Bougherra : «Je n'ai rien contre sa venue» Raouraoua : «A lui d'appeler le sélectionneur» Yahia : «Saâdane doit préserver la stabilité du groupe» A son corps défendant, Mehdi Lacen a vu son cas devenir une «affaire». En effet, sa décision d'accepter de défendre le maillot national, dans le cas où on ferait appel à lui, suscite beaucoup de passion parmi l'opinion sportive algérienne. Alors que certains saluent cette décision, d'autres crient à l'opportunisme, croyant y déceler une tentative de prendre le train en marche alors que la perspective de voir l'Algérie se qualifier pour la Coupe du monde se profile à l'horizon. Chaque camp a ses propres motivations pour avoir un avis tranché sur la question. * Les opposants étonnés qu'il ait demandé à réfléchir Le camp des opposants à Lacen invoquent le caractère injuste de voir un joueur donner son accord pour jouer avec l'Algérie plusieurs mois après avoir été sollicité, donnant ainsi l'impression de ne pas être très chaud à l'idée de défendre les couleurs nationales. Pour cette catégorie, il est impensable de demander à réfléchir sur l'opportunité ou pas de répondre à l'appel du pays, comme si on réfléchissait à l'opportunité ou pas d'acheter tel article ou de louer tel appartement, alors que c'est une question qui devrait être sacrée, selon eux, et non sujette à réflexion ou à des tergiversations. * Aller au Mondial sans avoir trimé serait injuste Les «contre» se comptent aussi parmi ceux qui – comme certains joueurs de la sélection – voient d'un très mauvais œil que certains se tuent à la tâche sur les terrains d'Afrique pour qualifier l'Algérie à la Coupe du monde et voir après d'autres joueurs venir en récolter les fruits en participant au Mondial sans avoir trimé comme les autres. Les exemples de Rachid Harkouk et Halim Benmabrouk, qui avaient été retenus pour la Coupe du monde de 1986 au Mexique sans avoir pris part aux éliminatoires, sont évoqués. Que Lacen en fasse de même serait injuste, selon ses détracteurs. * Ses partisans rappellent que Mabrouk et Harkouk avaient été pris par Saâdane Le camp des favorables à ce que le milieu défensif du Racing Santander soit convoqué en sélection voit les choses autrement. Pour eux, l'Algérie n'est pas encore qualifiée pour la Coupe du monde, même si elle est bien partie dans cette perspective. Il y a encore trois matches à jouer et Lacen pourrait très bien venir y prendre part. De plus, il n'est pas dit que ce joueur aura une place garantie en cas de qualification pour le Mondial car beaucoup de choses peuvent se passer d'ici là. Donc, le parallèle avec les cas Harkouk et Benmabrouk n'a pas lieu d'être, selon eux. Ensuite – et ce n'est pas le moindre des arguments –, il se trouve que le sélectionneur national lors du Mondial mexicain était… Rabah Saâdane. Donc, ce dernier ne peut pas interdire aujourd'hui ce qu'il avait autorisé hier. * Benarbia et Hemdani sont venus à 30 ans Par ailleurs, les partisans de Lacen s'expliquent mal qu'on condamne un joueur qui a certes tergiversé, mais qui a finalement accepté de jouer pour l'Algérie alors qu'il n'a que 24 ans, et que, pas loin de nous, des joueurs n'ont répondu favorablement à l'appel de la sélection qu'au crépuscule de leur carrière. Cela a été notamment le cas de Ali Benarbia et Brahim Hemdani qui étaient trentenaires à leur première sélection. De surcroît, Benarbia et Hemdani venaient souvent en Algérie en vacances durant leur carrière, ce qui fait qu'ils n'ont jamais rompu le contact avec le pays et savaient à quel point la population espérait les voir vêtir le maillot national. Cela n'est pas du tout le cas de Lacen qui ne connaît pas du tout l'Algérie et dont le père, qui n'y est plus venu depuis 17 ans, n'a rien fait pour lui faire découvrir le pays. Comment peut-on pardonner à des joueurs qui ont beaucoup tardé à accepter la sélection et ne pas le faire pour un autre qui, lui, a des circonstances atténuantes ? F. A. S. Ses coéquipiers de Santander l'ont pressé de jouer pour l'Algérie Les hésitations qu'avaient Mehdi Lacen à jouer pour l'Algérie étaient connues de tous, y compris au sein de son club, le Racing Santander. Pour preuve, quelque-uns de ses coéquipiers lui ont même demandé à plusieurs reprises d'accepter de défendre les couleurs algériennes, ne serait-ce que pour le prestige que cela pourrait engendrer. En effet, avoir le statut d'international est plus valorisant pour un joueur, surtout lors des négociations pour un contrat. Cependant, Lacen a toujours répondu que ce n'était pas une question de prestige, mais de conviction plutôt. Il ne voulait pas aller en sélection avant d'être convaincu que c'est ce qu'il voulait vraiment. * Il est prêt à ne venir qu'après le Mondial Contrairement à ce que beaucoup de gens pourraient être amenés à penser, ce n'est pas la perspective de jouer la Coupe du monde qui motive sa décision de se mettre à la disposition de la sélection. Il aurait confié à des proches, à titre privé, que si sa venue en sélection risquait de perturber la sérénité du groupe, il ne viendrait pas. Plus même, il serait prêt à ne venir qu'après la Coupe du monde (si l'Algérie se qualifie), puisqu'il n'aura pas pris part aux éliminatoires. * Lacen et Ziani se sont parlé au téléphone Mehdi Lacen l'a dit hier dans l'interview qu'il nous a accordée, il est disposé à parler au téléphone avec Karim Ziani si ce dernier y consentait. C'est une manière d'aplanir ce qu'il considérait comme un simple malentendu lorsqu'il n'avait pas répondu au message vocal que le nouveau joueur du Vfl Wolfsburg lui avait laissé un jour. Ziani a donné son accord pour lui parler, n'y trouvant aucun inconvénient. C'est dimanche après-midi que les deux joueurs se sont parlé entre deux entraînements avec leurs clubs respectifs. Selon nos informations, la discussion a été sereine et chacun a pu étaler son point de vue. Une première tentative infructueuse Déjà, après nous avoir accordé l'interview samedi matin à Rees, Lacen était disposé à parler à Ziani, ne serait-ce que pour lui passer le bonjour. Nous avons essayé de joindre ce dernier au téléphone, mais il était à l'entraînement. Ce n'était donc que partie remise. Il fallait juste trouver un moment où les deux joueurs seraient libres en même temps pour qu'ils puissent communiquer ensemble. C'est désormais chose faite. F. A. S. Yahia : «Le coach prendra la décision qui saura préserver le groupe» C'est avec intérêt et surprise que Anthar Yahia a appris la décision annoncée par Mehdi Lacen de se mettre à la disposition du sélectionneur national Rabah Saâdane pour une éventuelle convocation en sélection. «C'est déjà bien qu'il ait pris une telle décision, même s'il a un peu tardé à le faire. C'est à l'appréciation du sélectionneur de juger de l'opportunité de le convoquer ou pas. Saâdane est le seul à décider. Nous savons que l'entraîneur œuvrera toujours pour le bien de l'équipe et pour préserver la sérénité et la cohésion du groupe», nous a-t-il notamment déclaré. * «C'est un Algérien comme moi et je n'ai pas le droit de le juger» Le défenseur international du Vfl Bochum a insisté sur un point : «Seul Lacen connaît les raisons exactes qui ont fait que ce n'était pas clair dans sa tête au départ.» Et d'ajouter : «C'est un Algérien comme moi et je n'ai pas le droit de le juger. Déjà, Dieu seul sait ce qu'il y a dans son cœur. Donc, il ne faut pas tomber dans le piège des jugements hâtifs.» Pour lui, personne ne peut remettre en cause les qualités morales du joueur. * «Je ne comprends pas pourquoi il a tergiversé» La seule chose qui dérange Yahia, c'est le fait que Lacen ait pris beaucoup de temps pour prendre sa décision. «Je ne comprends pas pourquoi il a longtemps tergiversé. On ne peut pas attendre longtemps pour savoir si on veut défendre les couleurs de l'Algérie ou non. Il aurait pu assister à un de nos stages juste pour s'imprégner de l'ambiance et nous l'aurions accueilli à bras ouverts», a-t-il affirmé. «Il ne connaît pas l'Algérie, mais je ne lui en veux pas pour cela. C'est plutôt la faute de ses parents qui ne lui ont pas fait découvrir notre pays et ses gens pour les lui faire aimer.» * «L'Algérie, ce n'est pas n'importe quel pays !» Comme à son habitude, Yahia s'est enflammé dans ses propos à chaque fois que l'Algérie est évoquée. «Je ne sais pas si les gens en ont conscience, mais l'Algérie n'est pas n'importe quel pays. Elle a eu une histoire glorieuse et des martyrs. Donc c'est un honneur de se dire Algérien et de le revendiquer ouvertement.» Et de nous raconter une anecdote récente qu'il a vécue : «Lorsque nous sommes arrivés à l'hôtel militaire de Blida pour la mise au vert avant le match contre l'Egypte, nous avons vu les portraits de nombreux chouhada accrochés dans la grande salle. Savez-vous quoi ? Les femmes présentes là-bas se sont mises à lancer des you-yous en notre honneur. Vous ne pouvez pas imaginer à quel point cela m'avait touché. Les Algériens nous considèrent comme des ambassadeurs et c'est un sentiment d'une valeur incommensurable.» F. A-S. Raouraoua : «Que Lacen fasse part de sa décision à Saâdane et on verra après» Au cours d'une communication téléphonique, le président de la Fédération algérienne de football, Mohamed Raouraoua, nous a affirmé que, comme le sélectionneur Rabah Saâdane et lui l'ont toujours affirmé, les portes de la sélection nationale restent toujours ouvertes. «Pour l'instant, Lacen ne nous a pas informés de sa décision d'accepter de jouer pour l'Algérie. Il a simplement annoncé sa décision au journaliste qui l'a interviewé. Qu'il fasse part de sa décision à Saâdane et on verra après. Je rappelle que ce sont nous qui avons fait le premier pas en allant le rencontrer en Espagne et en discutant longuement avec lui. Le sélectionneur a toujours affirmé que les portes de l'équipe nationale restent ouvertes à tous, sans exception. Je le confirme également, car la sélection appartient à tous les Algériens», nous a-t-il déclaré. Visiblement, Raouraoua ne veut pas fermer la porte à la face de Lacen, mais tout en veillant à préserver la stabilité du groupe actuel. «Le dernier mot reviendra au sélectionneur qui, en ce moment, possède un bon groupe. C'est à lui de juger si Lacen pourra ramener un plus ou pas. L'intérêt de l'Algérie est au-dessus de toute considération.» Matmour : «Tout Algérien qui apporterait un plus est le bienvenu» Karim Matmour a pris connaissance des déclarations de Mehdi Lacen. Tout en se refusant à juger le milieu de terrain du Racing Santander, il estime que «sa convocation en équipe nationale ou non relève de l'appréciation exclusive du sélectionneur national car, en tant que joueur, je ne peux demander de convoquer ou de refuser un joueur, quel qu'il soit». Il a affirmé toutefois que «tout Algérien qui apporterait un plus à l'équipe nationale est le bienvenu.» Bougherra : «Il n'est jamais trop tard» Madjid Bougherra avait été l'un des joueurs qui affichaient leur irritation quant aux atermoiements de Mehdi Lacen par rapport à l'équipe nationale. «Je ne vois pas comment on peut hésiter à jouer pour l'Algérie», nous avait-il déclaré dans une interview. Après avoir pris connaissance de la décision de Lacen de répondre favorablement à une éventuelle convocation du sélectionneur, il a salué cette évolution. «Si ce qu'il dit vient du cœur, pourquoi pas ? Il n'est jamais trop tard. Il a peut-être eu besoin de temps pour bien réfléchir», a-t-il estimé. Tout en insistant sur le fait que «c'est au sélectionneur de voir s'il peut apporter un plus à l'équipe», il a ajouté que, «personnellement, je n'ai rien contre sa venue si cela serait dans l'intérêt de l'Algérie, car seul l'intérêt du pays doit prévaloir». Abdeslam : «Même s'il joue à mon poste, bienvenue à lui !» «Je souhaite en premier lieu la bienvenue à Lacen. Je salue sa décision de porter les couleurs de la sélection de son pays d'origine. Je tiens à souligner aussi que la sélection a besoin de n'importe quel joueur qui peut apporter un plus. Même s'il occupe le même poste que moi, car l'Algérie a besoin de l'ensemble de ses enfants pour préparer le match de la Zambie dans les meilleures conditions possibles.» Maïza : «Il joue quand même en Liga !» «Je pense que Lacen a choisi la bonne solution en acceptant de porter le maillot national. De plus en Liga, il évolue dans l'un des meilleurs championnats au monde. C'est dire qu'il apportera un grand plus à la sélection. Nous lui souhaitons la bienvenue et à n'importe quel autre joueur qui est en mesure d'apporter un plus, comme l'a déclaré le sélectionneur national.» Zaoui : «L'intérêt de l'Algérie avant tout» «Je pense que la décision prise par Lacen de rejoindre l'EN est une bonne nouvelle, vu ses grandes capacités. Il va donner plus de solutions au sélectionneur Rabah Saâdane. En ce qui nous concerne, en tant que joueurs, nous souhaitons la bienvenue à Lacen. Nous espérons qu'il réussira et réalisera avec nous le rêve de tout le peuple algérien. Lacen a prouvé son nationalisme et son attachement pour son pays l'Algérie. Pour finir, je tiens à souligner que l'intérêt de l'Algérie passe avant tout.» Gaouaoui : «Avec lui, Saâdane aura plus de solutions» «Vu ses grandes capacités ainsi que son niveau, je pense que la venue de Lacen nous sera bénéfique, puisqu'il pourra apporter un plus à l'EN. Comme vient de le dire mon ami Zaoui, sa venue apportera aussi de nouvelles solutions au sélectionneur. Il nous reste deux matches difficiles à négocier et nous avons besoin de joueurs prêts pour continuer sur notre lancée.»