«Si j'ai été sélectionné 25 fois seulement avec l'Algérie, c'est parce que j'avais des rendez-vous très importants avec mon club» La semaine dernière, l'équipe de Lekhwiya a créé la sensation au Qatar en devenant le premier club dans l'histoire du pays à remporter le championnat de première division l'année de son accession. Au passage, le promu a mis un terme à l'hégémonie d'Al Gharafa, qui restait sur trois sacres consécutifs de champion. Ce premier titre dans l'histoire de Lekhwiya doit beaucoup à son entraîneur algérien Djamel Belmadi. Interviewé en exclusivité par FIFA.com, l'ancien milieu de terrain de l'Olympique de Marseille revient sur le parcours atypique de Lekhwiya dans la Stars League 2010/11, et évoque ses ambitions pour le club ainsi que ses espoirs pour le football algérien. Vous venez d'entrer dans l'histoire avec Lekhwiya. Qu'est-ce qui a rendu cet exploit possible ? C'est ce que tout le monde se demande ici ! Comment un promu peut-il remporter le championnat de première division dès sa première année parmi l'élite ? Derrière cet exploit, il y a bien sûr plusieurs raisons. Je crois que c'est le professionnalisme et la détermination de toutes les personnes concernées, des dirigeants aux joueurs en passant par l'encadrement technique, qui ont fait la différence. Sans oublier la discipline. C'est une partie de mon travail ici. J'ai essayé de transmettre l'expérience et certaines méthodes que j'ai acquises en Europe pour que les joueurs aient un sens de la responsabilité et du professionnalisme. Au coup d'envoi de la saison, avez-vous imaginé un seul instant pouvoir être champion ? Avant de commencer la saison, j'ai réuni les joueurs pour leur dire que je n'avais qu'un seul objectif : être champion. Ils m'ont regardé comme si j'avais perdu la raison. Ensuite, je leur ai expliqué de façon détaillée ce qu'il fallait faire pour se donner les moyens d'être champion. Cela passait évidemment par énormément de travail et de discipline, car il y avait un plan à suivre. Au fur et à mesure des matchs, les joueurs ont pris confiance en eux-mêmes et en moi. Ils se sont rendus compte qu'ils pouvaient y arriver. Vous n'avez que 35 ans et c'est votre premier poste d'entraîneur. Vous n'avez pas raté vos débuts... Je n'ai pas encore eu le temps d'analyser notre saison en détail, car nous avons encore des objectifs à atteindre. Mais il faudra que je me penche là-dessus, probablement quand je serai en vacances. Pour l'instant, mon seul objectif est de continuer à gagner. Nous avons encore deux coupes à disputer, la Coupe Crown Prince et la Coupe de l'Emir. Nous avons encore des titres à gagner... Quelle a été votre sensation au moment du sacre ? Après tout, c'est votre premier grand titre comme entraîneur, mais également comme joueur… C'est une sensation incroyable. Quand vous faites votre travail le mieux possible et que vous êtes récompensé de cette manière, c'est magnifique. Je suis vraiment fier de mes joueurs, car le chemin était long et ils n'ont rien lâché. Quelles sont vos ambitions désormais ? Comme je l'ai dit, nous sommes encore en course dans deux coupes nationales. De plus, le club a de grosses ambitions. Nous voulons bien figurer en Asie, en particulier en Ligue des champions de l'AFC. Pourquoi pas ? Pendant votre carrière, vous avez connu un certain nombre d'entraîneurs. L'un d'entre eux vous a-t-il particulièrement influencé ? C'est une question que je me suis posée. La réponse, c'est qu'il y a tellement de paramètres dans ce métier que chaque entraîneur vous apporte quelque chose. Maintenant, si vous me demandez qui est mon modèle actuellement, je vous dirai Josep Guardiola, pour ce qu'il est en train de faire à Barcelone. J'adore le football pratiqué par le Barça. C'est la meilleure approche que l'on puisse avoir. Comme joueur, vous êtes notamment passé par l'Olympique de Marseille, le Celta Vigo et Manchester City. Vous avez dû connaître quelques moments inoubliables… Chacun de ces clubs a une place dans mon cœur. Ma carrière a réellement commencé à Marseille, dont je garde des souvenirs merveilleux. C'est là que j'ai fait mes classes dans le football de haut niveau. J'ai beaucoup appris à l'OM. Ensuite, j'ai joué au Celta Vigo. Ce fut une expérience intéressante, car le football espagnol est complètement différent de celui pratiqué en France. Ensuite, j'ai joué en Angleterre. Dans chacun de ces championnats, j'ai acquis de l'expérience. Curieusement, vous n'avez pas énormément de sélections en équipe d'Algérie. Comment expliquez-vous cela ? C'est vrai, j'ai été sélectionné 25 fois avec l'Algérie. L'une des raisons est que souvent l'Algérie jouait alors que j'avais des rendez-vous très importants avec mon club. Il fallait faire un choix, qui d'ailleurs était très difficile. D'un côté vous ne voulez pas perdre votre place de titulaire avec votre club, et de l'autre il y a rien de plus beau que de représenter son pays. Aujourd'hui, les choses ont un peu changé. La FIFA fait en sorte que les matchs internationaux ne se chevauchent pas avec les matchs de championnat. Comme ça, c'est plus facile pour tout le monde. Si vous pouviez modifier quelque chose dans votre carrière de joueur, que changeriez-vous et pourquoi ? J'aurais aimé jouer un peu plus en Angleterre. Malheureusement, j'ai été souvent blessé à cette époque. Cela dit, je suis très fier de tout ce que j'ai fait, de chaque seconde que j'ai passée sur le terrain. Pour le dire autrement, j'ai toujours tout donné sur un terrain de football. De ce point de vue, je n'ai aucun regret. Pour revenir au football algérien, quel regard portez-vous sur la génération actuelle, qui a participé à la dernière Coupe du monde de la FIFA ? L'année dernière, l'Algérie a évolué à un très haut niveau. Elle s'est qualifiée pour la Coupe du monde et a réussi à atteindre les demi-finales de la Coupe d'Afrique des nations. Je reste persuadé qu'en Afrique du Sud nous aurions pu passer le premier tour. Mon souhait le plus cher est que la Fédération algérienne de football et les joueurs professionnels de mon pays fassent de leur mieux pour développer le football sur place. C'est la seule façon d'avancer. Après la Coupe du monde, on a senti un certain découragement. Nous avons perdu un match à domicile contre le Gabon. Heureusement, nous avons enchaîné par une victoire contre le Maroc dans les qualifications pour la prochaine CAN. Ça faisait très longtemps que nous n'avions plus battu le Maroc. L'Algérie doit continuer de travailler pour s'améliorer dans tous les compartiments du jeu. Pourrait-on vous voir un jour à la tête de l'équipe d'Algérie ? Aujourd'hui, toute mon attention est concentrée sur Lekhwiya avec qui l'aventure ne fait que commencer. J'ai reçu des offres, mais pour l'instant je suis à 100% à Lekhwiya. A l'avenir, tout peut arriver, mais je ne suis pas du genre à se demander de quoi demain sera fait. J'aime vivre chaque instant à fond. Donc, pour le moment je suis à Lekhwiya et j'y suis très bien. Après Lekhwiya, qui sait ?