«Avec Yebda, j'ai découvert le téléphone portable» «Dommage que la main de «Ghezzo» ait empêché l'Algérie d'aller loin au Mondial» Arrivé à l'AC Milan en provenance de l'AS Roma, l'été passé, Philippe Mexès s'est imposé comme un titulaire au sein de l'équipe où il y a pourtant profusion de talents dans l'axe de la défense (Thiago Silva, Alessandro Nesta, Mario Yepès, Daniele Bonera…). Le défenseur international français, l'un des meilleurs à son poste dans la très exigeante Serie A, même lorsqu'il jouait à Rome, est revenu très fort, après une grave blessure qui l'avait éloigné des terrains durant plusieurs mois. Nouveau coéquipier de Djamel Mesbah, il a consenti à nous accorder quelques minutes de son temps et à s'exprimer pour les lecteurs du Buteur. Vous avez été l'un des meilleurs éléments de votre équipe, l'AC Milan, contre Arsenal en match aller du huitième de finale de la Ligue des champions. Qu'est-ce qui a joué en faveur de votre équipe pour gagner sur un score inespéré au départ, 4-0 ? C'était pour nous le match référence. Il faut continuer sur cette voie, si nous voulons gagner des matchs importants comme celui-là et aller le plus loin possible dans cette compétition. Qu'est-ce qui a fait que l'AC Milan soit si dominateur dans ce match ? Etait-ce Arsenal qui était dans un mauvais jour, vous qui étiez très motivés ou un peu des deux ? Je pense que c'est un peu les deux. Nous avons su bien les gérer, les empêcher de jouer. Ils n'ont pas eu trop d'occasions de s'exprimer non plus grâce à un bon AC Milan qui a su bien négocier ce match. Nous sommes en train de découvrir, au fil des matchs, un Philippe Mexès de plus en plus imposant dans l'équipe. Vous êtes bien revenu de votre blessure et vous êtes en train d'enchaîner les matchs. Est-ce qu'on peut dire que vous avez vraiment trouvé votre place au sein de cette équipe ? J'ai trouvé ma place dès le début. C'est vrai que c'est dur de revenir après une longue blessure, mais c'est en jouant à chaque fois 90 minutes dans des matchs comme ça qu'on reprend confiance et qu'on redevient celui qu'on était avant la blessure, parce que c'est délicat de rester 8 mois à l'arrêt, sans jouer. Avec l'équipe et l'effectif qu'il y a, on a tout pour être dans les meilleures conditions. Vous êtes toujours en course pour les trois titres : championnat, Coupe d'Italie et Ligue des champions. Le triplé, vous y croyez ? Il ne faut pas exagérer. Il reste encore beaucoup de matchs à jouer. Il y a eu ce mois de février où il y a beaucoup de matchs à passer. Ensuite, au mois de mars, on pourra faire le bilan pour savoir où on en est. En Coupe d'Italie, c'est plutôt mal parti (défaite à domicile 1-2 face à la Juventus en demi-finale aller, ndlr), mais nous avons encore une chance ; en Ligue des champions, il reste le match retour (contre Arsenal en huitièmes de finale, ndlr), mais c'est bien parti ; le championnat sera dur jusqu'au bout avec la Juve. Vous vous étiez imposé en Serie au sein de l'AS Roma, avant de passer un cap en signant à l'AC Milan. Peut-on dire que le championnat d'Italie vous sied bien et convient à vos qualités ? Je ne sais pas. C'est vrai que j'ai fait 7 ans à Rome, avant de venir à Milan. Je jouais en France et, à la base, je ne m'attendais vraiment pas à jouer en Italie. Finalement, je suis là. Je ne sais pas si c'est ici que je me trouverai le mieux, car je n'ai pas essayé les autres championnats, mais il est vrai que je m'y sens bien. J'arrive à m'épanouir totalement. Maintenant, je ne sais pas si ça se serait passé de la même manière en Angleterre, en Espagne ou en Allemagne, mais j'ai fait la connaissance de la Roma et de Milan, deux grands clubs, et passer de l'un à l'autre constitue un pas en avant. C'est pour moi une très grosse fierté parce que Milan est l'un des plus grands clubs européens. Vous avez un nouveau coéquipier, Djamel Mesbah, qui a fait la même chose que vous, à la différence que lui est venu de plus loin, de Lecce. Le connaissiez-vous avant qu'il ne débarque à l'AC Milan ? Non, pas du tout. Quand on a joué contre Lecce, je l'avais vu. Vous savez, dans les matchs, on essaye de voir qui parle français et qui ne le parle pas et s'il y a des joueurs qui ont des origines en France. Je l'avais aperçu quand on avait joué chez eux. Ils gagnaient 3 à 0 à la mi-temps, mais nous avions gagné à la fin 3-4. C'était un match très dur et il avait fait une bonne partie. On parlait déjà beaucoup de lui déjà à l'époque. Même dans les journaux, il avait une très belle cote. C'est ainsi qu'il a intéressé le Milan. C'était une petite surprise dans l'être, puisqu'il a de très grandes qualités. Il a encore plus de mérite parce qu'il vient de Lecce. Il a fait un parcours assez difficile. Je trouve qu'arriver au Milan est vraiment quelque chose de fabuleux pour lui. Je suis très fier de voir un joueur comme lui avec nous. Il joue sans complexe et donne le meilleur de lui-même. Il a fait de très bons matchs. Cela fait un mois qu'il est là. Il a joué des matchs et fait des entraînements avec vous. Pensez-vous qu'il a encore une marge de progression, qu'il peut faire encore mieux ? Ah, oui ! A partir du moment où tu te sens bien, tu peux progresser. Là, il est en train de découvrir un nouveau club, de nouveaux compagnons, et c'est assez délicat, mais il s'est très bien intégré, très vite. Il est irréprochable aux entraînements, tous les matchs qu'il a faits, c'était très bien, il s'entend bien avec tout le monde… Son intégration a été assez «facile», mais je dirai qu'il s'est très bien adapté. Il nous a confié en aparté que depuis le premier jour, vous avez tout fait pour faciliter son intégration en le rassurant et en l'orientant. L'avez-vous fait par devoir ? Non. C'est juste que j'ai vécu la même chose que lui. Je suis arrivé ici il y a 6 mois. C'était pour moi un nouveau club, l'AC Milan en plus. Tu peux te poser beaucoup de questions, avoir peur et nourrir des appréhensions. Il ne doit pas ressentir cela parce que, s'il est là, c'est qu'il le mérite. Même aux entraînements, s'il y a un tacle à faire ou un tir à décocher, il ne faut pas qu'il hésite. Il faut qu'il se fasse plaisir, car le football est un plaisir avant tout. Même s'il est dans un très grand club aujourd'hui, il ne faut pas qu'il change ses habitudes, il faut qu'il fasse comme à Lecce où il était leader, où il montait, tirait et marquait. Il faut qu'il fasse pareil avec Milan parce que c'est comme ça qu'ils l'ont recruté. Pour lui, pour vous, pour tous vos coéquipiers, être à Milan, c'est gagner ? Ben oui ! C'est la devise d'ici et de tous les grands clubs européens : la victoire. C'est donc un état d'esprit ici ? Il faut gagner, quels que soient le contexte et l'adversaire ? Oui, il faut gagner. S'il y a la manière, c'est mieux, mais le plus important est de gagner des titres. Nous sommes dans un club historique et mythique par tous les titres qu'il a gagnés. Flavio Roma nous avait déclaré dans une interview que des joueurs qui sont passés par de grands clubs en Europe conviennent à affirmer qu'être à l'AC Milan est différent et spécial parce qu'il y règne un esprit de famille. Le confirmez-vous ? Cela ne fait pas longtemps que je suis ici, mais c'est vrai que c'est la sensation que j'ai. Il y a un cocon familial où tout le monde se connaît, où il y a des habitudes, des champions. Que ce soit le staff médical, les agents de sécurité, les magasiniers, le service de presse, celui qui travaille au sein de l'AC Milan le fait de manière professionnelle. C'est la chose qui te marque le plus. A partir du moment où tu passes le portail, tu sais que tout est géré de A à Z, que tout est bien cadré, et que tu ne dois penser qu'à une seule chose : le terrain. C'est une coutume et on s'intègre dans ce moule, en fait, en essayant de devenir des champions à notre tour, comme nos prédécesseurs. On va parler un peu de l'Algérie en commençant par un joueur avec qui vous aviez joué à l'AJ Auxerre… C'est Yebda, non ? Oui, exactement : Hassan Yebda, qui a joué lui aussi en Italie la saison passée à Naples et qui est à présent sociétaire du Granada CF. Avez-vous des souvenirs du temps où vous étiez ensemble à Auxerre ? Pour moi, les plus belles années que j'ai passées en étant jeune, c'était à Auxerre. En sa compagnie, au centre de formation, c'était des moments inoubliables. On découvrait le téléphone portable, il y avait nos familles… On était jeunes et il y avait nos familles qui venaient assez souvent pour nous ramener le goûter… On a vécu beaucoup de choses ensemble et on a pratiquement grandi ensemble. Même s'il est un peu plus jeune que moi, nous étions plus ou moins de la même génération à Auxerre. C'est inoubliable. C'est un grand joueur et je suis fier et content de l'avoir vu jouer à Naples et évoluer comme ça. C'est un garçon qui était travailleur et qui mérite d'avoir fait une carrière professionnelle. Vous attendiez-vous à ce qu'il réalise la belle saison qu'il a faite à Naples ? Je ne l'ai pas trop suivi parce que j'étais blessé et j'étais donc un peu en dehors, mais j'ai entendu beaucoup de bien sur lui. A Rome, on a parlé de lui. Vous souvenez-vous de Djebbour, qui est passé lui aussi par le centre de formation d'Auxerre ? Djebbour, un petit peu moins. Je ne l'ai suivi qu'à la télé. Avez-vous suivi le parcours de la sélection algérienne en Coupe du monde ? Déjà, j'étais déçu de ne pas y être et j'ai suivi la compétition de l'extérieur, mais c'est sûr qu'on s'attendait à voir les Algériens aller plus loin, parce qu'ils avaient de belles individualités. Malheureusement, ça avait joué en leur défaveur sur une main de «Ghezzo» (c'est ainsi que Abdelkader Ghezzal est surnommé en Italie, ndlr) qui est connu en Italie parce qu'il fait de très bons matchs. Ce sont des épisodes comme ça qui font que les matchs se jouent sur de petits détails. Il faut de l'expérience et c'est comme ça qu'on apprend. Cela dit, vous pouvez être fiers de votre Equipe nationale.