«Yorke et Cole étaient coriaces, mais heureusement que je n'ai jamais joué contre Henry et Bergkamp.» Ancienne gloire d'Arsenal, martin Keown travaille depuis quelques années comme consultant à la BBC. Nous l'avons rencontré après la demi-finale Espagne-Portugal qui a eu lieu mercredi au Donbass Arena de Donetsk. A notre grande joie, il se débrouille très bien en français, fruit de ma présence de nombreux «Frenchies» dans l'équipe d'Arsenal à son époque : Pirès, Wiltord, Vieira, Petit, Anelka et Henry. Il a accepté très gentiment de répondre à quelques questions. L'Espagne en finale, est-ce une surprise pour vous ? Il est clair que tout le monde a donné l'Espagne favorite pour atteindre la finale avant même le début du tournoi. En dépit des prestations irrégulières des Espagnols lors de cet Euro, ils restent quand même les champions du monde et tenants du trophée. Ces simples données font que son accession à la finale est somme toute logique. Ne pensez-vous pas, cependant, qu'elle ne fait plus aussi peur qu'auparavant, puisque le Portugal, qui ne compte pas un nombre aussi élevé d'individualités, l'a poussée à recourir à la séance des tirs au but ? Certes, mais quand il s'agit d'une demi-finale, tout reste possible et les quatre prétendant sont sur un pied d'égalité. Il ne faut pas occulter le fait que la sélection espagnole est devenue un livre ouvert puisque tous ses adversaires connaissent sa manière de jouer et se préparent pour la contrer. Cela pousse le sélectionneur Del Bosque à tenter parfois de surprendre avec des choix inattendus comme la titularisation de Negredo face au Portugal. La fatigue est-elle pour quelque chose dans le rendement des Espagnols ? Naturellement. C'est difficile d'être toujours au même niveau physique et technique, surtout que l'Espagne est devenue la cible de toutes les sélections. Ce n'est plus comme lors de l'Euro-2008 où elle avait joué avec une plus grande sérénité, ce qui lui avait permis de surprendre tout le monde. Il ne faut oublier non plus que la sélection espagnole est constituée des joueurs du FC Barcelone et du Real Madrid qui disputent une moyenne de 55 matches par saison, alors que ceux du Portugal ne dépassent pas une moyenne de 40 matches par saison, à l'exception de ceux d'entre eux qui jouent au Real Madrid. Quelle appréciation portez-vous sur la participation de la sélection d'Angleterre, dont vous avez été l'un des grands défenseurs par le passé ? Ce qui est arrivé à l'Angleterre était prévisible, quoique la chance lui ait tourné le dos encore une fois aux tirs au but. Il est rare où les séances de tirs au but ont souri à l'Angleterre. Il était possible pour les Anglais d'arriver aux moins aux demi-finales. Cependant, compte tenu des paramètres de la sélection juste avant le début de l'Euro, j'estime que sa participation est bien meilleure qu'elle ne l'a été Mondial-2010. De quels paramètres parlez-vous ? La démission de Fabio Capello et la désignation d'un nouveau sélectionneur un mois seulement avant le début de l'Euro. Hodgson n'avait pas le temps nécessaire pour bien se préparer au tournoi. Il y a eu aussi les blessures de quelques cadres de l'équipe, tels Frank Lampard et la suspension qui a frappé Wayne Rooney. En votre qualité d'ancien défenseur, quel est le défenseur qui vous a plu dans cet Euro ? Il y en a plusieurs qui sont ne train d'accomplir un grand tournoi et ce n'est pas une surprise pour moi. Sergio Ramos est en train de confirmer la très bonne saison qu'il a accomplie avec le Real Madrid, Gerard Piqué est revenu en force en dépit d'une saison moyenne avec le FC Barcelone, Daniele De Rossi s'est également illustré dans son nouveau rôle de libéro, ainsi que l'Allemand Mats Hummels. Vous n'avez cité aucun défenseur anglais... Terry et Lecott n'ont pas commis beaucoup d'erreurs et les trois buts encaissés par l'Angleterre ont été les conséquences d'erreurs collectives. Ils ont été d'un bon niveau, mais ils ne sont pas meilleurs que ceux que j'ai cités. Quels sont les meilleurs souvenirs que vous gardez de votre carrière ? Tous les titres gagnés avec Arsenal sont de bons souvenirs pour moi. Nous gagnions une moyenne d'un titre par saison à la fin des années 90 et au début des années 2000. Cependant, Arsenal n'a plus gagné de titre de champion depuis 8 ans. Est-ce la faute à la politique appliquée par Arsène Wenger ? Wenger accomplit un excellent travail depuis son arrivée au club. Si on veut évaluer son travail, il faut le faire de manière globale, depuis qu'il a débuté au club, et non en jugeant uniquement les dernières saisons. Il a ramené beaucoup de titres au club et il faut respecter sa politique quelle qu'elle soit. Pensez-vous que Arsenal n'a pas pu tenir le rythme des politiques de recrutement des stars menées par Chelsea, Manchester City et, à un degré moindre, Manchester United ? C'est vrai. Il ne faut pas oublier que Arsenal évolue dans l'un des championnats les plus durs au monde et il est dur de prendre le dessus en une saison sur Manchester United, Liverpool et autres Chelsea qui recrutent à grands frais et dépensent beaucoup d'argent chaque année pour gagner des titres. En Espagne, c'est différent : quand le Barça ne remporte pas le titre, cela veut dire que c'est le Real Madrid qui le remporte et vice-versa. Quel est l'attaquant le plus coriace que vous avez affronté durant votre carrière ? Il y avait de grands attaquants à mon époque, dont le tandem de Manchester United, Dwight Yorke et Andy Cole, qui était très dangereux. Mon coéquipier Tony Adams et moi éprouvions beaucoup de difficultés à le neutraliser. Il y avait également l'attaquant argentin Gabriel Batistuta. Cela dit, j'étais chanceux car je n'ai pas eu à affronter mes deux coéquipiers à Arsenal, Thierry Henry et Dennis Bergkamp, qui étaient insaisissables (rires). ------------------- La talonnade de Madjer Le Portugal n'a pas à rougir Personne n'aime perdre aux tirs au but. Mais on aime tous gagner un match et peu importe la manière. Surtout quand il s'agit d'accéder à une finale. La défaite du Portugal contre l'Espagne est douloureuse, pour ceux qui ont vibré avec Ronaldo et Nani. Je n'ai pas vu les Espagnols souffrir autant depuis longtemps. Même leur match nul contre l'Italie avait été plus «léger» que celui de mercredi. Paulo Bento a tenu ses promesses en allant droit devant, acculant souvent la Roja dans sa dernière ligne. La bataille du milieu a été gagnée rageusement par Veloso, Moutinho et Mereiles auteurs de mouvements rugueux mais intelligents et harmonieux. Ils ont fermé tous les espaces, serrant toutes les lignes devant Xavi, Inesta et Bousquets, tout en portant le nombre en attaque. Ce n'est pas honteux de jouer avec cinq défenseurs fixes (avec Veloso) quand le besoin se fait sentir, du moment que le deuxième rideau se renforçait aussitôt afin de relancer vite pour Ronaldo, Nani et Almeida. Ce dernier aurait été sans doute mieux inspiré s'il avait eu l'audace de se rapprocher de deux ou trois mètres avant de tenter ses tirs. La distance n'était, à mon avis, pas la bonne pour surprendre Casillas. De même pour Ronaldo qui avait été malheureux sur ses tentatives. Mais Cristiano a été énorme dans ce match, montrant bien qu'il reste l'un des deux meilleurs joueurs du monde avec Messi. Voir Del Bosque rappeler Xavi sur le banc était révélateur du mal être de son système. La Roja a perdu son football, jusqu'à son réveil dans les prolongations, quand Inesta est passé au milieu, laissant l'incroyable Alba et la fraîcheur de Pedro faire le reste. Le Portugal n'a vraiment pas à rougir de cette défaite, car Ronaldo et ses camarades ont prouvé qu'ils ont bien intégré la cour des grands d'Europe. L'Espagne revient de loin, pour... aller encore plus loin ! ------------------- La boulette de Sara Carbonero Mercredi soir, l'Espagne s'est qualifiée pour la finale de l'Euro. Une qualification difficile, finalement, acquise aux pénos face au Portugal (0-0, 4-2 aux t.a.b). Un match que Sara Carbonero, journaliste espagnole et copine d'Iker Casillas, a pu mater du bord du terrain. Mais visiblement, elle n'a pas tout regardé, elle s'est montrée un peu désintéressée de la séance de tirs au but où son compagnon de gardien a pourtant brillé. A moins qu'elle n'ait été tellement obnubilée par son homme qu'elle en aurait oublié les tireurs espagnols, car la belle a simplement zappé qu'Andres Iniesta avait tiré un péno. Comme en témoigne la question qu'elle a posée au milieu du Barça en fin de match : «Est-ce que tu aurais aimé tiré un penalty ?» Réponse d'Iniesta : «Oui, en fait, j'ai tiré le second...» Imaginez le grand moment de solitude qu'a dû se taper la pauvre Sara, en direct sur la chaîne ibérique Telecinco. ------------------- Balotelli, une caricature qui fâche On connaissait déjà le lien entre Mario et Donkey Kong, c'est maintenant le parallèle entre l'autre Mario et King Kong qui fait scandale. La préparation de la Squadra Azzura pour leur demi-finale contre l'Allemagne a en effet été accompagnée d'une vive polémique concernant la publication, dans la Gazetta Dello Sport, d'une caricature tendancieuse représentant Mario Balotelli, seul joueur noir de la sélection italienne, en King Kong. Ce dessin montre l'attaquant transalpin agrippé au sommet du Big Ben et repoussant de la main des ballons de football. Depuis sa publication, il a suscité tant de plaintes que le journal italien a, désormais, admis qu'il aurait dû faire preuve d'une «plus grande modération, prudence, et d'un meilleur goût». Cependant, il n'y a pas eu encore de réelles excuses, ce qui ne facilite pas le retour au calme au sein du clan Balotelli qui est agacé par la récurrence des propos racistes à son encontre. ------------------- Matthäus ne veut pas parler de l'Algérie Croisé avant la demi-finale Allemagne-Italie qui s'est déroulée hier au stade national de Varsovie, l'ancien capitaine de la sélection allemande et champion du monde, Lothar Matthäus, n'a pas voulu s'exprimer sur l'Algérie, refusant poliment, mais fermement d'aborder le sujet. Il est vrai qu'il n'a pas de bons souvenirs contre les Algériens puisqu'il faisait partie de la sélection de la RFA (Allemagne de l'Ouest) qui avait perdu contre l'Algérie lors du Mondial-82, avec des buts inscrits par Rabah Madjer et Lakhdar Belloumi, et de l'équipe du Bayern Munich qui avait été privée du sacre en Coupe d'Europe des clubs champions par le même Madjer, auteur d'une égalisation avec le FC Porto d'une talonnade historique et d'une passe décisive pour le but de la victoire. Il a quand même accepté de prendre une photo. C'est mieux que rien. ------------------- Euro Vision Balotelli, l'art de fermer les gueules Mario Balotelli est noir. Le premier Noir à être convoqué en sélection d'Italie. Sa participation à l'Euro-2012 a été largement remise en cause dans son pays. C'est que le Balotelli a un caractère très difficile, tellement difficile que même le grand José Mourinho, qui en a pourtant vu d'autres et qui a apprivoisé une pelletée de joueurs imbus de leur personne (Deco, Drogba, Joe Cole, Materazzi, Eto'o...), a rendu les armes devant lui lorsqu'il l'avait à l'Inter. Que dire alors que de son entraîneur actuel à Manchester City, Roberto Mancini, pourtant Italien comme lui, mais qui avait révélé publiquement qu'il ne pouvait pas le gérer ! C'est donc nanti d'une sulfureuse réputation que «Super-Mario» a débarqué à l'Euro. Premiers matches contre l'Espagne et la Croatie et premières critiques virulentes de l'impitoyable presse italienne : trop individualiste, trop suffisant. L'entraîneur Prandelli, qui ne veut pas avoir la presse sur le dos, cède et le met remplaçant contre l'Eire. Il rentre en cours de match et met un but d'un retourné acrobatique et, au moment où il allait vraisemblablement insulter quelqu'un (son entraîneur ou les journalistes), son coéquipier Bonucci a la bonne idée de lui mettre la main à la bouche pour l'en empêcher. En quarts de finale contre l'Angleterre, non seulement il sort un grand match, mais il exécute le premier tir au but avec calme, alors que le gardien de but anglais Hart, qui le connaît très bien puisqu'il évolue avec lui à Manchester City, a tout fait pour l'énerver. Balotelli a beau avoir un sale caractère, il ferme sa gueule et fait fermer celles des autres en répondant avec art sur le terrain. A méditer par un certain coéquipier de Manchester City.