Ronaldinho : «C'est grâce à Benhamou que j'ai connu l'Algérie» Même titulaire à part entière dans l'un des clubs les plus populaires et médiatisés du pays, Mohamed Benhamou est un homme très discret voire même effacé. C'est que Momo préfère s'exprimer sur le terrain où ses prestations lui ont valu l'estime des très exigeants Chnaoua. Lorsque nous avons été reçus par Benhamou chez lui à Bouzaréah, nous avons découvert un homme prolixe. Momo a jugé que l'heure de son bilan dans le championnat algérien a sonné et il choisit Le Buteur pour le dresser. «J'ai commencé arrière gauche» Né à Paris le 17 décembre 1979, Benhamou a signé sa première licence au Red Star, mais en tant qu'arrière gauche. «C'est vers l'âge de 11 ans que j'ai commencé à prendre du plaisir dans les buts, mais j'avoue que mes débuts comme joueur de champ m'ont servi, car je peux me targuer aujourd'hui d'avoir un bon jeu de pied, une qualité essentielle pour un gardien de but moderne», nous a expliqué Benhamou en enchaînant : «Dans mon quartier de la banlieue parisienne, je continuais à jouer arrière gauche, mes voisins et amis ne savaient même pas que j'étais gardien de but du Red Star.» Toujours peu loquace le Benhamou. C'est Luis Fernandez qui viendra le chercher au Red Star en 2000 pour le mettre dans le centre de formation du PSG. Une équipe connue pour le peu d'intérêt qu'elle accorde aux jeunes. Pourtant et deux ans après, il a réussi à signer son premier contrat pro. «A l'époque, on était 3 seulement à avoir signé en pro : Loïc Cana, Selim Benachour et moi», raconte Benhamou. «Sortir du centre de formation et signer pro à Paris était presque un exploit surtout pour un natif de Paris comme moi. Dès que j'ai commencé à côtoyer les grands joueurs comme Pauleta, Rothen, Heinze, Sorin, Pochettino qui était capitaine de l'Argentine et les autres, je devenais plus ambitieux. Je voulais devenir comme eux et ne plus me contenter de les regarder jouer. Pour ma première année, on finit 2es du championnat et on gagne la Coupe de France avec Halilodzic, mais j'étais frustré car je me sentais capable de jouer.» «Les arts martiaux, c'était pour me défendre en banlieue» L'une des qualités de Benhamou, c'est sa souplesse et son explosivité. Des qualités travaillées dans les salles d'arts martiaux à Paris. Benhamou nous explique pourquoi il l'a fait : «J'ai pratiqué le judo et la boxe thaïe, mais ce n'était pas pour soigner ma souplesse, c'était plutôt pour me défendre. On se battait comme tout le monde et il fallait bien se défendre. J'ai donc pratiqué le judo et la boxe thaïe en même temps que le foot. Finalement, je n'ai pas eu tort de le faire, les arts martiaux m'ont permis de ne pas avoir peur des contacts sur un terrain de foot.» Même s'il a vécu en banlieue, Benhamou a parfaitement su assumer sa double culture française et algérienne, comme il nous l'a appris : «Avoir une double nationalité, c'est avoir une double culture et c'est une grande chance pour nous les bi-nationaux. Il ne faut donc pas focaliser sur un club et oublier l'autre. Chez moi, ma mère et mon père parlent algérien, c'est dire que lorsque je rentrais à la maison, c'était comme si je rentrais au bled, car tout ce que nous faisions était algérien. C'est cela qui m'a permis de me sentir algérien et c'est l'équipe nationale qui a consolidé en moi tout cet amour pour l'Algérie.» Ronaldinho : «C'est grâce à Benhamou que j'ai connu l'Algérie» Lorsque nous avons réussi à nous rapprocher de Ronaldinho à Barcelone en avril 2005, la première chose que la star brésilienne nous avait dite était : «Vous Algérien ? Si vous connaissez Benhamou, passez lui le bonjour, car c'est grâce à lui que j'ai connu l'Algérie, c'est un bon ami.» Momo prend ça d'une façon détendue et nous explique pourquoi : «A Paris, j'étais peut-être remplaçant, mais j'y ai quand même passé 5 ans. Le Camp des Loges, c'était mon jardin. Donc toutes ces stars qui arrivaient étaient des invités pour moi. J'avais pour mission de les accueillir et les mettre à l'aise. Ronaldinho était un ami. Lorsqu'il voulait se balader à Paris, il venait vers moi, car je connais bien la ville. Dès le départ, une amitié est naturellement née entre nous. Tout le monde voit en lui un fêtard qui n'arrête pas de rigoler, mais je vous assure qu'il n'a rien à voir avec cette réputation. Il a par exemple de grandes valeurs familiales. Pour lui, la famille c'est sacré. La preuve, il ramène sa mère avec lui dans tous les clubs où il signe. Ses frères et ses sœurs sont souvent là. D'ailleurs c'est ce qu'il appréciait chez moi. De plus et malgré tout son talent, il bossait beaucoup à l'entraînement, il lui arrivait même de me solliciter pour des tirs au but, même après la séance. A chaque fois, il me demandait des choses sur mon pays, par la suite lorsque je venais en sélection, il me demandait toujours le résultat du match de l'Algérie.» «A Paris, c'est le nom de Dahleb qui revenait le plus» Avant Benhamou, beaucoup d'Algériens ont joué au Paris Saint-Germain. Mustapha Dahleb, Salah Assad, Ali Benarbia et Djamel Belmadi. Mais selon Benhamou, celui qui a marqué de son empreinte l'histoire du club parisien, c'est sans aucun doute Mustapha Dahleb. «Celui qui ressort le plus, c'est Mustapha Dahleb, un véritable monument à Paris. A chaque fois qu'on fait l'équipe type depuis la création du club, il y est toujours. Il y a également Ali Benarbia qui est arrivé à Paris en étant déjà une star après ses passages à Monaco et Bordeaux et Belmadi qui a réussi à jouer pro après être sorti du centre de formation», nous raconte Benhamou qui n'a pas eu la chance de voir à l'œuvre Moumousse. Même à Cannes où il n'a joué qu'en National, Benhamou essaye de positiver : «Après la frustration parisienne, j'ai trouvé refuge à Cannes en réalisant une saison pleine, même si l'objectif de l'accession n'a pas été atteint en raison d'un effectif tout juste moyen. Vraiment, je ne regrette pas mon passage à Cannes, l'équipe qui a formé les Zidane, Vieira et Micoud.» «La pression du Mouloudia est plus forte que celle du PSG» Les deux ans passés en Algérie ont permis à Benhamou de découvrir le pays de ses parents. Parmi les choses qui l'ont vraiment impressionné, il dira : «La ferveur qui entoure les clubs de foot, ce côté chauvin qui n'existe pas en France. Pour moi, la pression du Mouloudia est largement supérieure à celle du PSG qui est pourtant un club hypermédiatisé et je suis bien placé pour en parler puisque j'ai joué dans les deux clubs. Sur un autre plan, la première chose qui a attiré mon attention et fait plaisir, c'est le fait d'entendre El Adhan 5 fois par jour. Lorsque j'ai fait mon premier Ramadhan en Algérie, j'ai regretté de ne pas l'avoir fait plus tôt. Toute la vie est adaptée à ce mois, l'entraînement le soir et tout. Le Ramadhan, on le sent en Algérie. En France, à la limite je me cachais pour le faire.» L'Algérie a plu à ce point à Benhamou ? «Sincèrement, je n'ai pas trouvé des choses négatives. Peut-être la lenteur des gens, surtout sur le plan administratif, mais ça fait partie du décor.» Benhamou est sincère, car il n'a pas hésité à ramener sa famille : «Ma fille aînée est inscrite à la crèche d'en bas, ma femme est très à l'aise avec tous les voisins. Non vraiment, je me sens bien ici.» «Si Lacen ne vient pas, il sera le perdant, pas l'Algérie» En voyant tout l'amour que voue et exprime Benhamou pour l'Algérie, on est un peu déçu que des joueurs comme Mehdi Lacen hésitent encore à s'engager pleinement pour l'équipe nationale. Là encore, Momo essaye de prendre les choses du bon côté : «Il ne sert à rien de lui mettre la pression, mais pour se persuader que l'équipe d'Algérie est un bon challenge, il n'a qu'à voir tous les grands joueurs qui y sont, à l'instar de Ziani, Belhadj, Bougherra et les autres. S'il joue en Liga espagnole, c'est que forcément c'est un grand joueur. Mais si à la base il n'a pas envie de jouer pour l'Algérie, ça ne sert à rien de le forcer à le faire, car on a beau être le meilleur joueur du monde, on peut rien faire sans envie. La décision doit lui appartenir à lui et à personne d'autre. S'il vient, c'est tant mieux pour tout le monde, s'il ne vient pas il sera le perdant, pas l'Algérie.» M. S.