé ensemble. On n'avait pas parlé football. Vous êtes aussi réputé d'être le bourreau du Mouloudia en inscrivant des buts importants... Durant notre époque, il n'y avait pas de statistiques. On jouait pour gagner et pour faire plaisir à nos supporters. Moi, mon frère est un Mouloudéen, mon père aussi. On a vécu le derby à la maison. Je jouais le match pour gagner. Ali Bencheikh a déclaré que vous leur aviez fait des misères... S'il l'a dit, c'est qu'il sait bien. De plus, il a vécu lui aussi le derby. C'est un gars de mon quartier et on était des amis. Vous avez trouvé des difficultés face à Bencheikh... C'était un bon joueur, mais on trouvait parfois des difficultés face à toute l'équipe du Mouloudia. Il avait une bonne équipe. Mais le Mouloudia était votre bête noire... Non, c'était psychologique, après nous avons réussi à renverser la tendance et battre le Mouloudia. Durant les années 70, le Mouloudia avait une grande équipe certes, mais on avait parfois dominé les débats. Je me souviens une fois qu'on était à 0-0 et Bousri avait marqué le but de la victoire à quelques secondes de la fin du match, alors qu'on avait dominé l'intégralité de la partie. Durant le début des années 70, le Mouloudia a dominé une petite période puis c'est devenu psychologique. Les finales de 71 et 73 perdues à cause du match de demi-finale, les blessés, les suspendus et même Chalabi avait été privé de la finale de 1973 parce qu'il avait joué la finale militaire avec la Gendarmerie. Mais je peux vous dire qu'en junior, on les battait sur de grands scores même. On garde de vous votre bagarre avec Wahab Zenir lors du fameux match de coupe de 1982... C'était juste pendant le match mais Zenir était un bon ami et il restera toujours un ami. On était des amis, des frères, mais sur le terrain, chacun voulait gagner. C'est tout. Un message aux joueurs ? Il faut donner une belle image du derby et bien se comporter sur le terrain. C'est mon appel aux joueurs des deux équipes pour éviter les dépassements.